Cancer précoce du col utérin

Intérêt de la technique du ganglion sentinelle pelvien

Publié le 26/05/2010
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Crédit photo : PHANIE

DE FAÇON générale, l’une des voies de progrès en chirurgie oncologique est de réduire la morbidité liée au traitement et d’améliorer la stadification. La technique du ganglion sentinelle est désormais une technique utilisée en routine dans différentes tumeurs solides, comme le cancer du sein ou le mélanome. Cette approche se fonde sur l’hypothèse selon laquelle le premier relais ganglionnaire est représentatif du statut ganglionnaire régional et en aval. Elle ne peut, bien sûr, être envisagée que dans les cancers où seule une minorité de patients ont des métastases ganglionnaires, rendant les curages systématiques inutiles dans la majorité des cas.

Dans le cancer du col utérin, il est établi que l’atteinte ganglionnaire est un facteur pronostique majeur. Mais réaliser un curage expose à effets secondaires, qui sont principalement à type de lymphocèle, d’adhérence et de lymphœdème, sans compter le risque de plaie nerveuse ou vasculaire peropératoire. La technique du ganglion sentinelle est également susceptible de palier les conséquences des variations anatomiques du drainage lymphatique, qui concernent quelque 20 à 30 % des femmes, et qui conduisent à des erreurs de prélèvement. Enfin, la qualité de l’examen anatomopathologique est d’autant meilleure que le nombre de ganglion prélevé est moindre, ce qui favorise la mise en évidence de micrométastases.

Une étude multicentrique française.

Le cancer précoce du col utérin est un bon candidat pour cette technique, qui a fait l’objet d’une évaluation clinique rigoureuse dans une étude multicentrique (sept centres) française entre janvier 2005 et juin 2007. L’analyse a porté sur 127 patientes âgées en moyenne de 44 ans et présentant un cancer épidermoïde ou glandulaire du col de stade 1a1 avec emboles à 1b1. Les ganglions sentinelles étaient détectés par une technique combinant une injection de technétium la veille et de bleu patenté au cours de l’intervention. Une lymphoscintigraphie était réalisée en préopératoire et les repérages des canaux lymphatiques et des ganglions radioactifs et/ou colorés étaient effectués en peropératoire grâce à une sonde de détection endoscopique. Toutes les femmes ont ensuite bénéficié d’un curage classique.

Confirmation de la variabilité anatomique du drainage.

Le premier enseignement de cette étude est la faisabilité de cette technique, dont toutes les femmes ont pu bénéficier. Comme attendu, le taux de détection combinée (96 %) est supérieur à celui de l’isotope seul (87 %) et celui du colorant seul (89 %). La variabilité anatomique du drainage est confirmée : si les ganglions sentinelles prélevés étaient majoritairement ans le territoire ilio-obturateur, 15 % étaient situés dans le paramètre, le territoire iliaque commun, présacré ou para-aortique.

Sept patientes présentaient au moins un ganglion sentinelle métastatique, siégeant dans le territoire ilio-obturateur dans 6 cas, et pour la dernière patiente dans le territoire para-aortique. Une femme présentait des métastases ganglionnaires multiples, alors qu’aucun ganglion sentinelle n’avait été identifié.

« Le taux de faux négatif est de 7 % sur la série globale, mais de 0 % lorsqu’au moins un ganglion sentinelle de chaque côté est examiné ; le risque de faux négatif augmente avec la discordance entre la détection lymphoscintigraphique et la détection peropératoire », insiste le Pr Lécuru. Aucun curage complémentaire n’a identifié de ganglion métastatique lorsque les ganglions sentinelles étaient normaux.

Ainsi, dans cette étude, la sensibilité de la technique est de 100 % par patiente tout comme sa spécificité. La procédure permet de corriger le statut ganglionnaire, qui aurait été faussement négatif chez certaines des femmes qui n’auraient eu qu’un prélèvement ilio-obturateur isolé. Aucune complication spécifique à cette procédure n’a été rapportée.

Il reste maintenant à évaluer l’impact de la technique sur la morbidité. C’est l’objet d’une nouvelle étude à laquelle participent plusieurs centres en France, où les patientes seront, cette fois, randomisées ganglion sentinelle versus ganglion sentinelle suivi de curage en cas de positivité. Cette même étude analysera l’impact pronostique du dépistage de micrométastases. Les premiers résultats ne sont pas attendus avant trois ou quatre ans.

*D’après un entretien avec le Pr Fabrice Lécuru, hôpital européen Georges- Pompidou, Paris.

(1) Lécuru F et coll. Le ganglion sentinelle pelvien. e-mémoires de l’Académie nationale de chirurgie 2008 ; 7 : 54-6.

Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : Bilan spécialistes