Enregistré à Vienne

« Fidelio » pour toujours

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Publié le 17/04/2020
Bel exemple d’adaptation aux circonstances, le « Fidelio » de Beethoven, qui devait être l’événement de la saison viennoise, a été filmé malgré la fermeture des théâtres et connaît une belle diffusion à la télévision et sur Internet.
Une mise en scène de Christoph Waltz

Une mise en scène de Christoph Waltz
Crédit photo : DR

Le Theater an der Wien, deuxième des trois scènes lyriques de la capitale autrichienne, proposait l’événement du 250e anniversaire de la naissance de Ludwig Van Beethoven, « Fidelio », son unique opéra. Là même où il fut créé en 1805, en pleine invasion napoléonienne.

La première de « Fidelio », proposé dans la version remaniée en deux actes de 1806, qui donne une importance plus grande aux personnages secondaires, devait avoir lieu le jour où fut décidée la fermeture des théâtres à Vienne. Heureusement, le spectacle a été filmé et diffusé par la télévision autrichienne ORF 2, bel exemple de sauvetage alors que nombre de spectacles en cours de préparation ou répétition ont été tout simplement annulés. En France, Arte, qui l'a diffusé le lundi de Pâques, le propose en replay jusqu'au 2 mai. Il est aussi disponible sur plusieurs plateformes de streaming (Medici TV, Myfidelio.at...).

Le comédien autrichien Christoph Waltz, célébrité nationale et hollywoodienne aux deux Oscars (pour les rôles du colonel SS Hans Landa dans « Inglourious Basterds » et du dentiste King Schultz dans « Django Unchained » de Quentin Tarentino), signe sa troisième mise en scène lyrique, après « Le Chevalier à la Rose » et « Falstaff » à l’Opéra des Flandres.

S’il est un opéra qui peut parler d’actualité en ces temps de confinement, c’est bien « Fidelio », qui traite de l’amour conjugal et de l’injustice : victime d'un emprisonnement arbitraire, un homme est libéré grâce au courage de sa femme, qui se déguise en homme pour se faire embaucher dans la geôle où il a été jeté. Les droits de l’homme sont aussi évoqués par un formidable chœur de prisonniers.

Le dispositif imaginé par l’architecte germano-américain Bartow Leibinger est spectaculaire : un immense escalier qui occupe toute la scène, surplombé par une ouverture en forme d’œil vers la lumière et la liberté. Et on admire l’adresse du réalisateur du film Felix Breisach pour donner vie à un tel dispositif.

La direction d’acteurs de Christoph Waltz est très sobre et concentrée sur les rapports profonds entre les personnages du drame, tous habillés de façon intemporelle, un théâtre minimaliste superbement éclairé par Henry Braham et d’une redoutable efficacité.

La distribution, sans être de premier plan, est très équilibrée. Nicole Chevalier (Fidelio) et Eric Cutler (Florestan) ont les moyens de leurs rôles écrasants et les personnages secondaires sont exemplaires, le Rocco de Christof Fischesser comme le Pizarro de Gábor Bretz. Le Chœur Arnold Schoenberg mérite tous les éloges et Manfred Honeck dirige les Wiener Symphoniker avec une énergie vibrante.

Olivier Brunel
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Source : Le Quotidien du médecin