Vu la prévalence de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) dans le monde, de nombreuses personnes atteintes seront un jour exposées à une altitude supérieure à 2000 mètres. Jusqu’à aujourd’hui, malgré un questionnement, aucune recommandation ne prône une adaptation de la prise en charge de la BPCO lors d’un séjour en altitude. Mais une petite étude suisse récente et bien menée relance le débat (1).
Cet essai versus placebo en cross over met en effet en évidence que des patients BPCO de grade 2-3, sans syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) ni désaturation à 800 mètres d’altitude, développent, à 2000 mètres, des désaturations et des troubles de l’altitude, en particulier du sommeil. Pour l’éditorialiste, « c’est le résultat le plus frappant de l’étude. À savoir : que des altitudes aussi modérément élevées engendrent des effets aussi sévères chez ces patients BPCO non qualifiés pour recevoir traditionnellement une oxygénothérapie. » (2)
L’étude montre par ailleurs que ces sujets bénéficient, à 2000 mètres, d’une oxygénothérapie supplétive nocturne – plus pratique que diurne – qui est associée à une amélioration de leur saturation en oxygène (Sp02 augmentée de 9 %), une réduction de l’index d’apnée/hypopnée ([IAH] amélioré de 19,7 l/h), une meilleure qualité, subjective, du sommeil, et une réduction de 85 % des évènements imposant un traitement médical ou une descente à plus basse altitude…
Faut-il pour autant oxygéner tous les BPCO dès 2000 mètres ? Probablement pas, en revanche il faut être à même de l’envisager.
Versus placebo (air) en aveugle et cross over
L’étude a été menée sur 32 patients résidant habituellement à basse altitude (moins de 800 mètres). D’âge moyen 66 ans, ce sont pour 53 % des femmes. Ils souffrent de BPCO de stade II-II avec une FEV moyenne de 53 % ± 13 %, une pO2 d’au moins 92 % sans SAOS associé.
Ils ont été évalués à deux altitudes différentes, 500 m au CHU de Zürich et 2 050 m dans un hôtel alpin d’altitude. Les patients y ont fait deux séjours (espacés d’au moins 2 semaines en dessous de 800 m) de 2 jours et 2 nuits, l’un sous oxygénothérapie nocturne, l’autre sous placebo, de façon randomisée en cross over et en aveugle.
Le critère primaire est la différence entre les paramètres sous oxygénothérapie versus placebo (SpO2 et IAH) en intention de traiter.
Sous oxygénothérapie nocturne, « les sujets ont une SpO2 améliorée de 9 % ([8-11] ; p = 0,001) une IAH réduite de 19,7 l/h ([11-28] ; p = 0,001) et un sommeil de meilleure qualité, (+ 9 %/sur le score analogique) », résument les auteurs (1). « Néanmoins, leur capacité d’exercice, leur score cognitif et les gaz du sang ne sont pas modifiés », souligne l’éditorialiste (2). « Ce qui suggère que l’oxygénothérapie n’a pas d’effet pérenne sur ces critères cliniques. Mais peut être un effet sur les complications de l’altitude, plus liées à la réduction de l’inflammation induite par l’hypoxie », proposent les auteurs (1).
Quoi qu’il en soit, en pratique clinique, manifestement au moins un patient BPCO de stade II-III souffre de l’altitude et doit être pris en charge médicalement ou redescendu. C’est beaucoup et… bon à savoir.
(1) L Tan et al. Effect of Nocturnal Oxygen Therapy on Nocturnal Hypoxemia and Sleep Apnea Among Patients With Chronic Obstructive Pulmonary Disease Traveling to 2048 Meters. A Randomized Clinical Trial. JAMA Netw Open. 2020;3(6):e207940. doi:10.1001/jamanetworkopen.2020.7940
(2) D Combs et S Parthasarathy. Nocturnal Oxygen for High Altitude Travel in Patients With Chronic Obstructive Pulmonary Disease. JAMA Netw Open. 2020;3(6):e208022. doi:10.1001/jamanetworkopen.2020.8022
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024