Depuis des années, chercheurs et cliniciens fondent de gros espoirs sur l’arrivée de radiomarqueurs capables de fournir un diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer.
Pour l’instant sur le diagnostic se base sur les plaintes mnésiques, les signalements de l’entourage, et divers facteurs de risque comme l’âge, le sexe, l’hypertension artérielle, le diabète, ou encore des facteurs de prédisposition comme ApoE4. « Tous ces indices ne permettent d’établir un diagnostic qu’entrent les premiers symptômes et le seuil de démence », explique le Pr Catherine Hommet, responsable du centre mémoire de ressources et recherche (CMRR) au CHRU de Tours, « les biomarqueurs de la maladie d’Alzheimer pourraient avoir leur utilité pour élargir les possibilités de diagnostic jusqu’au stade préclinique », ce qui serait utile non seulement en termes de prise en charge, mais aussi en termes de recherche.
Des essais biaisés par le manque d’outil diagnostic
Les études sur des traitements incluent des patients les plus précoces possible. En l’absence de critères objectifs, il arrive fréquemment qu’une large part d’entre eux soit atteints par une démence non causée par la maladie d’Alzheimer. Depuis 2013 plusieurs radiomarqueurs commerciaux utilisables lors d’une tomographie par émission de positons (TEP) et destinés au diagnostic de la maladie d’Alzheimer ont fait leur apparition. Le premier fut le 18F-AV45, qui a désormais une AMM sous le nom de florbétapir (Amyvid commercialisé par Avid/Lilly). Deux autres nouvelles molécules lui ont emboîté le pas : Le flutemetamol (Vizamyl, GE Healthcare) autorisé aux États-Unis mais pas encore en Europe malgré un avis favorable de l’EMA en juin dernier, et le florbétabène (Neuraceq, Piramal Imaging Limited) autorisé depuis février 2014.
La poule et l’œuf
Tous ces radiomarqueurs se fixent sur les peptides amyloïdes, or le rôle des plaques bêta amyloïdes dans la maladie est de plus en plus flou. « Il y a une corrélation entre l’étendue des lésions et la sévérité de la pathologie, mais on ne sait pas si ces plaques sont une des causes de la maladie ou si elles partagent les mêmes origines, explique le Pr Denis Guilloteau, responsable du service de médecine nucléaire au CHRU Bretonneau, à Tours, Il y a même une hypothèse qui veut que les plaques bêta amyloïdes jouent un rôle protecteur vis-à-vis de l’inflammation lors des stades précoces de la maladie. » Des questions restent également ouvertes sur la cinétique de l’évolution conjointe des plaques et de la maladie : comment interpréter correctement des dépôts amyloïdes observés chez un patient asymptomatique ? Comment savoir s’il va évoluer ou non ?
La CT contre l’utilisation en routine des radiomarqueurs
L’idée même du diagnostic précoce par les radiomarqueurs est litigieuse puisque la commission de transparence de la haute autorité de santé a estimé en 2013 que le florbétapir mis au point par AMYVID ne devait pas être inscrit sur la liste des spécialités agréées à l’usage. La cause invoquée : un tel marqueur n’avait « pas sa place dans pas de place dans la stratégie diagnostique des patients adultes présentant une déficience cognitive, en cours d’évaluation pour une maladie d’Alzheimer et pour d’autres causes de déficience cognitive ». La commission ne remettait pas en doute la capacité du marqueur à aider à établir un diagnostic, mais elle estimait que son utilité était « à mettre en perspective avec les modalités thérapeutiques, médicamenteuses ou non, actuellement très limitées ».
Le seul cas où les radiomarqueurs sont pour l’instant utilisés à des fins diagnostiques est celui des patients jeunes, les évolutions rapides et les formes familiales. « Si on observe une accumulation d’Apo E4 et qu’en plus le patient est positif à l’amyloïde en TEP, alors on a des éléments solides pour poser le diagnostic chez ce type de patient », juge Denis Guilloteau.
Prochaine cible : la protéine Tau
L’avenir des radiomarqueurs passera peut-être par la combinaison de plusieurs marqueurs aux cibles diverses. À près les peptides bêta amyloïdes, la protéine Tau phosphorylée et la suivante sur la liste. L’entreprise de biotechnologie Avid (propriété d’Eli Lilly) travaille aussi sur un nouveau marqueur : l’AV1451 dérivé de AV45 et testé dans le cadre d’un essai clinique sur 20 patients piloté par Catherine Hommet. Une équipe universitaire japonaise a également annoncé une autre molécule, le TK-108, également spécifique de la protéine Tau. Une troisième cible potentielle serait la protéine translocatrice (TSPO) qui reflète l’activation microgliale et la neuroinflammation. L’étude NICAD en cours sur les patients des CHRU de Tours, Toulouse, Caen, Nantes et Rennes, doit vérifier s’il y a une relation entre le déclin cognitif et ce marqueur de la neuroinflammation.
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