Le burn out tue. Le syndrome d’épuisement professionnel menace l’ensemble des professionnels de santé.
Charge de travail excessive,travail administratif envahissant, patients trop exigeants, sentiment de n’être pas reconnu à sa juste valeur sont les principaux déclencheurs du burn out. Ils amènent le praticien à subir des troubles émotionnels et psychologiques, un épuisement et une perte de motivation qui peut déboucher sur la maladie (hypertension, alcoolisme, insomnies). Parfois, le pire survient. Une anesthésiste de Châteauroux s’est donné la mort en mars dernier, dans sa chambre de garde, au lendemain d’une nuit de travail.
Les médecins sont davantage touchés que la population générale par le suicide. Plusieurs études ont été menées sur le sujet ces dernières années mais leur réalisation se heurte à un obstacle majeur : la difficulté de recueillir des données. Le motif de « suicide » pouvant, selon les contrats d’assurance-décès, pénaliser les familles, leur nombre serait vraisemblablement sous évalué. L’étude la plus souvent citée par les autorités et les syndicats de médecins a été réalisée il y a dix ans par l’Ordre du Vaucluse. Selon ce travail, 14 % des décès chez les soignants seraient dus au suicide, contre 6 % dans la population. Le phénomène a pris une ampleur considérable ; chaque année, 45 médecins se suicident.
Un groupe de travail ministériel
Les initiatives gouvernementales pour endiguer cette « épidémie » peinent à voir le jour. « Le suicide des professionnels de santé continue de frapper dans le silence général », clame le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France (FMF), qui a récemment dénoncé « l’indifférence » du ministère de la Santé. L’Union française pour une médecine libre (UFML) a organisé une « journée noire » le 18 février dernier, pour sensibiliser aux risques de burn out et de suicide chez les médecins. Les alertes lancées par les médecins portent leurs fruits. Le mois dernier, le ministère du Travail a mis en place un groupe de travail sur la question.
Longtemps, le sujet a été tabou mais les langues se délient et les professionnels sont de plus en plus sensibilisés à cette problématique. Plusieurs lignes téléphoniques d’écoute et de soutien ont vu le jour dans le but d’aider les praticiens en souffrance (voir ci-contre). En région Centre, l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) des médecins libéraux organise des réunions de prévention qui rencontrent un vrai succès. L’Union du Centre a réalisé début 2013 une enquête auprès des 2 086 généralistes de la région, comportant huit thèmes à classer en fonction des priorités ressenties. Le thème « prévenir l’épuisement professionnel » a été placé en tête par 35,5 % des médecins de famille, loin devant « amélioration de l’organisation du cabinet médical » (15,8 %). Ces demandes émanaient prioritairement de femmes jeunes et de praticiens exerçant en groupe, preuve que ce type d’exercice ne protège pas du burn out. « Les médecins sont isolés et peu enclins à se plaindre, indique le Dr Martine Darchy-Gilliard, secrétaire générale adjointe de l’URPS. Dans leur esprit, leur rôle est de recevoir les doléances, pas de les émettre. Ils se sentent coupables d’aller mal ».
La prévention en mot d’ordre
Face à cette forte demande, l’URPS a organisé dans chaque département des réunions de prévention, animées par un médecin spécialiste des risques psychosociaux, le Dr Isabelle Sauvegrain, et un psychiatre, le Dr Pascal Rouby. Lors de ces rencontres, les spécialistes mettent l’accent sur la prévention du burn out (repérer les signaux d’alerte, comme la fatigue physique et intellectuelle, le sentiment de perte de contrôle) et les solutions (apprendre à dire non, s’accorder des temps de repos, se donner moins d’exigences professionnelles). « Les médecins doivent appliquer à eux-mêmes ce qu’ils préconisent à leurs patients », juge Isabelle Sauvegrain. D’autres réunions vont être organisées prochainement pour les spécialistes. Point d’orgue de cette mobilisation, l’URPS du Centre organise à Orléans le 17 mai prochain une journée entièrement consacrée au burn out à laquelle participeront des experts comme le Pr Éric Galam, coordonnateur de l’AAPML (Association d’aide professionnelle aux médecins libéraux). Une nouvelle occasion de sensibiliser médecins, patients et pouvoirs publics à ce phénomène.
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