S’appuyant aujourd’hui sur les derniers résultats positifs des études montrant les bénéfices d’un dépistage du cancer bronchopulmonaire par scanner thoracique à faible dose, la HAS préconise que l’Inca engage un programme pilote et soutienne la mise en place d’études complémentaires en vie réelle.
« Face à cette décision de la HAS, j’ai un sentiment un peu partagé. Certes, c’est une satisfaction de voir que le dépistage est enfin reconnu en termes d’efficacité, mais c’est aussi une petite déception pour la mise en place d’un dépistage à grande échelle, qui va encore prendre du temps… Nous n’avons toujours pas d’appel à projet de l’Inca. Mais, restons optimistes : on avance, déclare le Dr Olivier Leleu (Intergroupe francophone de cancérologie thoracique, CH d’Abbeville). Sans attendre l’Inca, une dizaine de projets se lancent dans de nombreuses régions. »
Des bénéfices bien documentés
L’efficacité du dépistage ne se discute plus. Les deux grandes études, NLS (1) et Nelson (2) en 2019 mettent en évidence une diminution significative de la mortalité par cancer du poumon (de l’ordre de 20 %). L’étude italienne Mild a même montré une réduction de la mortalité spécifique de 39 % à 10 ans avec un dépistage annuel ou bisannuel pendant plus de 5 ans (3).
Cependant, l’étude NLST avait aussi été grevée d’un nombre élevé de faux positifs, ce qui avait entraîné la décision de la HAS en 2016. Depuis, de nouvelles analyses ont été réalisées et, dans l’étude Nelson, ce nombre de faux positifs n’est plus que de l’ordre de 1,2 %.
La population cible a également été bien identifiée. Les critères d’inclusion de l’étude Nelson ont été repris. « Le dépistage cible les 50-74 ans fumeurs actifs ou sevrés depuis 10 ou 15 ans, ayant fumé plus de 10 cigarettes par jour durant plus de 30 ans ou plus de 15 cigarettes par jour durant plus de 25 ans. Il fait appel au scanner à faible dose, répété un an plus tard, puis tous les deux ans (si les deux sont négatifs). Il est important de ne pas dépasser le délai de 2 ans. Dans l’étude Nelson, dans le bras scanner à 2 ans et demi, il y avait plus de cancers du poumon de stade IV et plus de cancers de l’intervalle que dans le bras scanner tous les 2 ans », souligne le Dr Leleu.
Les principaux points à clarifier
Différents points devront être évalués à l’occasion du programme pilote ou d’études complémentaires, notamment les aspects éthiques et sociétaux liés aux disparités observées sur le territoire concernant l’accès au dépistage pour les populations dites vulnérables. « L’impact organisationnel est intéressant à étudier. Concernant l’impact médicoéconomique, je pense qu’il ne fait pas de doute que la balance est en faveur du dépistage. Dépister des cancers du poumon de petite taille permet de les opérer, alors que les cancers à un stade avancé font l’objet de traitements lourds et coûteux… sans compter les coûts indirects (arrêts de travail, etc.). Concernant l’aspect sécuritaire du dépistage et sa qualité, les études ont déjà été faites, explique le pneumologue. Des études complémentaires sont en revanche nécessaires pour bien flécher le parcours du patient. Il faut délivrer une information claire aux participants (expliquer les raisons du dépistage, ses modalités, le risque de faux positif, de surdiagnostic, les critères d’exclusion). Enfin, autre point très important, le dépistage doit être associé au sevrage tabagique ».
Entretien avec Dr Olivier Leleu (CH d’Abbeville)
(1) Nejm 2011;365:395-409
(2) De Koning HJ et al. NEJM 2020;382:503-13
(3) Pastorino U et al. Ann Oncol 2019;30(7):1162-9
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