La dernière expertise collective sur la nutrition des patients atteints de cancer, éditée traditionnellement par l’American cancer society (ACS), datait de 2012. L’Inca a souhaité l’actualiser, en collaboration avec le réseau Nacre. « Nous avons passé en revue toutes les études publiées en 2012-2020 consacrées à la prévention nutritionnelle tertiaire des cancers. Seules les études d’intervention et les métaanalyses de qualité avec évaluation nutritionnelle au diagnostic — et pas avant — évaluant le risque de récidive, de second cancer, la mortalité spécifique, la mortalité totale et/ou la qualité de vie ont été retenues. Soit 243 études sur les 8 500 références initiales, explique Paule Latino-Martel, directrice de recherche honoraire, ex-coordinatrice du réseau Nacre, Inrae, Paris. L’analyse de ces données met en évidence des facteurs de risque plus ou moins convaincants ou probables, explicités dans le rapport (1). Il est assorti de recommandations de pratique clinique simples, rédigées dans le souci de leur utilité en MG. Les patients devraient pouvoir se les approprier aisément (2). »
Facteurs protecteurs et délétères
« Quand on dispose de données convaincantes, les recommandations de pratique clinique reprennent, thème par thème (poids, type d’alimentation), les facteurs protecteurs et délétères nutritionnels certains dans les cancers. Elles intègrent une recommandation d’activité physique et de limitation de l’alcool. Elles mettent par ailleurs formellement en garde contre : le "jeune thérapeutique", les compléments alimentaires, tout régime restrictif, sauf indication médicale et les extraits et décoctions de champignons et/ou de plantes médicinales chinoises. Cela au vu de l’absence de bénéfice documenté et des risques potentiels et/ou identifiés d’interférence médicamenteuse, d’effet secondaire, de dénutrition (3,4) », résume Paule Latino-Martel.
Les experts ont identifié plusieurs situations nutritionnelles à risque. Exemple, dans les cancers du poumon, de l’œsophage, la dénutrition guette. Il faut la dépister et prévenir. À l’inverse, dans les cancers du sein, du rein et colorectaux, les patients tendent à prendre du poids sous traitement. On doit alors veiller à limiter cette prise de poids, associée à un surrisque de récidive et de mortalité globale et spécifique.
Dans les cancers des voies aérodigestives supérieurs (VADS), il faut viser l’arrêt complet de l’alcool, avec l’aide si besoin d’un addictologue. Alors que, dans le cancer du poumon, on préconise simplement de normaliser la consommation journalière.
Quant à l’amélioration de la qualité nutritionnelle — limitation des graisses et sucres, des viandes et charcuteries, augmentation des apports en céréales complètes, légumes et fruits —, elle est recommandée à tous comme en prévention primaire. Une alimentation riche en fibres et pauvre en graisse est en revanche formellement préconisée dans les cancers du sein, où ses effets sur les récidives et la mortalité totale sont largement documentés.
Entretien avec Paule Latino-Martel, directrice de recherche honoraire, Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (EREN), ex-coordinatrice du réseau Nacre, Inrae, Paris (1) Inca/Nacre 2020. Impact des facteurs nutritionnels pendant et après cancer (2) Inca/Nacre 2020. Recommandations nutritionnelles pour les professionnels de santé prenant en charge des patients atteints de cancer pendant et après la maladie (3) Inca 2017. Bénéfices de l’activité physique pendant et après cancer : des connaissances aux repères pratiques (4) Nacre 2017. Jeûne, régimes restrictifs et cancer : revue systématique des données scientifiques et analyse socio-anthropologique sur la place du jeûne en France
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