« Les médecins généralistes (MG) participants sont invités à repérer les patients à haut risque à l'aide d'un outil de calcul ne prenant pas plus de deux minutes, explique la Dr Delaloge. Ce questionnaire simple en ligne permet de dépister les sujets présentant un haut risque de cancer du sein, du poumon ou colorectal. Pour ces cancers, il existe des scores de risque bien documentés, même si fixer un cut-off reste délicat ». Ces patients se voient alors proposer de participer au programme Interception. S'ils sont partants, les rendez-vous sont pris à Gustave Roussy. Au sein d'un bâtiment dédié construit sur le site, les patients participent alors à une journée Interception d'information et sensibilisation. « Cette journée regroupe un bilan de dépistage, des ateliers de groupe, une synthèse suivie d'une proposition de programme personnalisé, ainsi que son implémentation en pratique clinique », résume l’oncologue.
Un repérage des patients en médecine générale
« Les participants bénéficient de mesures de prévention hygiénodiététiques, d'un suivi et d’un dépistage sur mesure, mis en œuvre en ville par le MG. Ce suivi est complété par un questionnaire en ligne annuel », explique la Dr Delaloge.
Le repérage est fondé sur quelques questions simples et les réponses, entrées dans le logiciel, donnent une estimation du risque. Les questions générales portent sur l'âge, le sexe, le tabagisme, les antécédents de cancer ou d’hémopathie maligne, l'existence d'une anomalie génétique prédisposant au cancer personnel ou familial. Pour le cancer colorectal, s'y ajoutent des questions sur les antécédents de polype(s) du côlon, ainsi que sur les antécédents familiaux de cancer colorectal (au premier degré avant 60 ans, de cancers multiples dans la même branche familiale quel que soit l'âge).
« Enfin, lors de dépistage positif par le MG, le patient se voit proposer une prise en charge immédiate à Gustave Roussy », annonce la Dr Delaloge. Il s’agit ainsi d’un programme complet de prévention, de dépistage et de prise en charge précoces et personnalisés.
Évaluer le bénéfice du programme
« L'ensemble des étapes d'Interception (repérage, information/sensibilisation, dépistage et prévention personnalisés, prise en charge précoce) devrait permettre de réduire la mortalité spécifique et la morbidité à long terme de ces sujets à haut risque, souligne la Dr Delaloge. En absence de cohorte contrôle, nous évaluerons le bénéfice par comparaison à des cohortes nationales : 4N, Constance et celle de la CNAM. Mais le recrutement de patients volontaires, proactifs, peut induire des biais. C'est pourquoi nous suivons de très près l'étude européenne MyPeBS dédiée au dépistage personnalisé du cancer du sein » (1). Cette étude en cours réunit déjà 7 000 sujets, dont 4 500 à 5 000 patients français. Après quatre ans de suivi, elle évalue si cette stratégie personnalisée permet de réduire l'incidence des cancers du sein de stade 2 par comparaison au dépistage standard.
Un vaste projet de recherche sur le haut risque
« Interception est aussi un programme de recherche sur le haut risque de cancer », ajoute l’oncologue. La constitution d'une vaste cohorte va en effet permettre de disposer d'une importante banque de données notamment sanguines, plasmatiques, urinaires, salivaires, de microbiotes et d'imagerie. « Au sein de ce programme, ce matériel servira cinq principaux objectifs, dont la recherche de marqueurs de risque spécifiques (génomiques, immunologiques, métaboliques, etc.), de stratégies de détection précoce mais aussi de techniques de prévention ciblée ». De plus, il est prévu une évaluation psychosociale de la stratégie d'ensemble et des diverses interventions spécifiques, mais également économique et organisationnelle du réseau ville-hôpital mis en place.
D'après la conférence de presse « Interception, programme de prévention sur-mesure des cancers », avec la Dr Suzette Delaloge (directrice du programme), Gustave Roussy, (Villejuif), 29 janvier 2021.
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