Un premier pas
Jusqu’en 2007, la question essentielle face à un cancer bronchique était de préciser s’il était, ou non, à petites cellules. Et, dans le cas d’un CBNPC métastatique, le traitement se fondait sur le doublet sel de platine/drogue de 3e génération, dont le choix découlait de critères cliniques (âge, état général, comorbidités) pour anticiper la tolérance. En effet, aucune étude n’avait permis de montrer la supériorité d’une association par rapport à une autre, la médiane de survie était de 8 à 10 mois quelle que soit la chimiothérapie.
Un premier pas vers la personnalisation du traitement a été fait en 2008 avec les résultats de l’étude de Scagliotti, qui a évalué l’association cisplatine + pemetrexed versus cisplatine + gemcitabine sur un peu plus de 1 600 patients. Si dans la population globale il n’y avait pas de différence en termes de survie entre les deux doublets de traitement, en revanche les résultats variaient en fonction du sous-type histologique, ce qui a abouti à une AMM du pemetrexed fondée sur l’histologie.
L’addiction oncogénique.
Un an plus tard, en 2009, un second pas a été fait vers la personnalisation du traitement, cette fois basée sur la biologie moléculaire, et plus précisément sur la dépendance de la cellule tumorale à une anomalie. « La cellule cancéreuse accumule au fil du temps diverses anomalies moléculaires, et parfois elle est dépendante d’une seule de ces anomalies pour sa survie et sa multiplication (addiction oncogénique). Tous les progrès récents en cancérologie pulmonaire découlent de la connaissance de ces anomalies », a expliqué le Dr Catherine Daniel. La première anomalie particulièrement étudiée porte sur le récepteur au facteur de croissance épidermique (EGFR), fréquemment surexprimé dans les cellules cancéreuses bronchiques. Il peut être l’objet de mutations activatrices, qui sont prédictives d’une réponse aux inhibiteurs TKI de l’EGFR (taux de réponse de 72 %). Les résultats des études ayant évalué la place de ces inhibiteurs chez les patients mutés ont convergé pour montrer, comparativement au doublet de chimiothérapie, leurs bénéfices sur la survie sans progression et la qualité de vie, mais pas sur la survie globale. Malheureusement, cette réponse n’est que transitoire : la médiane de survie sans progression se situe entre 8 et 12 mois. Le mécanisme de résistance le plus souvent rencontré est lié à l’acquisition d’une deuxième mutation.
Autres mutations cibles
Autre anomalie moléculaire intéressante en oncologie thoracique : le réarrangement de l’ALK (anaplastic lymphoma kinase). « Dans 5 % des CBNPC, on observe des réarrangements, en particulier la fusion du gène ALK avec un autre gène. Le crizotinib est un puissant inhibiteur de l’ALK, comme cela a été montré dans une première étude, dont les résultats ont été tels qu’une étude de phase 3 a été directement mise en place et que sans attendre les résultats, le médicament a été approuvé par la FDA à l’été 2 011. Après une ATU, l’AMM est imminente en Europe », a précisé le Dr Daniel. Mais là aussi, on observe chez les patients traités l’acquisition de résistances.
Troisième anomalie moléculaire oncogénique : la voie des protéines kinases RAS-RAF-MEK. Les mutations KRAS sont les plus fréquentes dans les adénocarcinomes (20 à 25 % des cas), mais si elles sont connues depuis les années 1980, les tentatives de développement de traitements ont jusqu’alors échoué. Un espoir récent se fonde sur une étude randomisée de phase 2 menée sur 87 patients, qui a montré, comparativement à l’association taxotère-placebo, les bénéfices de l’association taxotère-inhibiteur de MEK : meilleur taux de réponse et de survie sans progression, sans différence sur la survie globale.
Pour le carcinome épidermoïde, second type histologique le plus fréquent, le traitement a peu évolué ces dernières années, mais des perspectives s’ouvrent aujourd’hui avec la mise en évidence d’anomalies moléculaires sur des récepteurs membranaires ou des voies de signalisation intracellulaire. Des essais thérapeutiques, majoritairement de phase 1, sont en cours.
« Ainsi, en 2012, le vaste groupe des adénocarcinomes peut être scindé en sous-groupes de maladies plus rares, chacune étant définie par une anomalie moléculaire oncogénique. Grâce au soutien de l’Inca et la mise en place de 28 plateformes de génétique moléculaire, il est possible chez tout patient métastatique de rechercher 7 biomarqueurs, dont la présence peut permettre le ciblage thérapeutique dans le cadre d’essais cliniques », conclut le Dr Catherine Daniel.
D’après la communication du Dr Catherine Daniel, lors des Entretiens du département d’oncologie médicale et du département de recherche clinique, Institut Curie.
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