« Nous avons aujourd’hui un important recul sur l’efficacité et la sécurité des vaccins anti, Covid-19. Ces données, transparentes, cf. le rapport de l’ANSM et des CRPV (1,2), confirment l’excellente efficacité mais aussi sécurité des vaccins à ARNm (Pfizer, Moderna), y compris chez les femmes enceintes, pour lesquelles malheureusement restent quelques réticences, y compris dans le corps médical, alors qu’aucune toxicité importante n’a été recensée et que, d’un autre côté, des bébés ont dû être délivrés en urgence, dont certains sont sortis non viables », souligne d’entrée le Pr Mathieu Molimard, pharmacologie médicale, CHU de Bordeaux, Université de Bordeaux-Inserm CR1219, CRPV de Bordeaux.
Une efficacité excellente après deux doses plus un rappel, soit un schéma ultra-classique
Après deux doses, le taux d’Ac passe de 80 à 50 % en 6 mois, ce qui induit une petite diminution de la protection, en particulier vis-à-vis des formes symptomatique ou juste PCR+, mais pas vis-à-vis des formes graves, du moins chez les sujets immunocompétents : on note une diminution, non significative, de 5 % d’activité vis-à-vis de ces formes. En revanche, chez les sujets âgés et/ou peu immunocompétents, la protection, déjà moindre, pourrait peut-être baisser plus rapidement.
Résultat, comme pour le DTCP, un rappel est indispensable. Il doit être réalisé 6 mois à 1 an après les deux injections vaccinales. Il va venir booster la protection en termes d’anticorps mais aussi de cellules effectrices LT killers, via les cellules immunitaires mémoires. À noter, ce rappel, communément appelé « 3e dose », n’en est pas une. Le terme de 3e dose, pour être exact, devrait se limiter à l’injection vaccinale supplémentaire mise en œuvre chez les sujets immunodéprimés.
Des vaccins à ARNm dosés respectivement à 30 µg pour Pfizer versus 100 µg pour Moderna
Dans les pays riches, seuls les vaccins à ARNm seront utilisés à l’avenir. En effet, le vaccin à adénovirus d’AstraZeneca induit un risque de thrombose atypique, certes faible, mais qui réduit le rapport bénéfice/risque chez les sujets à faible risque, en particulier les jeunes. Cela alors que l’on s’apprête à vacciner les enfants. De son côté, le vaccin à adénovirus Janssen n’a pas tenu ses promesses puisque exit la dose unique, ici aussi une seconde dose vaccinale est nécessaire.
Les vaccins à ARNm sont globalement autant voire plus efficaces, et plus sûrs. Toutefois les deux vaccins sur le marché, assez étrangement, utilisent deux doses fort différentes : 30 µg pour Pfizer, 100 µg pour Moderna.
Pour mémoire, les études cliniques montraient une efficacité quasi similaire à 30 et 100 µg avec seulement + 2 à 3 % de protection à la dose la plus élevée. Pfizer a choisi de partir sur 30 µg, Moderna a opté pour 100 µg. C’est pourquoi, vu l’impact toxique effet dose, on observe deux fois plus de myocardites avec le vaccin Moderna qu’avec le vaccin Pfizer. Raison pour laquelle aujourd’hui les autorités de Santé recommandent d’utiliser en rappel le Moderna à demi-dose quand on reste à pleine dose pour le Pfizer.
Après rappel, l’efficacité, excellente, suggère qu’on pourrait ensuite écarter les rappels
«En Israël, les données en vraie vie montrent une augmentation très significative de la protection après rappel. Elle est environ multipliée par dix par comparaison aux sujets s’en tenant aux deux doses. En clair, la probabilité de positiver une PCR (PCR+) ou de faire un Covid-19 symptomatique est divisée par dix et ceci dans toutes les tranches d’âge », résume le Pr Molimard. C’est formellement démontré chez les plus de 39 ans, moins net chez les moins de 39 ans, car le faible nombre d’infections symptomatiques chez eux rendant la démonstration difficile (manque de puissance) - même s’il n’y a pas logiquement de raison qu’on ne retrouve pas le bénéfice.
« On est donc en droit d’espérer avoir une protection bien plus longue dans le temps après rappel, permettant peut-être d’écarter les rappels ultérieurs », commente le Pr Molimard.
Reste néanmoins la question du maintien de l’efficacité vaccinale face aux mutations. « On peut espérer qu’on aura assez d’efficacité avec le taux d’Ac obtenu après rappel pour neutraliser la protéine Spike, même porteuse de multiples mutations. Mais nul ne peut l’assurer. En revanche, en ce qui concerne les Ac monoclonaux, cela risque d’être bien plus problématique, vu qu’ils ne ciblent qu’un épitope alors que, naturellement, on produit une ‘soupe’ d’Ac variés », explique le pharmacologue.
Une sécurité confirmée en absence de nouveaux signaux
Plus d’un milliard de doses ont été injectées dans le Monde, près de 100 millions en France. Autant dire le recul sur la sécurité est important. Aujourd’hui, il n’y a aucun nouveau signal à déplorer par comparaison aux derniers rapports publiés :
• Thromboses atypiques. On en est toujours autour d’un taux de 1/100 000 de thromboses atypiques associées au vaccin Astra Zeneca. « Soit un taux d’évènements graves très faible quand, pour mémoire le risque de décéder d’un accident de voiture dans l’année en France est autour 1/20 000 - mais bien supérieur à celui associé aux vaccins à ARNm, que l’on privilégie donc dès que possible », explique le Pr Molimard.
• Autres évènements.. Le vaccin mimant la maladie, il en reproduit les troubles. Ils sont nombreux dans le Covid-19 mais sont dominés, hors impact pulmonaire, par des effets cardiaques. Il est donc fort peu étonnant d’observer en post-vaccination des myocardites. « Ces myocardites sont généralement bénignes et transitoires et touchent surtout les jeunes hommes de moins de 30 ans, après la 2e injection », souligne le Pr Molimard. On peut observer aussi des troubles du rythme, des accès hypertensifs transitoires. Ces événements, généralement bénins, peuvent parfois (rarement) s’avérer graves et nécessiter une hospitalisation. Enfin on observe aussi des réactivations de zona, en rapport avec la lymphopénie et la mobilisation des cellules immunitaires contre le vaccin.
• Après rappel. Les données du CDC (États-Unis) montrent, sur plusieurs millions d’Américains, que les effets indésirables après rappel sont de même type et intensité qu’après la 2e dose. En France, les premières données le confirment.
• Enfants de 5 à 11 ans. Le vaccin à 10 µg a une bonne efficacité et, pour les données que l’on a aujourd’hui, sa sécurité semble bonne.
• Association vaccins grippe et Covid-19. Nul problème à associer vaccin antigrippal et rappel anti Covid-19, sous réserve d’injecter dans deux bras différents pour pouvoir identifier/attribuer les éventuels effets secondaires locaux. On a désormais assez de données montrant que cette association n’induit pas de baisse d’efficacité de l’un ou l’autre vaccin ni plus d’effets indésirables.
Entretien avec le Pr Mathieu Molimard (Service de Pharmacologie, CHU de Bordeaux, CRPV de Bordeaux)
(1) Suivi des cas d’effets indésirables des vaccins Covid-19 : données du 29/10/2021 au 11/11/2021. ANSM
(2) Enquête de pharmacovigilance sur les effets indésirables des vaccins Covid-19 chez les femmes enceintes et allaitantes. Rapport n°7. Données du 08/10/2020 au 04/11/2021. CRPV de Lyon et Toulouse
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