Sans majorité à l’Assemblée, aucun gouvernement ne peut faire voter ses réformes sans risquer la censure. Alors, dans cette nouvelle législature, il sera nécessaire de créer des dynamiques transpartisanes pour faire passer des textes. C’est dans cette logique que l'Institut Avant-Garde a publié, le 8 août, ses « 40 propositions pour une grande coalition ».
Ce groupe de réflexion est fondé et dirigé par Clara Léonard, docteure en économie, spécialiste de la dette publique. Le président de son conseil scientifique est Pierre Rosanvallon, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), qui occupe également la chaire d’histoire moderne et contemporaine au Collège de France.
Plus de poids et de pouvoir aux ARS
Parmi ces 40 mesures destinées au futur gouvernement, trois concernent la santé. La plus forte concerne l’accès aux soins, sous la forme d’un « plan de régionalisation et de simplification de la gestion hospitalière », que l’institut appelle à mettre en œuvre dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, dont le rapporteur est le député (Les Républicains) Yannick Neuder.
Le groupe de réflexion pointe la répartition géographique des médecins et leur coordination avec d’autres professionnels de santé « liée aux modes de rémunération ». Ainsi, selon lui, la délégation des tâches médicales « se heurte aux effets structurants du paiement à l’acte en médecine ambulatoire, qui incite à une pratique individuelle ». Et « le paiement à l’acte, encore dominant, a également pour corollaire une charge administrative lourde pour les médecins, leur enlevant du temps de soin et dégradant leurs conditions de travail, a fortiori à l’hôpital ». Enfin, écrit le cercle de réflexion, les incitations financières à l’installation des médecins dans les zones sous-dotées « n’ont pas fait la preuve de leur efficacité, compte tenu des préférences des médecins ».
Ses propositions sont de simplifier et adapter progressivement la T2A dans les établissements hospitaliers aux spécificités territoriales ; doter les agences régionales de santé des moyens du pilotage de l'offre de soins, « en leur allouant une enveloppe financière en lien direct avec les besoins estimés de la population dont elle a la charge » ; et renforcer le pilotage par les ARS de l’offre de soins, « au travers notamment de la maîtrise du conventionnement et des modalités de rémunération des médecins et des professionnels de santé en général ».
Des points de convergence existent entre les différents groupes politiques, notamment dans leur volonté commune de lutter contre les déserts médicaux… Mais pour l’instant, faut-il ajouter, les partis ne sont pas d’accord sur la manière de procéder. Le NFP, par la voix notamment de Guillaume Garot (Parti socialiste), entend réguler l’installation des médecins et engager un plan pluriannuel de recrutement des professionnels de santé, tout en revalorisant les salaires, tandis que les troupes du Président souhaitent augmenter les capacités de formation des universités et libérer du temps médical pour les médecins.
Les ressources des Ehpad en question
Une mesure concerne l’attendu plan grand âge. L’institut conseille de « lancer un plan des métiers du care pour répondre à la fois aux besoins sur le territoire, au virage domiciliaire et à la qualité de ces emplois », citant les salaires, les conditions d’emploi, de travail et les horaires. Il invite également à « une réflexion sur les ressources des Ehpad », dont les marges de manœuvre des employeurs sont limitées en raison d’une forte régulation publique des ressources.
L’institut établit que le Nouveau Front populaire et Ensemble (majorité sortante) convergent dans la volonté des premiers de « lancer un plan grand âge en rénovant les Ehpad, en augmentant et en formant les professionnels du grand âge » et des seconds de « créer un choc d’attractivité pour les métiers du grand âge ». Côté financier, l’impact budgétaire pluriannuel serait d’1,7 milliards d’euros : 1,2 milliard d’évolutions de la masse salariale, d’effets de l’inflation et mesures nouvelles nécessaires à l’adaptation du secteur aux besoins de la population et 0,5 milliard pour le volet investissement.
Des aides sociales versées à la source
Enfin, ultime mesure qui concerne la santé et possiblement convergente entre les différents groupes à l’Assemblée : le versement à la source des aides sociales. Une façon de « rendre le système moins complexe et plus transparent, unifier les modes de gestion, tout en luttant contre la fraude sociale ». Car les rangs macronistes entendent verser automatiquement les aides sociales d’ici 2027, quand le NFP veut réduire le non-recours et LR, lutter contre la fraude. Le montant maximal de cette mesure serait de 9 milliards d’euros, estimé à 4 milliards d’euros d’ici 2027. Pour rappel, l’année 2023 a été marquée par un record inédit de 466 millions d’euros de fraudes à l’Assurance-maladie détectées et stoppées.
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