Bayrou favorable à une « régulation » à l’installation des médecins libéraux

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Publié le 01/04/2025

Devant le Conseil économique social et environnemental (Cese), le Premier ministre s’est dit favorable mardi 1er avril à une « régulation » à l’installation des médecins. Une référence au texte contre les déserts médicaux porté par Guillaume Garot (PS) examiné le lendemain par les députés. Une position qui diffère de celle de son ministre de la Santé, fragilisé.

Crédit photo : JEANNE ACCORSINI/SIPA

François Bayrou a un sens du timing politique bien à lui. Mardi 1er avril, à la veille d’une discussion cruciale à l’Assemblée nationale sur la désertification médicale, le Premier ministre s'est dit favorable à une « régulation » de l'installation des médecins, une position à contre-courant de son ministre de la Santé Yannick Neuder et, dans une moindre mesure, des députés de la commission des Affaires sociales, qui ont rejeté la semaine dernière la disposition en ce sens contenu dans la proposition de loi Garot, désormais examinée en séance publique.

« Il faut (...) sortir de l'enlisement et de l'impasse. Il faut probablement une régulation, comme l'ont décidé, conscients de la difficulté, nombre de professions de santé », a affirmé François Bayrou devant le Conseil économique social et environnemental (Cese), citant le cas des chirurgiens-dentistes « qui ont décidé de prendre en main cet impératif ». Dans son discours, le Palois a cité indirectement le texte qui sera présenté dans l’Hémicycle le lendemain, disant son gouvernement « attentif aux initiatives des parlementaires ».

Un plan santé fin avril

Le gouvernement « est soucieux de construire une solution incluant l'ensemble des acteurs et donc un plan de solutions concrètes, qui tiendra compte des débats parlementaires, de leurs réussites ou de leurs difficultés, devra être présenté avant la fin de ce mois », a promis François Bayrou. « La première étape de ce plan doit être le repérage précis et complet des territoires en souffrance, une cartographie des devoirs de prise en charge (...) de nos compatriotes réduits à l'abandon dans ce domaine », a-t-il détaillé, au moment où l’Ordre des médecins affirme que les zones surdotées sont rarissimes.

Le Premier ministre a ajouté qu'il allait « inviter toutes les parties prenantes, dès la semaine prochaine, avec les ministres concernés, pour que nous examinions ensemble des solutions pratiques, rapides et concrètes ». Ajoutant : « Je ferai tout pour que ces solutions soient adoptées. Si elles ne le sont pas, le gouvernement interviendra. »

Après l’échec en commission, le groupe transpartisan devrait réintroduire dans le texte sa mesure-phare de l’article 1 par amendements. Le calendrier de cette semaine parlementaire consacrée aux initiatives transpartisanes étant embouteillé, la conférence des présidents a décidé de poursuivre son examen si nécessaire la semaine du 5 mai.

Les jeunes suffisamment sous contraintes, selon les doyens

Lors d'une conférence de presse organisée mardi 1er avril, la Conférence des doyennes et des doyens des facultés de médecine a réagi aux déclarations de François Bayrou. Pour le Pr Marc Humbert, vice-président de l’institution, « la profession est attractive » et toute mesure coercitive serait contre-productive pour le système de santé. « Le Français n’est pas toujours facile à contraindre. On sait déjà que certains de nos collègues partent en Suisse, en Belgique, au Luxembourg, voire outre-Atlantique. Imposer des contraintes, c’est prendre le risque de départs à l’étranger », a-t-il souligné. De son côté, la Pr Isabelle Laffont, présidente de la Conférence, a souhaité rappeler que les jeunes médecins étaient déjà soumis à des contraintes lors du choix de leur spécialité et de leur région d'exercice, à l’issue des épreuves de fin de 6e année. « En réalité, les jeunes ne font pas ce qu’ils veulent : ils sont déjà contraints sur la région où ils vont s’installer et la spécialité qu’ils vont exercer. Cette contrainte génère déjà beaucoup d’inquiétudes. » Plutôt que de nouvelles obligations, la Conférence préconise des mesures incitatives et la mise en œuvre d'un assistanat territorial – un contrat volontaire d'un ou deux ans en échange de contreparties comme l'accès en secteur II. « Offrir des raisons positives aux jeunes de s’installer dans les territoires, c’est cela la bonne solution », soutient le Pr Humbert. « Si les pouvoirs publics le souhaitent, cette mesure pourrait être mise en place dès novembre 2025, mobilisant ainsi plusieurs centaines de jeunes médecins », conclut la présidente.

L.J. (avec AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr