DE NOTRE CORRESPONDANTE
SUR LES 2,1 millions d’enfants de moins de 15 ans infectés par le VIH dans le monde, 90 % vivent en Afrique sub-saharienne ou le chevauchement de l’infection par le VIH et du paludisme impose un double fardeau.
La thérapie antirétrovirale (ARV) chez les enfants comporte au moins 3 médicaments : deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI) combinés à un inhibiteur non-nucléosidique de la transcriptase inverse (INNTI) ou a un inhibiteur de protéase (IP). Dans les pays en développement, les combinaisons INTI/INNTI sont les thérapies de première ligne en raison de leur coût relativement bas.
Une précédente étude randomisée a montré que la thérapie ARV basée sur deux inhibiteurs de protéase, lopinavir et ritonavir, entraîne une plus grande suppression virale chez les enfants, comparé à la thérapie basée sur un INNTI.
Par ailleurs, on a montré que les inhibiteurs de protéase sont actifs in vitro contre Plasmodium falciparum, le principal agent du paludisme en Afrique.
Dès lors, la thérapie ARV basée sur le lopinavir-ritonavir pourrait-elle offrir l’avantage de réduire l’incidence du paludisme chez les enfants ?
Achan et coll. ont examiné cette question dans une étude randomisée en Ouganda. Ainsi, 170 enfants infectés par le VIH (âgés de moins de 6 ans) ont été randomisés à recevoir la thérapie ARV comprenant 2 INTI (lamivudine et zidovudine ; en cas d’anémie, la zidovudine est remplacée par la stavudine ou l’abacavir) et soit lopinavir-ritonavir soit un INNTI (névirapine pour les moins de 3 ans, éfavirenz pour les plus de 3 ans).
Les enfants recevaient par ailleurs une moustiquaire imprégnée d’insecticide pour protéger le lit, un récipient pour stocker l’eau, des multivitamines, et une prophylaxie antipaludique par triméthoprime-sulfaméthoxazole. Ils étaient suivis régulièrement (pendant 6 mois à 2 ans) et tout épisode palustre non compliqué était traité par artéméther-luméfantrine, le traitement antipaludique de choix en Ouganda.
Les résultats montrent que malgré ces mesures, le risque de développer un premier épisode de paludisme dans les 6 mois du traitement anti-VIH est de 40 % chez ces enfants dans le groupe lopinavir-ritonavir, et de 52 % dans le groupe INNTI.
Ascension des taux sanguins de luméfantrine.
Toutefois, la thérapie ARV basée sur le lopinavir-ritonavir réduit de 41 % le taux de paludisme chez ces enfants (1,32 contre 2,25 épisodes par personne-année).
Cette baisse est principalement due à une réduction du risque de paludisme récurrent après traitement antipaludique (par artéméther-luméfantrine), avec 28 % de récurrence palustre dans le groupe lopinavir-ritonavir, contre 54 % dans le groupe INNTI durant une période de deux mois.
L’effet protecteur de l’association lopinavir-ritonavir contre le paludisme semble ainsi provenir principalement d’un effet sur l’exposition à la luméfantrine. Les taux sanguins de luméfantrine 7 jours après le traitement antipaludique sont plus élevés dans le groupe lopinavir-ritonavir, et des taux de luméfantrine supérieurs à 300 mg dans ce groupe sont associés à une réduction de plus de 85 % du risque de récurrence paludique.
Il est possible que ces inhibiteurs de protéase inhibent la dégradation de la luméfantrine, prolongeant son effet prophylactique post-thérapeutique, ou qu’il y ait une synergie antipaludique entre le luméfantrine et le lopinavir. Les futures études devront préciser pourquoi cette combinaison thérapeutique est protectrice.
« Puisque cette combinaison d’antiprotéases semble plus efficace pour traiter le VIH par rapport aux INNRTs, et qu’elle protège contre la récurrence du paludisme, elle mérite d’être considérée chez les enfants vivant dans les régions ou le paludisme est endémique », déclare dans un communiqué le Dr Lynne Mofenson, directrice de la branche sida Pédiatrique, Adolescent et Maternel du NICHHD, l’Institut du NIH américain qui a sponsorisé cette étude.
Toutefois, les auteurs continuent de suivre cette cohorte de façon à évaluer l’efficacité à long terme des deux thérapies ARV chez ces enfants.
Le coût décroissant des antiprotéases, et la disponibilité d’une nouvelle formulation lopinavir-ritonavir qui n’a pas besoin d’être réfrigérée, pourraient abolir les obstacles à leur utilisation dans les pays pauvres.
Achan et coll., N Engl J Med, 29 novembre 2012.
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