Le 2 mars 2022 était promulguée la loi visant à renforcer le droit à l’avortement. On y retrouvait notamment l’extension des délais pour recourir à une IVG instrumentale qui passaient donc de 14 à 16 semaines d’aménorrhée (SA). Mais dans la mise en application, l’accès à l’IVG est compliqué et inégalitaire sur le territoire.
C’est ce que dénonce l’association de soignantes Pour une M.E.U.F. dans une tribune publiée sur leur site internet le 2 mars. Elle rappelle que, comme l’avait montré le planning familial dans un décompte à l’automne dernier, un grand nombre de centres hospitaliers ou de cliniques ne proposent tout simplement pas la prise en charge pour les demandes d’IVG après 14 SA et ne prévoient pas de le faire.
« Les disparités entre les différents territoires sont importantes : chaque centre fixe ses propres limites de prise en charge au gré des clauses de conscience des professionnel·les et de leur bon vouloir », souligne l’association qui ajoute que cela rend « la lisibilité et l’accès aux soins complexes pour les patient·es ».
Pas de choix de la méthode
L’association explique également que des établissements imposent la méthode médicamenteuse « bien que la méthode recommandée en première intention à ces termes soit l’aspiration sous anesthésie locale ou générale ».
Elle dénonce également une prise en charge en salle de naissance, à proximité des accouchements en cours ; des patientes qui peuvent être amenées à « visualiser le produit de la grossesse » ; ou encore une gestion de la douleur « souvent complexe voir insuffisante ».
« Concernant la méthode instrumentale après 14 SA, les premières données françaises sur la sécurité de la procédure sont rassurantes, comme attendu selon l’expérience des pays voisins », ajoute la tribune.
En conséquence, l’association estime que « permettre le choix de la méthode est essentiel » et que « dans les modalités actuelles de prise en charge en France, imposer la méthode médicamenteuse comme seule alternative après 14 SA est une violence gynécologique évidente ».
Manque de volonté politique
Pour l’association c’est aussi un manque de volonté politique au sein des hôpitaux qui est en cause.
« Dans certains établissements, la réalisation par méthode instrumentale de ces IVG après 14 SA a été déléguée principalement à des médecins en formation (internes de gynécologie-obstétrique) sans aucun accompagnement ou supervision », regrette-t-elle.
Ce qui témoigne selon Pour une M.E.U.F. à la fois du désintérêt des praticiens pour la pratique des IVG mais aussi de leur mauvaise foi quand parallèlement ils « prétendent à d’autres égards que la technique est trop complexe ou plus risquée ».
L’association déplore trop peu de créneaux disponibles dans les blocs opératoires et un manque de moyens financiers et humains pour former les professionnels de santé.
Enfin, alors que la loi ouvrait la pratique des IVG instrumentales en établissements aux sages-femmes, les décrets d’application ne sont toujours pas publiés.
Rendre effective la loi et aller plus loin
Au regard de tout cela, l’association considère que « le prix est cher payé par les femmes et toutes les personnes ayant recours à l’IVG : lieux de prise en charge difficiles à trouver, délais de rendez-vous augmentés, distances à parcourir de plus en plus longues pour accéder aux soins, rendant parfois impossible les avortements ».
Elle demande en conséquence un accès effectif pour tous les délais prévus par la loi, la formation des professionnels à la technique instrumentale, l’ouverture aux sages-femmes, le libre choix de la méthode pour les femmes selon les recommandations de bonnes pratiques « assorti d’une information loyale et claire sur les modalités de chaque méthode, et dans des espaces dédiés », la suppression de la clause de conscience spécifique à l’IVG, un meilleur maillage territorial des centres d’IVG en France avec des ouvertures ou des réouvertures et la poursuite de l’allongement des délais, « voire leur suppression ».
Enfin alors que l’Assemblée et le Sénat ont tous deux voté une première fois la constitutionnalisation du droit à l’IVG, mais pas dans les mêmes termes, l’association demande que cette mesure aille au bout, mais que le droit soit reconnu aussi pour les personnes non-binaires et les hommes trans.
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