Des chercheurs américains sont parvenus à protéger des singes adultes contre la tuberculose pulmonaire en utilisant la voie intraveineuse pour injecter de fortes doses de BCG. S'ils se confirmaient chez l'homme adulte, ces résultats publiés dans « Nature » permettraient de combler un angle mort de ce vaccin emblématique.
En effet, environ 80 % des enfants dans le monde reçoivent le bacille de Calmette-Guérin (BCG) par voie intradermique à la naissance, et sont ainsi protégés contre les formes graves de tuberculoses infantiles, principalement extra-pulmonaires. À l'âge adulte, les choses se compliquent puisque 85 % des tuberculoses sont pulmonaires, et l'efficacité du vaccin est plus aléatoire.
« Il y a eu un très grand nombre d'études sur le sujet, avec des efficacités qui vont de 0 à 80 % », explique Camille Locht, directeur de recherche INSERM et du centre d’infection et d’immunité de Lille rattaché à l'Institut Pasteur de Lille. De tels écarts sont encore mal expliqués. Toujours est-il que plusieurs types de recherche ont lieu pour résoudre le problème de l'immunisation des adultes : via la modification des souches de BCG, ou une modification de leur mode d'administration, ou encore la recherche de nouveaux vaccins. C'est dans ce cadre que s'inscrit la nouvelle publication de « Nature ».
9 singes sur 10 protégés
Les chercheurs des Instituts nationaux américains de la santé (NIH) ont évalué 3 modes d'inoculation : intradermique, intraveineuse et en aérosol. De hautes doses ont été employées : 5x107 unités formant colonies (UFC). Les auteurs ont également évalué des combinaisons des différentes voies d'administration.
Au bout de 6 mois après leur vaccination, les macaques ont été exposés à une infection par une souche de Mycobacterium tuberculosis directement déposée dans les lobes pulmonaires. Sur les 10 animaux vaccinés par voie intraveineuse, 9 étaient efficacement protégés (absence de lésion au PET-TDM), dont 6 sans réplication bactérienne au lavage broncho-alvéolaire. Une prolifération bactérienne de faible ampleur a été mesurée chez 3 autres. En revanche, tous les singes vaccinés par voie aérosol, intradermique ou mixte ont été victimes d'une infection sévère.
« Cela fait 50 ans que l'on sait qu'en augmentant les doses par voie intraveineuse, on obtient de meilleurs résultats d'efficacité chez les singes, rappelle Camille Locht. Ce qui est nouveau dans ce travail, c'est que les auteurs ont pu analyser les mécanismes immunitaires les plus protecteurs. »
Avec la voie intraveineuse, les auteurs ont en effet constaté un plus fort recrutement des lymphocytes T résidants dans le parenchyme pulmonaire. Ces derniers participent à la protection locale. « Ils sont intéressants car ils ont une mémoire et une très longue durée de vie », précise Camille Locht.
Une piste pour de futurs vaccins
S'il ne croit pas à l'utilisation du BCG en intraveineuse à haute dose, Camille Locht estime que l'étude parue dans « Nature » est importante pour ce qu'elle nous apprend de la nature de la réponse immunitaire capable de protéger contre la tuberculose pulmonaire.
« Même si les auteurs concluent que l'utilisation du BCG par voie intraveineuse est une stratégie prometteuse chez l'homme, explique-t-il, je pense que la question de la sécurité risque de dissuader les agences de régulation de pratiquer une vaccination de masse par l'injection intraveineuse de hautes doses de BCG chez l'homme. »
Patricia Darrah, Nature, 577, 95, janvier 2020
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