« AUJOURD’HUI, l’éducation thérapeutique est affichée comme une priorité de santé publique. C’est le sens des dispositions qui ont été votées dans le cadre de la loi Hôpital patient santé territoire (HPST). Et pourtant avec le nouveau mode de financement, instauré via la T2A (tarification à l’activité), nous ne pouvons plus développer cette activité en hôpital de jour. Or l’éducation thérapeutique a été mise en place historiquement à l’hôpital, où l’on trouve des équipes multidiciplinaires très expérimentées. C’est un vrai problème pour les patients diabétiques, maladie où l’éducation thérapeutique est un enjeu fondamental », explique le Pr Agnès Hartemann, chef du service de diabétologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.
Désormais l’activité en hôpital de jour est réglementée par une circulaire de la DHOS (Direction de l’hospitalisation et l’organisation des soins). Ce texte, qui vise à éviter un transfert entre les consultations externes et l’hôpital de jour, est communément appelé « circulaire-frontière » par les médecins hospitaliers. « C’est ce texte qui réglemente ce qu’on peut faire et ne pas faire en hôpital de jour. Or, dans de nombreux centres, l’hôpital de jour pouvait servir au déroulement de programmes ambulatoires d’éducation thérapeutique avec un groupe de patients et une équipe multi-disciplinaire. Le thème pouvait en être la prévention des plaies du pied chez les patients à risque ou l’acquisition de savoir faire (diététique, auto-contrôle glycémique) dans le diabète de type 2. Le déroulement sur une journée avec la même équipe permettait de travailler avec le patient sur ses représentations et ses difficultés personnelles à suivre les traitements. Le problème actuel est que pour être « dans les clous » de la circulaire frontière, il faut faire subir au patient au moins 2 actes CCAM (classification commune des actes médicaux) alors que, dans la très grande majorité des cas, les patients ayant besoin de l’éducation thérapeutique, n’ont pas besoin de ces deux actes », explique le Pr Hartemann. « Le rétinographe fait partie du bilan annuel des patients, mais il n’y a pas d’autres actes indispensables, sauf à sortir des règles des bonnes pratiques comme faire un Doppler des artères des jambes alors que les recommandations professionnelles ne préconisent cet acte que tous les cinq ans chez les patients à haut risque cardiovasculaire », souligne le Pr Hartemann.
Une solution est officiellement de faire financer l’activité d’éducation thérapeutique dans le cadre des MIGAC (Missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation). « Espérons que ce soit dans cette optique qu’on nous a demandé de déposer tous nos programmes d’éducation thérapeutique auprès de l’Agence régionale de santé (ARS) pour validation. En principe, ils devraient donc pouvoir être financés via les MIGAC. C’est ce qui se passe dans certains hôpitaux de province mais le problème est qu’à l’AP-HP, les budgets MIGAC n’apparaissent pas en tant que tels, et servent souvent de variable d’ajustement pour combler les déficits », indique le Pr Hartemann.
En attendant qu’une solution pérenne puisse être trouvée, les diabétologues sont, selon le Pr Hartemann, en difficulté pour mener une activité d’hôpital de jour. « Certains collègues ont reçu la visite des contrôleurs de la Sécurité sociale qui ont estimé qu’ils ne respectaient pas les critères de prise en charge en hôpital de jour. L’hôpital a été contraint de rembourser un certain nombre de séjours », explique le Pr Hartemann. « Pourtant, tout ce nous voulons, c’est pouvoir continuer de faire bénéficier aux patients diabétiques des compétences des équipes hospitalières en matière d’éducation thérapeutique. De nombreuses activités ambulatoires, comme la mise à l’insuline par exemple, ou le bilan des complications pour les patients en difficulté sociale, sont aussi des alternatives à l’hospitalisation conventionnelle. Si la sécurité sociale estime que cela ne justifie pas le coût d’un hôpital de jour, il est urgent que cette activité ambulatoire soit reconnue et financée à son juste prix. »
D’après un entretien avec le Pr Agnès Hartemann, chef du service de diabétologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.
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