DE NOTRE CORRESPONDANTE
PARCE QUE les poumons ont une faible capacité de régénération, la transplantation pulmonaire est le principal traitement pour des poumons sévèrement endommagés ; cette procédure est toutefois limitée par la pénurie d’organes disponibles pour la transplantation.
Pour remédier au manque d’organes, la recherche dans le domaine de l’ingénierie tissulaire avance à grands pas.
Ainsi, des techniques ont été récemment développées chez l’animal pour décellulariser des organes aussi complexes que le cœur, le rein et le foie (pris dans le pool d’organes inutilisables pour la transplantation) et recellulariser leur matrice in vitro, afin de reconstituer un organe bioartificiel prêt à être transplanté.
Tout récemment, le 15 juin, « le Quotidien » rapportait le travail d’une équipe de Boston qui avait réussi à décellulariser des foies ischémiques de rats en préservant leur matrice et leur réseau microvasculaire puis, grâce à des perfusions d’hépatocytes, avait obtenu des greffons recellularisés. Ces foies reconstitués, greffés à d’autres animaux, avaient conservé plusieurs heures leur structure et leurs fonctions (ce travail est publié dans « Nature Medicine » du 13 juin 2010).
C’est maintenant une équipe dirigée par le Dr Laura Niklason de l’université de Yale (New Haven, États-Unis) qui a reconstitué in vitro des poumons de rats.
Les chercheurs ont d’abord décellularisé des poumons de rats adultes en perfusant dans l’artère pulmonaire et la trachée une solution détergente (CHAPS) pendant deux à trois heures. Cette procédure enlève tous les composants cellulaires, mais laisse en place la matrice extracellulaire qui conserve la micro-architecture alvéolaire et vasculaire du poumon.
Un bioréacteur simulant l’environnement pulmonaire fœtal.
La matrice acellulaire est alors placée dans un bioréacteur qui simule l’environnement pulmonaire fœtal, puis recellularisée par injection dans la trachée de cellules épithéliales pulmonaires de rat nouveau-né, et injection dans l’artère pulmonaire de cellules endothéliales des microvaisseaux pulmonaires. Après quatre à huit jours de culture, les poumons reconstitués présentent les mêmes caractéristiques mécaniques que des poumons natifs, et sont prêts pour la transplantation.
Enfin, les chercheurs ont remplacé le poumon gauche chez 4 rats par la greffe d’un poumon gauche reconstitué ; les poumons implantés pendant une à deux heures participent aux échanges gazeux.
Si ces résultats sont encourageants, il faudra encore améliorer la procédure. Enfin, pour que l’approche puisse être utilisée en clinique, il sera nécessaire d’identifier une source autologue d’épithélium pulmonaire (cellule souche pulmonaire ou cellule souche pluripotente induite).
La participation aux échanges gazeux.
« Nous démontrons pour la première fois la possibilité de transplanter un poumon reconstitué, en utilisant un modèle de rat », explique au « Quotidien » le Dr Thomas Petersen (université de Yale), premier signataire de ce travail. « Les poumons ont été implantés pendant jusqu’à deux heures et pouvaient participer aux échanges gazeux (oxygène et gaz carbonique). Ils fonctionnaient bien puisque le sang quittant le poumon reconstitué avait une saturation en oxygène de 100 %. »
« L’espoir est qu’un jour cette approche puisse être utilisée chez les patients atteints d’une maladie pulmonaire au stade terminal (mucoviscidose, emphysème/BPCO ou peut-être cancer pulmonaire). Toutefois, de nombreux obstacles doivent être surmontés et nous estimons que cela pourrait prendre de vingt à vingt-cinq ans avant qu’un poumon humain reconstitué pleinement fonctionnel puisse être transplanté. »
« Notre prochain objectif est de perfectionner la procédure chez le rat. Par exemple, la couverture endothéliale vasculaire doit être améliorée afin de minimiser la coagulation ; la matrice pulmonaire pourrait être moins lésée en améliorant la procédure de décellularisation, afin de minimiser la fuite de sang dans les espaces aériens. En outre, les poumons reconstitués devront être transplantés chez le rat pendant de plus longues périodes. »
Sciencexpress 24 juin 2010, Petersen et coll.
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