Avec pas moins de 30 référentiels dans le monde, dont 15 en Europe et une publication en France datant de 10 ans, « il était indispensable d'actualiser et d'harmoniser les recommandations sur le testing des gènes BRCA1/2 », explique le Pr Pascal Pujol, président de la Société française de médecine prédictive et personnalisée.
Les mutations des gènes BRCA1/2 représentent la très grande majorité des prédispositions familiales aujourd'hui identifiables au cancer du sein (90 %). Mais ces mutations ne sont pas que germinales, elles peuvent être tumorales, uniquement présentes dans les cellules cancéreuses. « Dans un cas sur deux des cancers avec mutation, il n'existe pas d'indications de test sur le critère familial, rapporte l'oncogénéticien au CHRU de Montpellier. Aujourd'hui, ne pas prescrire le test dans certaines situations familiales ou thérapeutiques constitue une perte de chance potentielle ».
L'arrivée des inhibiteurs de PARP a en effet changé la donne. Ce traitement de médecine personnalisée, qui est validé dans plusieurs indications depuis quatre ans, a fortement augmenté l'éligibilité du testing pour les cancers associés à BRCA, à un stade précoce ou avancé, tels que les cancers de l'ovaire, du sein, de la prostate et du pancréas. Le point fort des recommandations est ainsi de proposer dans certaines situations le testing BRCA indépendamment de l'histoire familiale.
C'est à l'initiative de la société savante française qu'ont été lancées ces premières recommandations européennes, publiées dans la revue « European Journal of Cancer ». Quelque 48 experts multidisciplinaires de neuf pays (Belgique, Angleterre, France, Allemagne, Italie, Israël, Écosse, Espagne et Suisse) ont participé à leur élaboration. Deux groupes ont été constitués, l'un pour le préventif, l'autre pour la thérapeutique, rassemblant des généticiens, des oncologues, des spécialistes d'organe, des chirurgiens, des anatomopathologistes, des représentants de patients, des éthiciens, des psychologues et des juristes.
Un tableau synthétique résume les indications fortes de testing (grade A), qu'elles soient à visée préventive ou thérapeutique :
- critères individuels du cancer du sein : survenue ≤ l'âge de 40 ans ; survenue ≤ l'âge de 50 ans en cas de bilatéralité (c'est-à-dire au moins un diagnostiqué ≤ l'âge de 50 ans) ou en cas de prédisposition ethnique (populations ashkénazes ou islandaises) ; survenue ≤ l'âge de 60 ans pour le type triple négatif ; chez un homme.
- antécédent familial : cancer du sein chez deux parents au premier degré ; cancer du sein chez un parent au premier degré avec l'un des critères individuels cités plus haut ; un apparenté porteur connu d'une mutation BRCA.
- cancer de l'ovaire épithélial ; cancer du sein métastatique hormonorésistant ou triple négatif ; cancer de la prostate métastatique hormonorésistant ; cancer du pancréas métastatique sensible aux sels de platine.
« L'originalité de ce travail a été de se fonder sur les preuves, souligne le Pr Pujol. La probabilité de mutation a été calculée pour chaque paramètre d'après les données disponibles. Cela a été un énorme travail de bibliographie avec plus de 500 références. La probabilité d'être porteur d’une mutation est située pour chaque paramètre entre 2,5 et 7,5 %, 5 % correspondant à un risque intermédiaire. Cela permet d'avoir un référentiel commun solide, car jusque-là chacun décidait en fonction de différents abaques, pas toujours très précis ».
Ce travail a ainsi permis d'identifier des situations pour lesquelles l'indication
de testing est indiscutable mais aussi d'autres pour lesquelles le risque modéré (grade B) requiert un avis spécialisé. « L'objectif est d'ouvrir dans certains cas la prescription de testing aux oncologues et aux médecins associés, explique le Pr Pujol. Avec 30 000 nouvelles indications prévisibles par an en France, les consultations d'oncogénétique ne vont pas pouvoir absorber l'afflux des patients. Avec le tableau synthétique proposé, les médecins peuvent voir en un clin d'œil si leur patient est éligible ou pas au testing et l'adresser à un oncogénéticien le cas échéant ».
P. Pujol et al, European Journal of Cancer, 2021. doi.org.10.1016/j.ejca.2020.12.023
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