LES SERMS (Selective Oestrogen Receptor Modulators) dont il existe 4 représentants de la classe (tamoxifène, raloxifène, lasofoxifène et arzoxifène) réduisent significativement le risque de cancer du sein dans une population traitée à risque élevé ou modéré, et ne présentant pas la maladie. Ce bénéfice est essentiellement tiré par la diminution de l’incidence des cancers du sein positif pour la présence des récepteurs d’estrogènes (ER +). C’est la conclusion d’une métaanalyse publiée dans la dernière édition du Lancet qui pour la première fois associe des études au long cours concernant les Serms plus anciens, tamoxifène et raloxifène, et des essais plus courts concernant les deux derniers, lasoxifène et arzoxifène. Bien qu’ils présentent une structure chimique différente, tous agissent sur le récepteur estrogène et inhibent la division cellulaire. Une étude antérieure avait d’ailleurs déjà spécifié un effet préventif du tamoxifène sur les cancers ER + mais sur un suivi à court terme.
Ce nouveau travail collectif conduit par Jack Cuzick (Londres) réunit 9 essais soit 83 399 femmes suivies en moyenne 65 mois (IQR : 54-93), soit un total de 306 617 patients-années. La diminution de l’incidence de tous les cancers du sein est de 38 % (p‹0,0001) soit une incidence cumulée sur 10 ans de 6,3 % pour le placebo contre 4,2 % pour les Serms. La réduction concerne les deux périodes de suivi : entre 0 et 5 ans, elle est de 42 % (p‹0,001) et entre 5 et 10 ans de 25 % (p= 0,007).
La fréquence des cancers ER + invasifs est réduite de 4 % à 2,1 % (p‹0,0001) chez les femmes traitées par Serms par rapport au placebo, que ce soit pendant les 5 premières années (p‹0,0001) ou sur la période 5-10 ans (p‹0,0001). Le bénéfice est noté dans tous les essais mais de façon très hétérogène puisqu’il est particulièrement net dans l’étude PEARL 0,5 mg qui a randomisé lasofoxifène 0,5 mg contre placebo. Les auteurs n’observent pas d’augmentation des cancers ER négatif. L’incidence des carcinomes canalaires est significativement réduite de 31 % (p0,006).
Les résultats sont similaires pour les deux principaux Serms, tamoxifène et raloxifène (qui n’ont pas les mêmes indications en France puisque seul le raloxifène est indiqué dans le risque fracturaire post-ménopause) hormis les carcinomes intracanalaires sur lesquels l’effet du tamoxifène s’avère supérieur.
Pas d’augmentation des tumeurs ER -.
Cependant, on observe globalement une incidence plus élevée des cancers de l’endomètre avec les Serms par rapport au placebo (p =0,007), l’augmentation étant limitée aux 5 premières années de traitement puisqu’elle disparaît entre 5 et 10 années de suivi et semble limité pour les essais réalisés avec le tamoxifène. Les événements thombo-emboliques veineux sont aussi significativement augmentés chez les femmes recevant un Serm ; les risques relatifs sont semblables dans les groupes tamoxifène (1,60, p = 0,001) et raloxifène (1,45, p‹0,0001).
« Notre essai montre clairement que les SERMs réduisent significativement le risque de cancer du sein chez des femmes considérées à risque modéré ou élevé, précisent les auteurs, les bénéfices s’observent durant la phase active du traitement et perdurent après l’arrêt. La non-augmentation des tumeurs ER- peut être le fruit du hasard ou liée à un effet biologique. Il est possible que pour certaines d’entre elles qui auraient pu se révéler ER + en l’absence de SERM, le traitement ait retardé leur développement et induit une résistance endocrine".
Le cas du lasofoxifène.
L’importance des données de suivi à 10 ans démontre clairement le bénéfice de ces traitements. Celui du lasofoxifène dosé à 0,5 mg/j est un candidat très intéressant puisque ses bénéfices s’étendent à d’autres pathologies, en particulier à celles d’origine cardiovasculaire : AVC (-36 %), coronaropathies (- 32 %), fractures vertébrales (- 42 %) sans augmentation de l’incidence des cancers de l’endomètre. " Le lasofoxiène, très prometteur, explique Antony Howell (Manchester, Royaume-Uni) dans un commentaire associé, a été approuvé par les instances européennes mais pas par la Food and Drug Administration et ne sera pas commercialisé aux États-Unis pour des raisons encore un peu mystérieuses ".
« Malheureusement, aucun des ces produits ne bénéficie à ce jour d’indication en prévention et cette autorisation ne sera probablement pas recherché pour ni le lasofoxifène ni pour l’arzoxifène même si notre étude penche en faveur d’un bénéfice au long cours ».
Enfin, remarque l’éditorialiste, aucun effet n’est démontré sur la mortalité totale ou celle liée au cancer du sein.
Cuzick J. et coll. publié en ligne le 30 avril, http://dx.doi.org/10.1016
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