PAR LES Prs RACHEL REYNAUD (1,2) ET MA??TÉ TAUBER (3,4)
L’OBESITÉ HYPOTHALAMIQUE est caractérisée par une prise pondérale rapide, associée à des troubles du comportement alimentaire (absence de sensation de satiété, alternance anorexie/hyperphagie) ou des troubles de l’humeur (apathie, léthargie et/ou comportement agressif) qu’il ne faut pas confondre avec des traits dépressifs associés à des obésités morbides. Certains patients peuvent présenter des troubles neurovégétatifs respiratoires (apnées d’origine centrale), cardiaques (tachycardies inexpliquées), thermiques (hypothermies ou hyperthermies inexpliquées) ou ioniques (hypernatrémie chronique dite neurogène). Des troubles endocriniens sont associés : déficits en hormone de croissance, en gonadotrophines, hyperprolactinémie modérée.
Deux signes permettent de différencier ces patients de ceux présentant une obésité commune : la vitesse de croissance est le plus souvent insuffisante et en tout cas ne s’est pas accélérée avec la prise de poids expliquant le retard de taille fréquent et, s’il s’agit d’un adolescent, il existe un retard pubertaire.
Le dysfonctionnement hypothalamique peut être d’origine lésionnelle et, dans ce cas, le plus souvent il s’agit d’une tumeur, et, chez l’enfant, du craniopharyngiome. L’obésité est inconstante et peut être présente avant ou après la chirurgie ; elle est liée au degré d’envahissement de l’hypothalamus. Elle doit être prévenue par une chirurgie faite par un praticien ayant l’expertise de cette maladie dans le cadre d’une prise en charge multidisciplinaire et complétée si besoin par une protonthérapie.
Le deuxième grand groupe étiologique est représenté par les obésités syndromiques, dont le chef de file est le syndrome de Prader-Willi (SPW). L’obésité apparaît très précocement, entre 18 mois et 3 ans, sans excès d’apport calorique au début, après une phase qui peut être marquée par des difficultés alimentaires avec troubles de la succion. En période néonatale, il existe une hypotonie, des difficultés de succion ou de déglutition, une cryptorchidie chez le garçon. Des signes dysmorphiques sont retrouvés. Dans le SPW les yeux sont en amande, la lèvre supérieure est fine et les commissures labiales sont tombantes, les mains et les pieds sont petits (acromicrie). Si le diagnostic n’est pas fait en période néonatale les signes d’appel sont différents : le développement psychomoteur est retardé et il existe aussi des troubles du comportement et parfois des troubles psychiatriques pouvant être sévères.
L’incidence du SPW est de 1/15 000 à la naissance. Il est lié à un défaut d’expression des gènes situés sur le chromosome paternel dans la région du chromosome 15q11-q13. C’est un modèle de maladie liée à l’empreinte génomique.
Les deux autres causes géniques les plus fréquentes sont le syndrome de Cohen (caractérisé par une dysmorphie avec grandes dents et bouche ouverte en permanence, une atteinte rétinienne et une neutropénie) et le syndrome de Bardet-Biedl, caractérisé par une rétinite pigmentaire avec perte de la vision nocturne et une diminution du champ visuel dès l’âge de 5 ans, une atteinte rénale et une hexadactylie.
Dans certains cas, aucune étiologie n’est trouvée : on parlera alors de syndrome hypothalamique idiopathique (SHI).
Le traitement n’est encore que symptomatique.
Le diagnostic précoce permet de mettre une place une prise en charge thérapeutique multidisciplinaire et de prévenir l’obésité. Le traitement par hormone de croissance permet d’assurer une croissance staturale régulière, de prévenir et de contrôler l’obésité et de maintenir une masse musculaire quasi normale ; il participerait également à l’amélioration du développement cognitif. De même, la substitution en hormones sexuelles permettra d’assurer un pic de croissance pubertaire adéquat. Le second objectif est de dépister les complications létales pour ces patients, en premier lieu les apnées par une exploration systématique des troubles respiratoires du sommeil et, si besoin, la mise en place d’une ventilation adaptée aux troubles dépistés. Il peut exister un endormissement diurne excessif qui doit être prouvé et traité. Une prise en charge orthophonique, psychomotrice et psychologique est mise en place très tôt ainsi qu’un accompagnement parental.
Les traitements actuels sont symptomatiques mais ne ciblent pas l’anomalie de fonctionnement hypothalamique. Les progrès récents concernant le rôle de l’ocytocine ouvrent une voie thérapeutique intéressante en cours d’évaluation dans le syndrome de Prader-Willi.
1 Service de pédiatrie multidisciplinaire, hôpital La Timone Enfants, Marseille.
2 Centre de référence DEFHY (maladies rares d’origine hypophysaire), Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille, faculté de médecine, Aix-Marseille Université.
3 Unité d’endocrinologie, obésité, maladies osseuses, génétique et gynécologie médicale, hôpital des Enfants CHU de Toulouse.
4 Centre de référence du syndrome de Prader-Willi, faculté de médecine, Toulouse.
Liens utiles
Centre de référence du SPW : www.chu-toulouse.fr/-prader-willi-
Syndrome de Prader-Willi sur www.sante.gouv.fr
Centre de référence DEFHY : www.ap-hm.fr/defhy/
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