PAR LE Pr BERNARD CHARBONNEL*
LA LOI HPST a inscrit l’ETP (l’éducation thérapeutique du patient) dans la loi, ce qui représente un vrai progrès. Le code de la santé publique a été ainsi modifié : l’article L. 1 161-1 stipule : « L’éducation thérapeutique s’inscrit dans le parcours de soins du patient. Elle a pour objectif de rendre le patient plus autonome en facilitant son adhésion aux traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie. Elle n’est pas opposable au malade et ne peut conditionner le taux de remboursement de ses actes et des médicaments afférents à sa maladie. »
L’article L. 1 161-3 stipule pour sa part : « Les actions d’accompagnement font partie de l’éducation thérapeutique. Elles ont pour objet d’apporter une assistance et un soutien aux malades, ou à leur entourage, dans la prise en charge de la maladie. Elles sont conformes à un cahier des charges national dont les modalités d’élaboration et le contenu sont définis par arrêté du ministre chargé de la santé. »
Ces questions sémantiques sont essentielles pour savoir de quoi on parle, ce qu’on va organiser, ce qu’on va financer, s’agissant de termes parfois assimilés les uns aux autres : éducation thérapeutique, accompagnement, observance, éducation pour la santé…
Dans le rapport « Pour une politique nationale de l’éducation thérapeutique », remis à la ministre pour préparer la rédaction de la loi, rapport rédigé par Christian Saout, Dominique Bertrand et Bernard Charbonnel, l’éducation thérapeutique stricto sensu était distinguée de l’accompagnement du malade. L’observance est un objectif que permet d’atteindre l’éducation thérapeutique – mais parmi d’autres objectifs – ainsi que les programmes d’accompagnement – parmi d’autres moyens.
La loi distingue l’éducation thérapeutique inscrite dans le parcours de soins de l’accompagnement, mais elle indique que ce dernier fait partie de l’éducation thérapeutique, ce qui introduit bien des confusions.
Se trouve en tout cas définie par la loi une éducation thérapeutique « à la française », qui est une éducation thérapeutique médicalisée, où les professionnels de santé jouent un rôle pivot. Les actions d’accompagnement (quels qu’en soient les opérateurs : assurance-maladie, complémentaires de santé, associations de patients, etc.) peuvent avoir des points communs avec les programmes d’éducation thérapeutique, ou venir les prolonger, mais elles peuvent aussi s’en distinguer et ne font pas nécessairement partie du parcours de soins. Elles feront l’objet d’une réglementation spécifique, avec un cahier des charges spécifique, pour la rédaction duquel Christian Saout, Dominique Bertrand et Bernard Charbonnel viennent de rédiger pour la ministre un rapport complémentaire.
La gouvernance de l’ETP par les ARS.
Dans la logique de la loi HPST, et parce qu’elles sont plus proches des réalités territoriales, ce sont les ARS qui sont chargées par la loi d’autoriser les programmes d’ETP.
« Art.L. 1 161-2. - Les programmes d’éducation thérapeutique du patient sont conformes à un cahier des charges national dont les modalités d’élaboration et le contenu sont définis par arrêté du ministre chargé de la santé. Ces programmes sont mis en œuvre au niveau local, après autorisation des Agences régionales de santé. Ils sont proposés au malade par le médecin prescripteur et donnent lieu à l’élaboration d’un programme personnalisé. Ces programmes sont évalués par la Haute Autorité de santé. »
« Art.L. 1 162-1. - Est puni de 30 000 € d’amende le fait de mettre en œuvre un programme sans une autorisation. » Le cahier des charges national a été publié dans le cadre des décrets d’application de la loi au début du mois d’août 2010 et les procédures d’autorisation des programmes par les ARS sont actuellement en cours. Chaque ARS a défini sa procédure, schématiquement adresser à la cellule ad hoc de l’ARS d’ici la fin 2010 un dossier de demande d’autorisation reprenant les principaux éléments du cahier des charges national, y compris décrire quelles seront les méthodes d’évaluation du programme. De ce point de vue, l’HAS, qui est chargée par la loi de l’évaluation, vient de publier un guide de l’évaluation des programmes d’éducation thérapeutique qui est consultable sur son site.
Le financement de l’ETP.
Les choses restent, à vrai dire, à définir dans ce domaine et on y verra plus clair courant 2011.
Un rapport parlementaire, celui du député Denis Jacquat, a été remis au premier ministre en juin 2010 et fait différentes propositions de financement, en insistant sur le fait que celui-ci doit être pris sur le risque et non sur la prévention, et en proposant un paiement à l’activité (T2A dans les hôpitaux et forfaits en ville).
En attendant, si rien n’est pérenne pour l’éducation thérapeutique en ville, le support réglementaire du financement pour l’éducation thérapeutique dans les établissements hospitaliers demeure la MIG (Mission d’Intérêt Général) ETP, du moins pour les activités d’éducation thérapeutique effectuées en externe dans les établissements hospitaliers, laquelle MIG ETP n’est pas compatible avec une cotation en hôpital de jour, depuis « la circulaire frontière ». Cette MIG ETP est loin d’être négligeable du point de vue financier puisqu’elle a représenté, au plan national, plus de 66 millions d’euros en 2006 et sans doute un peu plus depuis.
À la question légitime de ceux (industriels ou acteurs de santé) qui s’interrogent sur le rôle que pourrait avoir l’industrie dans ce nouveau dispositif, la question est ouverte mais ce rôle, extrêmement réglementé, sera sans doute limité, compte tenu du dernier paragraphe de l’article L. 1 161-1 : « Tout contact direct entre un malade et son entourage et une entreprise se livrant à l’exploitation d’un médicament ou une personne responsable de la mise sur le marché d’un dispositif médical ou d’un dispositif médical de diagnostic in vitro est interdit. »
*CHU de Nantes.
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