« Une place prépondérante à la médecine de ville, à sa collaboration avec les structures douleurs chroniques ainsi qu’à la juste mobilisation des services hospitaliers de spécialité » : c'est ce que met en avant le nouveau parcours de santé dans les douleurs chroniques élaboré par la Haute Autorité de santé (HAS) en partenariat avec le Collège de médecine générale (CMG) et la Société française d'étude et de traitement de la douleur (SFETD).
Renforcer la prévention, améliorer les délais et favoriser la coordination des acteurs, les objectifs de ce guide publié le 14 février visent à « apporter une réponse graduée et adaptée à chaque personne », est-il indiqué dans un communiqué, le niveau de recours aux soins étant déterminé par les besoins du patient.
Le parcours est hiérarchisé en trois niveaux : niveau 1, la ville ; niveau 2, les consultations et centres d'évaluation et de traitement de la douleur chronique (SDC) et les services hospitaliers de spécialités ; niveau 3, les centres d'évaluation et de traitement de la douleur chronique. « Quel que soit le niveau de prise en charge, il est essentiel que le médecin traitant continue de suivre ses patients et d’assurer la coordination de ses soins », est-il souligné.
Des carences persistantes en France
Touchant plus de 12 millions de Français, la douleur chronique est définie comme une douleur persistante ou se reproduisant pendant plus de 3 mois*. La douleur chronique altère la qualité de vie des patients et impacte fortement la vie de l’entourage. Les retentissements sont tant sur le plan physique, psychologique, social que professionnel ou scolaire, jusqu'à être une source de handicap.
« Si les trois plans nationaux de lutte contre la douleur (1998 à 2010) ont permis de progresser, la prise en charge de la douleur chronique et la formation des professionnels sont encore à améliorer », estime la HAS. Les délais de prise en charge restent trop importants au regard des critères internationaux. À ce jour, 70 % des patients n’ont pas de prise en charge adaptée. Ce à quoi s'ajoutent des inégalités territoriales d’accès aux soins spécialisés, notamment pour les populations les plus vulnérables. « Or, plus la prise en charge est tardive, plus la situation est complexe et les possibilités d’amélioration, limitées », est-il rappelé.
La télésanté au service d'une interface ville/hôpital
Centrée sur les besoins du patient, la nouvelle organisation donne une place prépondérante aux professionnels de ville et « propose de créer une interface entre la ville et les structures spécialisées douleur chronique pour un soutien des professionnels de ville et une meilleure coordination entre la ville et l’hôpital », lit-on.
Les professionnels de santé de premier et second recours en ville constituent ainsi le premier niveau de prise en charge de la douleur chronique. Le médecin traitant est « le coordonnateur et responsable de ce parcours », qui comporte idéalement un infirmier, un masseur kinésithérapeute, un pharmacien et un psychologue, et si nécessaire des médecins spécialistes de ville.
En cas de difficulté rencontrée au premier niveau de prise en charge, le médecin traitant peut solliciter le soutien des consultations d’évaluation et de traitement de la douleur de leur territoire. Ces structures peuvent soutenir la médecine de ville « au moyen d’une interface qui s’appuie notamment sur des services de télésanté : hotline dédiée, téléconsultations, téléexpertises, réunions de synthèse pluriprofessionnelles et réunions de concertation pluridisciplinaires en visioconférence, outils de partage des données et services de partage et de diffusion des savoirs », est-il détaillé.
À terme, cette interface doit permettre « la prise en charge de plus en plus complexe de patients douloureux chroniques par les médecins en ville » ainsi qu'une meilleure coordination avec le deuxième niveau.
Niveaux 2 et 3 pour les douleurs rebelles
Pour les patients souffrant de douleurs chroniques rebelles qui ne répondent pas aux traitements bien conduits en niveau 1, le médecin fait appel au deuxième niveau de prise en charge. Le patient est adressé pour un diagnostic, une évaluation ou une prise en charge spécifique soit vers une consultation d’évaluation et de traitement de la douleur, soit vers un service hospitalier de spécialité selon le type de douleur chronique (par exemple en neurologie pour une céphalée chronique ou une douleur neuropathique, en rhumatologie pour une douleur chronique musculosquelettique, etc.).
Lorsque les patients présentent des situations trop complexes pour une prise en charge de deuxième niveau, ils peuvent être orientés vers un centre d’évaluation et de traitement de la douleur chronique pour une réunion de concertation pluridisciplinaire, une évaluation complémentaire ou un acte technique spécifique réalisable uniquement en niveau 3, ou une hospitalisation.
Indispensable participation du patient
La HAS rappelle que la prise en charge d’une personne présentant une douleur chronique « doit être élaborée et mise en œuvre avec son accord et sa participation ». Cette prise en charge peut en effet nécessiter un changement de son mode de vie, un reclassement professionnel ou un engagement dans un nouveau projet de vie.
La HAS considère qu’un accompagnement par des professionnels est nécessaire pour maintenir voir renforcer l’autonomie du patient, l’aider à gérer lui-même sa maladie et ses traitements et le soutenir dans ses changements de mode de vie. Le médecin doit savoir s’appuyer sur les aidants et les familles pour les patients fragiles ou dyscommunicants, en particulier les personnes âgées dépendantes et les personnes en situation de handicap physique, sensoriel, psychique ou intellectuel.
* Définition de l'International Association for the study of pain task force on wait-times (IASP)
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