Qu'en est-il du risque cardiovasculaire à distance de l'infection Covid ? Une large étude américaine menée d'après la cohorte nationale des vétérans apporte un éclairage préoccupant au-delà des 30 jours dans l'année qui suit l'infection. Le risque de développer une maladie cardiovasculaire est augmenté de 55 %, rapporte l'étude publiée dans « Nature Medicine ».
Accident vasculaire cérébral (AVC), arythmies, myocardites et péricardites, insuffisance cardiaque, choc cardiogénique et arrêt cardiaque, embolie pulmonaire, thrombose veineuse profonde, les complications à long terme au-delà des 30 jours post-Covid sont très variées.
Constat le plus frappant, le risque est augmenté quelle que soit la gravité de l'infection, y compris pour les patients n'ayant pas été hospitalisés pour Covid et ceux ayant un risque cardiovasculaire faible, même s'il l'est davantage de façon graduelle selon le contexte de soins (pas d'hospitalisation, hospitalisation, admission en soins intensifs).
Un surrisque peu identifié au-delà du court terme
Les complications cardiovasculaires liées au Covid ont été décrites au décours immédiat de l'infection. Dès la première vague, les cardiologues ont rapporté une décompensation de maladie cardiaque préexistante, mais aussi des complications inhabituelles (thromboses coronaires et cérébrales, embolies pulmonaires), ainsi que des myocardites et d'arythmies. Mais jusqu'à présent, le risque à plus long terme restait peu connu.
Ici, l'équipe coordonnée par Ziyad Al-Aly de l'Institut de santé publique à Saint-Louis s'est basée sur une cohorte de 153 760 personnes testées positives pour le Covid-19 entre mars 2020 et janvier 2021 et donc très peu vaccinées, qu'ils ont comparée à deux autres contrôles totalisant chacune plus de 5,6 millions d'individus (précisément 5 637 647 pour une cohorte contemporaine de sujets sains et 5 859 411 pour une cohorte historique en 2018).
Pour ce travail, les chercheurs ont raisonné à la fois en risque relatif et en valeur absolue, ce deuxième paramètre reflétant l'impact dans la population. Ainsi, si le risque de myocardite est multiplié par plus de 6, l'excès de personnes atteintes pour 1 000 est de 0,31. À l'inverse, pour l'insuffisance cardiaque, le risque est augmenté de 70 % (RR : 1,72), mais l'excès s'élève à 11,61 pour 1 000. De même la fibrillation atriale, dont le risque est augmenté de 71 %, touche 10,74 personnes supplémentaires pour 1 000. Le risque est plus que doublé pour le choc cardiogénique, l'arrêt cardiaque, la thrombose veineuse profonde, voire triplé pour l'embolie pulmonaire.
Même en l'absence de facteurs de risque
« Les risques étaient manifestes, quels que soient l'âge, l'ethnie, le sexe et d'autres facteurs de risque cardiovasculaires, incluant l'obésité, l'hypertension, le diabète, l'insuffisance rénale chronique et l'hyperlipidémie », soulignent les auteurs. Le phénomène concerne aussi « les sujets à faible risque de maladie cardiovasculaire », même si c'est dans des proportions moindres. De plus, il existe même en contexte d'infection aiguë bénigne sans hospitalisation, soit « la majorité des personnes avec le Covid-19 », est-il souligné.
Les mécanismes sous-jacents à l'œuvre dans la phase post-aiguë « ne sont pas entièrement clairs », est-il rapporté. Invasion virale directe, endothélite, altération transcriptionnelle de multiples types de cellules du tissu cardiaque, activation du complément, dysfonction du système nerveux autonome ou encore niveaux élevés de cytokines pro-inflammatoires sont autant de pistes proposées. « Une réponse immunitaire persistante hyperactivée, une auto-immunité ou la persistance du virus dans des sites immunitaires privilégiés ont également été citées comme des explications possibles de séquelles post-aiguës extrapulmonaires », ajoutent les auteurs.
Les systèmes de soins doivent se tenir prêts
Ces résultats incitent à poursuivre la prévention primaire des infections à Sars-CoV-2, « la meilleure façon d'empêcher le Covid long et sa myriade de complications, incluant le risque de séquelles cardiovasculaires sévères », rappellent les auteurs. Et d'alerter sur le fait que ces résultats rapportés « pourraient se traduire par un grand nombre de personnes potentiellement affectées à travers le monde ». Les gouvernements et les systèmes de soins devraient se préparer à y faire face, estiment-ils. « Les défis posés par le Covid long vont requérir une réponse stratégique de long terme, urgente, coordonnée et fortement demandée, mais jusque-là faisant défaut », écrivent les auteurs.
Pour autant, ils n'excluent pas qu'au fur et à mesure de la dynamique épidémique, de l'apparition de nouveaux variants, des progrès thérapeutiques et de la couverture vaccinale, « l'épidémiologie des manifestations cardiovasculaires de Covid-19 puisse aussi changer au fil du temps ».
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