Alors qu'à ce jour, il n'existe aucun traitement neuroprotecteur dans la maladie de Parkinson, la piste de la lumière proche infrarouge (neuro-illumination) est étudiée par Clinatec, centre de recherche biomédicale Edmond J. Safra* (Grenoble), pour empêcher la dégénérescence des neurones dopaminergiques. Dans le cadre de l'essai clinique du projet NIR (Near Infra Red), une première patiente a été opérée en mars dernier.
« Nous avons pu financer les étapes précliniques grâce au mécénat et apporter la preuve de concept du potentiel de cette approche », indique Thierry Bosc, directeur du Fonds de dotation Clinatec (structure juridique indépendante destinée à recueillir des fonds pour Clinatec). En particulier, les résultats encourageants d'un essai mené dans un modèle de singes rendus parkinsoniens, paru en 2016 dans « Annals of Neurology », ont permis d'envisager l'évaluation de la neuro-illumination, aussi appelée photobiomodulation, chez l'homme.
Treize autres patients opérés dès septembre
Au-delà du CHU Grenoble Alpes, plusieurs centres hospitaliers sont impliqués dans l'essai clinique financé par la sociétéBoston Scientific : les Hospices civils de Lyon, l'AP-HM et l'hôpital Henri-Mondor de Créteil (AP-HP). « La patiente opérée va bien. Elle a pu regagner son domicile quelques jours après la chirurgie et n’a présenté aucun effet secondaire lors de la mise en route de l’illumination. Quant à l’effet sur la maladie de Parkinson, il faudra au moins un an avant de pouvoir évaluer la patiente. Ce n'est pas comme la neurostimulation qui a un effet immédiat », expliquent le Pr Pierre Magistretti, conseiller international du Fonds de dotation Clinatec, et le Pr Stephan Chabardes, responsable de l’essai clinique. Le Pr Magistretti précise que l'activité du système dopaminergique sera évaluée de manière objective par la tomographie par émission de positons : « L'objectif est de maintenir le niveau de l'activité et d'apporter le soutien énergétique et métabolique nécessaire pour remettre en état les neurones qui commencent à se dégrader. »
Treize autres patients devraient être opérés à partir de septembre au bloc opératoire qui se situe à Clinatec et seront suivis quatre ans. Pour être inclus, les patients doivent notamment avoir été diagnostiqués depuis moins de deux ans et être âgés de moins de 65 ans.
La neuro-illumination repose sur la pose d'un dispositif intracérébral développé par le CEA, constitué d'un neurostimulateur implantable, relié à un générateur optique, lui-même relié à une fibre optique délivrant une lumière proche infrarouge au cerveau.
Un effet au niveau mitochondrial
L'effet biologique de la neuro-illumination passe notamment par les mitochondries. « Il est démontré qu'il y a une diminution de l'activité métabolique des neurones dans les maladies neurodégénératives, et probablement une atrophie des cellules gliales, explique le Pr Magistretti. Et l'on sait que la neuro-illumination interagit avec la chaîne respiratoire mitochondriale, boostant ainsi la production d'énergie. » C'est en tout cas un des mécanismes identifiés, mais il en existe probablement d'autres. Et c'est l'objectif du projet AstroPark, conduit en parallèle sur des neurones et des cellules gliales, de les identifier. « C'est essentiel de comprendre les phénomènes en jeu pour pouvoir étendre l'approche à d'autres pathologies », souligne Thierry Bosc.
Au-delà de la maladie de Parkinson, les chercheurs de Clinatec estiment d'ores et déjà que la photobiomodulation infrarouge pourrait représenter une innovation de rupture dans beaucoup de pathologies, comme les maladies de la dégénérescence cérébrale (telles que la maladie de Huntington) ou le diabète, voire dans l'étude du microbiote.
« Nous sommes déjà en train de développer des casques de neuro-illumination extracrânienne qui vont nous permettre de nous attaquer à d'autres maladies que Parkinson », souligne Thierry Bosc. Le projet Covéa NeuroTec, qui bénéficie du soutien du mécénat du mutualiste Covéa, vise ainsi à évaluer l'intérêt d'un tel dispositif dans la maladie d'Alzheimer. « Ce dispositif extracrânien permet de couvrir de larges surfaces de cortex, ce qui est intéressant pour la maladie d'Alzheimer car c'est une maladie diffuse contrairement à la maladie de Parkinson », détaille le Pr Magistretti. La partie préclinique vient de démarrer, et le protocole de l'essai clinique est en cours d'élaboration.
Dans le diabète, « l'idée serait notamment de renforcer la résistance des cellules bêta du pancréas en les prétraitant avant une transplantation, afin de faciliter leur intégration au niveau de l'organisme qui les reçoit », note le Pr Magistretti.
*Cette structure, créée en 2011 par le Pr Alim-Louis Benabid, co-inventeur de la stimulation cérébrale profonde, est le fruit de la collaboration entre le CEA, le CHU Grenoble Alpes, l’Université Grenoble Alpes et le Fonds de dotation Clinatec. Il s'agit d'un lieu réunissant médecins, technologues, chercheurs et biologistes avec l'ambition de mettre micro-nanotechnologies et électronique au service des patients.
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