Le nombre de suicides est resté en grande partie inchangé ou a diminué au cours des premiers mois de la pandémie, par rapport aux niveaux prévus, met en évidence une étude observationnelle sur 21 pays*, publiée dans « The Lancet Psychiatry ». Cet « instantané des premiers mois de la pandémie » ne doit pour autant pas masquer les effets de la crise sanitaire sur le suicide qui « ne se produiront pas nécessairement immédiatement », avertissent les auteurs.
L’étude a comparé les données de 16 pays ou régions à revenu élevé et de 5 autres à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, collectées entre le 1er avril et le 31 juillet 2020, par rapport à celles des années précédentes. « Aucune preuve d'une augmentation du nombre de suicides au cours des premiers mois de la pandémie » n’a été mise en évidence. « Dans 12 régions, il y avait des preuves d'une diminution du suicide, par rapport aux chiffres attendus », est-il souligné.
Un potentiel effet protecteur de la cohésion sociale
Ce constat pourrait en partie s’expliquer par les mesures prises pour maintenir ou renforcer les services de santé mentale ou pour assurer un soutien financier aux plus vulnérables qui ont pu atténuer les effets néfastes de la pandémie. Un autre phénomène, lié à une forme de cohésion sociale et de soutien communautaire face à la crise, pourrait par ailleurs protéger contre le suicide.
Un constat similaire a été observé en France. Dans une étude** publiée dans « Acta Psychiatrica Scandinavica », une équipe du CHU de Montpellier a analysé les données d’hospitalisation pour tentative de suicide pendant le premier confinement. La période (du 16 mars au 11 mai 2020) a été comparée à celles d’avant (du 19 janvier au 15 mars) et d’après (du 12 mai au 7 juillet), ainsi qu’à la même période en 2019.
Il en ressort que « la fréquence des tentatives de suicide non graves ainsi que le pourcentage de femmes et de tentatives de suicide de moins de 30 ans étaient significativement plus faibles pendant et après le confinement », notent les auteurs. Ainsi, malgré l’inquiétude des conséquences de la crise, notamment sur les actes suicidaires, « il n’y a pas eu la hausse attendue », observe la Pr Émilie Olié, psychiatre au département d’urgence et post-urgence psychiatrique du CHU de Montpellier et autrice principale de l’étude.
Une vigilance sur le long terme
Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer ce phénomène. La baisse des hospitalisations pourrait ainsi être liée à « un effet lié à la cohésion sociale, comme on peut l’observer en temps de guerre », souligne la psychiatre, citant également la non-hospitalisation des patients ayant fait une tentative de suicide non grave pendant cette période d'accès limité aux urgences, contrairement aux tentatives les plus graves.
Car, à l'inverse, « le taux de mortalité le plus élevé lors de l'hospitalisation a été observé pendant le confinement », poursuivent les auteurs, relevant que les décès représentaient 1,8 % des cas (187) pendant le confinement, contre 1,07 % (142 décès) sur la même période en 2019 et 1,35 % pour la période précédant le confinement. « Ce qui interpelle, c’est le maintien du nombre absolu de tentatives violentes ou sévères, souligne la Pr Émilie Olié. L’aspect protecteur de la cohésion sociale du premier confinement n’aurait pas permis à ces patients de réduire leur risque suicidaire », qui pourrait être la traduction d’une psychopathologie plus sévère.
Ces résultats préliminaires devront être confortés par une analyse du taux de mortalité par suicide sur l’ensemble de l’année 2020. « Nous devons rester vigilants, car les conséquences sociales de long terme de la crise sanitaire pourront être des facteurs de risque suicidaire », alerte la Pr Olié, qui cite également les conséquences psychiatriques du Covid et les Covid longs comme points de préoccupation à l’avenir.
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