Offre inadaptée et saturée, parcours de soins trop peu gradué, gouvernance peu opérationnelle… le constat de la Cour des comptes sur la pédopsychiatrie est sévère. Publié fin mars, le rapport dresse un portrait des plus inquiétants de l’organisation des soins psychiques infanto-juvéniles en France, alors qu’environ 1,6 million d’enfants et adolescents souffriraient d’au moins un trouble de cet ordre. À travers neuf recommandations, le texte invite ainsi à réorganiser l'ensemble du secteur.
À peine la moitié des jeunes concernés bénéficieraient des soins prodigués en pédopsychiatrie par des professionnels spécialisés selon les différentes modalités (ambulatoire, hospitalisations partielles et complètes), estime la Cour des comptes. Avant de pointer « l’état actuel de l’organisation des soins, et en particulier dans les centres médico-psychologiques infanto-juvéniles (CMP-IJ), (au sein desquels) une partie des patients suivis ne souffrent que de troubles légers, au détriment de la prise en charge d’enfants souffrant de troubles plus sévères ». À cela s’ajoute la crise de la démographie médicale. Le nombre de pédopsychiatres a chuté de 34 % entre 2010 et 2022. La Cour appelle ainsi à « mettre en œuvre une politique d’attractivité renforcée de la pédopsychiatrie en valorisant davantage les parcours hospitalo-universitaires et en soutenant la recherche française dans la discipline. À cet effet, il importera de doubler le nombre d’étudiants formés à la pédopsychiatrie et d’augmenter les recrutements de MCU-PH ».
Autre motif d’inquiétude relevé par les sages de la rue Cambon : le parcours de soins. La Cour rappelle l’organisation autour de « secteurs infanto-juvéniles » avec des missions « très larges » définies par une circulaire de 1972, mais aussi l’application de textes ultérieurs qui ont brouillé les rôles, notamment sur le premier recours. Le rapport souligne ainsi que les CMP-IJ consacrent « près de 50 % de leur travail (…) à recevoir pour des séances d’évaluation et d’orientation, des patients qui ne bénéficient pas ensuite d’un suivi au long cours ».
Si le parcours manque de clarté, la gouvernance pèche aussi, selon les magistrats. Ils estiment ainsi que la feuille de route sur la santé mentale « ne se fixe pas d’objectifs clairs, tant en termes quantitatifs que qualitatifs, et ne prévoit pas de programmation calendaire pour sa mise en œuvre ». Des objectifs qui aideraient pourtant à mieux structurer et planifier cette politique.
Gouvernance lisible, attractivité des carrières renforcée, amélioration des parcours de soins, augmentation de l’offre de la prise en charge… la prescription de la Cour des comptes pour la pédopsychiatrie fait écho aux différentes recommandations pour de nombreux autres secteurs du système de santé. N’y aurait-il pas urgence à agir ?
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