Bons résultats chez le rat, des pespectives chez l’homme

Deux thérapies géniques contre l’épilepsie réfractaire

Publié le 21/11/2012
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DE NOTRE CORRESPONDANTE

L’ÉPILEPSIE affecte 1 % de la population, et plus de 20 % des patients épileptiques ne répondent pas au traitement médicamenteux optimal. Seule une minorité d’entre eux sont candidats a la chirurgie, ce qui souligne le besoin crucial de nouvelles options thérapeutiques.

Une équipe britannique a développé deux approches de thérapies géniques qui se montrent efficaces dans un modèle rongeur d’épilepsie néocorticale réfractaire. Dans ce modèle, l’épilepsie est induite chez le rat par injection de la toxine tétanique dans le cortex moteur.

Wykes et coll. ont utilisé, pour ces deux approches, un lentivirus afin d’exprimer un gène thérapeutique dans un petit nombre de neurones cérébraux dans la zone épileptogène. Ils ont aussi développé une nouvelle technologie sans fil pour surveiller et détecter les crises épileptiques, en utilisant un minitransmetteur implanté et des algorithmes. Ils ont ainsi constaté dans les neurones pyramidaux du foyer épileptique, une excitabilité intrinsèque accrue.

Arrêt des crises sur demande.

Pour supprimer de façon aiguë les crises épileptiques, ils ont injecté dans la zone épileptogène un lentivirus exprimant l’halorhodopsine, dont la fonction de canal transporteur de chlore est activée par la lumière. Lorsqu’une lumière laser est délivrée par une fibre optique à cette région, activant ainsi l’halorhodopsine, les chercheurs ont pu constater une atténuation des crises électroencéphalographiques. Le succès de cette approche « optogénétique » suggère qu’un dispositif pourrait être développé pour détecter et arrêter les crises « sur demande », semblable a un défibrillateur implantable pour les troubles du rythme cardiaque.

Afin de supprimer à long-terme l’épilepsie, les chercheurs ont surexprimé un canal potassium cérébral (Kv1.1) qui régule normalement l’excitabilité neuronale et la libération du neurotransmetteur. Cette thérapie génique prévient efficacement le développement de l’épilepsie dans le modèle rat. De plus, si elle est administrée après l’établissement de l’état épileptique, elle réduit progressivement la fréquence des crises jusqu’à leur arrêt après quelques semaines.

Les deux thérapies géniques n’interfèrent pas avec le comportement normal, probablement en raison du petit nombre de neurones ciblés.

« La surexpression du canal potassium par thérapie génique devrait être l’approche la plus facile a introduire en clinique pour traiter l’épilepsie. Le vecteur lentiviral a montré sa sécurité chez les humains. Cette approche rendrait la zone moins excitable (" en la calmant ") et arrêterait ainsi les crises », précise au « Quotidien » le Pr Matthew Walker (University College of London).

Des essais chez l’homme dans cinq ans.

« L’autre approche requiert plus de travail pour être introduite en clinique car le canal lumineux n’est pas exprimé normalement dans le cerveau, et elle comporte une diode électroluminescente implantable et un dispositif qui pourrait détecter les crises de façon fiable. »

« Il nous faut maintenant optimiser la méthode du canal potassium, l’évaluer avec d’autres vecteurs viraux et d’autres modèles d’épilepsie, et conduire plus de tests d’innocuité. Nous pensons que des essais cliniques pourraient débuter dans les cinq prochaines années. Ils seraient initialement menés chez des patients souffrant des formes les plus sévères d’épilepsie, candidats à la neurochirurgie. »

Science Translational Medicine, 21 novembre 2012, Wykes et coll.

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9193