L’insuffisance cardiaque aiguë est à l’origine d’un double risque, immédiat avec une mortalité hospitalière de 8 % (1), devenue supérieure à celle de l’infarctus du myocarde, et différée, la souffrance polyviscérale qu’elle génère intéressant le cœur, coupable et victime, le rein et le foie, aggravant l’état général du patient et faisant le lit aux futures décompensations, expliquant le risque élevé de réhospitalisations, 30 à 50 % à 6 mois.
Face à ce problème de santé publique, toutes les tentations d’amélioration du traitement médicamenteux se sont soldées, jusqu’à présent, par des échecs, le traitement reposant depuis plus de 30 ans sur les diurétiques de l’anse et en fonction du niveau tensionnel, soit la dobutamine en cas de choc, soit les dérivés nitrés si la pression artérielle systolique (PAS) est ≥ 110 mmHg avec un faible niveau de preuve.
L’espoir vient d’un petit peptide vaso-actif, sécrété de manière physiologique au cours de la grossesse, où il régule les adaptations hémodynamiques maternelles avec des effets bénéfiques sur la croissance fœtale, la relaxine-2. Son recombinant, la sérélaxine, possède en effet un profil bénéfique pour traiter les poussées congestives, formes les plus fréquentes d’insuffisance cardiaque aiguë, avec des effets favorables sur la compliance artérielle, le débit cardiaque et le flux sanguin rénal, liés à son action vasodilatatrice via le NO, le GMP cyclique et la régulation du récepteur endothélial à l’endothéline.
Au cours de l’essai RELAX-HF, étude contrôlée de phase III versus placebo ayant inclus 1 161 patients hospitalisés depuis moins de 16 heures pour une insuffisance cardiaque aiguë à pression conservée, la PAS devant être ≥ 125 mmHg, traités par diurétiques de l’anse à une posologie de furosémide ≥ 40 mg, une perfusion intraveineuse de 48 heures de sérélaxine à la dose de 30 µg/Kg/j a entraîné une amélioration de la dyspnée, appréciée par l’aire sous la courbe entre l’état de base et J 5 d’une échelle de score visuelle analogique, sans améliorer la dyspnée quantifiée par l’échelle de Likert, qui étaient les deux critères d’évaluation primaire (2). Alors qu’il n’y avait pas de différence entre les deux groupes pour les critères d’évaluation secondaire, incluant décès ou hospitalisation à J 60, la surprise est venue du critère tertiaire de sécurité qui était le risque de décès à J 180. En effet, la mortalité totale et la mortalité cardiovasculaire à 180 jours sont significativement diminuées de 37 % dans le groupe traité par sérélaxine (figure 1). De plus, la sérélaxine diminue la survenue d’une aggravation de l’insuffisance cardiaque durant la phase hospitalière et la durée de l’hospitalisation. Ces bénéfices sont retrouvés chez les patients présentant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection altérée ou préservée, bien que plus marqués chez ces derniers. Cet effet bénéfique sur la survie pourrait être lié à une action protectrice de la sérélaxine sur les différents organes nobles, comme en atteste l’évolution des biomarqueurs, avec une moindre augmentation de la troponine pour le cœur et de la créatinine pour le rein (3). De plus, la sérélaxine améliore les signes et les conséquences de la congestion, la diminution des peptides natriurétiques étant plus marquée et la posologie totale des diurétiques administrés par voie intraveineuse moindre.
Prudence
L’absence de réduction des réhospitalisations, le nombre relativement bas des événements à 180 jours (65 décès dans le groupe placebo et 42 dans le groupe sérélaxine) incitent cependant à la prudence dans l’interprétation des résultats d’un critère tertiaire et à attendre les données, nous l’espérons tous confirmatoires de l’essai RELAX-AHF-2 dont le recrutement vient de débuter. Cet essai qui doit inclure 6 375 patients possède en effet la taille nécessaire pour démontrer ou non le bénéfice de la sérélaxine sur la mortalité cardiovasculaire à J 180 qui est le critère primaire de jugement.
En cas de positivité de RELAX-AHF-2, nous posséderions ainsi pour la première fois un médicament ayant fait la preuve d’un effet favorable sur la mortalité au cours de l’insuffisance cardiaque aiguë à pression conservée, modifiant le paradigme du traitement de ce syndrome. En effet, l’utilisation courte de la sérélaxine (48 heures) en phase aiguë, en prévenant les dommages des organes nobles, cœur, rein et foie, et en assurant une diminution plus rapide de l’état congestif, engendrerait un effet bénéfique à long terme, rompant un des cercles vicieux auto-aggravant de l’insuffisance cardiaque.
1) Logeart D et al,. Eur J Heart Fail 2 013 ; 15 : 465-76
2) Teerlink, et al, Lancet 2 013 ; 381 : 29-39
3) Metra M. et al, J Am Coll Cardiol 2 013 ; 61 : 196-206
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