VINGT ANS après le décès des premières victimes françaises de l’hormone de croissance, contaminées par la maladie de Creutzfeldt-Jacob (MCJ), et après cinq mois de réflexion, la cour d’appel de Paris dira ce jeudi s’il existe des responsabilités dans ce drame de santé publique. En première instance, en 2008, le tribunal avait prononcé une relaxe générale, jugement qui avait provoqué l’incompréhension et la révolte des proches des victimes. Le parquet avait fait appel dans trois cas et, après le décès de Marc Mollet, seuls ont comparus devant la cour d’appel de Paris, en octobre et novembre dernier, Fernand Dray, 88 ans, ancien responsable d’un laboratoire de l’Institut Pasteur, et Elisabeth Mugnier, 62 ans, pédiatre à la retraite, accusés de tromperie aggravée pour l’un, de complicité pour l’autre et d’homicide involontaire pour les deux.
« Ce n’est pas le procès de la médecine ou de la science mais de certains acteurs essentiels d’un système de soin inédit qui a été une page noire pour la France », a estimé lors du procès l’avocat général. Selon lui Fernand Dray n’était pas un exécutant mais un décideur et il « connaissait le risque de transmission » de la MCJ. Quant à Élisabeth Mugnier, il l’a accusée d’avoir « participé à cette course à l’hypophyse avec comme souci le rendement quantitatif », au mépris des règles de sécurité. Bruno Sturlese avait aussi appelé la cour à envoyer un « signal clair et dissuasif » en matière d’affaires de santé publique, « un champ qui a sans doute trop échappé à la réglementation de la justice ».
Les avocats de la défense ont pour leur part notamment insisté sur les incertitudes scientifiques de l’époque. L’Américain Stanley Prusiner, prix Nobel de médecine pour la découverte du prion, est venu en témoigner. Après les débats du premier procès, il a souhaité, a-t-il expliqué, « en savoir plus sur les liens entre l’hormone de croissance et le prion ». « Ce que j’ai appris montre à mon sens combien nous en savions peu et combien la communauté scientifique était ignorante (...) Personne ne pensait que l’hormone de croissance pouvait poser problème. » Mais le Pr Hubert Montagnier, autre prix Nobel, codécouvreur du VIH, a rappelé qu’il avait en 1980 rédigé une note d’alerte et estimé que s’«il n’y a pas de risque zéro en médecine, on aurait pu diminuer fortement le risque ».
Dans les années 1980, 1 698 enfants ont reçu des traitements à risques et, à ce jour, 120 en sont morts.
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