Au grand désespoir des familles des victimes, la cour d’appel de Paris a confirmé le 5 mai la relaxe de Fernand Dray et Élisabeth Mugnier, les deux derniers mis en cause dans le drame de l’hormone de croissance contaminée, après la relaxe générale en première instance. « Aucune faute n’a été commise par les prévenus », a estimé la cour, qui n’a retenu ni l’homicide involontaire, ni la tromperie aggravée. Elle a également écarté, contrairement au premier jugement, en janvier 2009, toute faute civile et donc toute réparation financière.
Dans les années 1983-1985, à la suite de l’utilisation d’hypophyses prélevées sur des cadavres, 1 698 enfants avaient reçu de l’hormone de croissance contaminée par le prion de la maladie de Creutzfeldt-Jakob et 120 en sont morts à ce jour. Il était reproché à Fernand Dray, biochimiste, alors chef de l’unité de recherche en immuno-analyse de l’Institut Pasteur, des négligences dans l’extraction et la purification de l’hormone, alors que, selon l’accusation, il connaissait le risque de transmission de la MCJ. Ce n’est pas ce qu’a conclu la cour d’appel, selon laquelle « il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir eu l’intuition d’un risque de contamination qu’aucun professionnel évoluant dans ce secteur d’activité n’avait perçu à l’époque ». Le Dr Élisabeth Mugnier, pédiatre responsable de la collecte dans les morgues des hôpitaux, était accusée de n’avoir pas éliminé les hypophyses douteuses. « Elle n’avait aucun pouvoir de s’immiscer dans la gestion » de la collecte, qui était supervisée par l’association France-Hypophyse, et la « responsabilité de s’assurer que les prélèvements étaient effectués conformément aux règles sanitaires » ne lui incombait pas, a estimé le tribunal.
Spécificité des affaires de santé.
À la lecture du jugement, les familles des victimes ont exprimé leur colère et leur tristesse ; une cellule psychologique avait été mise en place à leur intention. « C’est une page noire de la justice », a lancé Jeanne Goerrian, présidente de l’Association des victimes de l’hormone de croissance (AVHC), qui a perdu son fils. « Par une sorte de bonneteau judiciaire, il n’y a aucune responsabilité », a commenté Me Francis Szpiner, l’avocat de l’association. Et d’accuser : « Dans les procès où il y a une très forte implication de l’État, il y a immunité de l’État et de ceux qui le servent. » Pour Me Olivier Metzner, l’avocat du Dr Mugnier, au contraire, « c’est la victoire de la vérité ». « Nous sommes en droit pénal, voie choisie par les victimes, peut-être à tort. Ce n’est pas à la justice pénale de gérer ce genre d’affaires médicales et de santé », a-t-il estimé.
Alors que le dossier a été ouvert il y a près de vingt ans, François Honnorat, qui plaidait pour des parties civiles, incrimine quant à lui la longueur de la procédure, avec le décès de plusieurs personnes mises en cause. L’avocat, également engagé dans l’affaire du Mediator, explique que c’est la raison pour laquelle les défenseurs des victimes ont choisi dans ce cas une procédure rapide de citations directes. Quand les pratiques judiciaires s’adapteront-elles à ces scandales sanitaires, demande-t-il ?
L’affaire n’est cependant pas complètement finie, puisque plusieurs victimes souhaitent se pourvoir en cassation. Emmanuel Ludot, avocat d’une partie civile, a de son côté annoncé son intention d’attaquer l’État devant le tribunal administratif pour faute lourde*.
* « L’Union - L’Ardennais », 6 mai.
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