« CE TRAVAIL a deux implications. Ce modèle nous permettra d’étudier la progression de la maladie en temps réel d’une façon qui n’est pas possible in vivo. Et il nous permettra de tester des théories sur la pathogenèse et la progression de la maladie », explique au « Quotidien » le Dr Frederick Livesey (University of Cambridge, Royaume-Uni) qui a dirigé ce travail. « Nos deux prochains objectifs seront d’utiliser ce système pour dépister de nouvelles molécules modifiant potentiellement la maladie, et pour voir si l’on peut également créer in vitro la forme sporadique tardive de la maladie d’Alzheimer. »
Une difficulté pour développer des traitements efficaces pour la maladie d’Alzheimer vient de ce que l’étiologie et la pathogenèse de la forme sporadique ne sont pas bien comprises. Sa pathologie est caractérisée par des plaques amyloïdes composées d’amyloide-bêta (Abeta), et des enchevêtrements neurofibrillaires intracellulaires composés de formes hyperphosphorylées de la protéine tau associée aux microtubules. Le processus pathologique et la contribution relative des peptides Abeta et de tau font l’objet d’un débat. Les arguments en faveur d’un rôle causal de l’Abêta viennent des études de la forme familiale d’Alzheimer, qui est causée par des mutations de l’APP ou de l’enzyme traitant l’APP ; à l’opposé, des mutations de la protéine tau aboutissent à d’autres troubles neurodégénératifs tels que la démence frontotemporale.
Trois copies du gène de l’APP.
Les modèles animaux ont été utiles, certes, mais de façon limitée car ils ne reproduisent pas tous les aspects clé de la maladie, et seule la souris triple transgénique exprimant les formes mutées humaines de l’APP, de la préséniline et de tau, présente la pathologie combinée des plaques et de tau dans le cerveau.
Shi, Livesey et coll. ont développé - c’est la nouvelle étude - un modèle cellulaire humain de la maladie d’Alzheimer. Ils ont utilisé des cellules souches de sujets atteints de trisomie 21. Ces sujets, on le sait, ont un très grand risque de développer précocement la maladie d’Alzheimer (avec des plaques cérébrales parfois dès l’âge de 10 ans), ce qui est attribué en partie à la présence des 3 copies du gène de l’APP sur le chromosome 21. D’autres gènes sur le chromosome 21 pourraient également jouer un rôle, comme le gène encodant la kinase Dyrk1A qui phosphoryle tau.
Les chercheurs ont utilisé des cellules souches pluripotentes induites (sPI) dérivées de sujets atteints de trisomie 21, ainsi que des cellules souches embryonnaires (CSE) de sujets trisomiques 21 ; ils ont amenées ces cellules souches à se différencier en neurones corticaux.
La pathologie caractéristique en quelques mois.
L’approche est un succès. Les neurones corticaux générés à partir des cellules sPI de sujets atteints de trisomie 21 ou à partir de leurs CSE, développent la pathologie caractéristique sur une période de quelques mois in vitro, au lieu de plusieurs décennies in vivo. Ces neurones produisent, à partir de l’APP, le peptide pathogène Abeta42 qui forme des agrégats intracellulaires et extracellulaires insolubles. La production des peptides Abeta est inhibée par un inhibiteur de la gamma-sécrétase. Enfin, la protéine tau hyperphosphorylée est trouvée dans les corps cellulaires des neurones et leurs dendrites, ce qui récapitule les stades plus tardifs du processus pathogène de la maladie d’Alzheimer.
Shi et coll. Science Translational Medicine, 15 février 2012.
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