En Haute-Garonne, 2024 s’est déroulée sous les pires auspices pour la filière psychiatrie. Elle avait débuté avec une série de faits divers tragiques (suicide, viol et agression sexuelle) aux urgences psychiatriques du CHU de Toulouse. Des événements qui avaient mis à jour le manque criant de lits de post-urgences, de personnel soignant, et une mauvaise coordination avec les établissements privés.
L’année ne s’est pas mieux terminée. Fin décembre, la Haute autorité de santé (HAS) a rendu publique sa décision de non-certification du centre hospitalier public spécialisé en psychiatrie Gérard Marchant, pour insuffisance de la qualité des soins.
« Cette décision impacte fortement les soignants. Ils sont déçus mais motivés pour relever le défi de la HAS », assure Frédéric Artigaut, directeur par intérim de l’établissement depuis septembre 2023. Il sera bientôt remplacé par Richard Rouxel, DG adjoint du CHU de la Réunion, dont l’arrivée vient d’être annoncée.
La dignité des patients pas toujours respectée
De leur côté, les syndicats sont dans l’amertume. « C’est très difficile pour nous de perdre la certification. Parmi les soignants, il y a eu de la stupeur, car tout le monde a l’impression de faire son maximum. Mais, c’est aussi tout sauf étonnant !, s’agace Loïc Brelier, représentant du personnel Sud santé sociaux de l’établissement. Nous avons alerté maintes et maintes fois sur le manque de moyens et d’effectifs, l’insalubrité des locaux et tout cela a fini par peser sur la qualité des soins. »
Le rapport de la HAS, établi dès novembre 2024, a fait suite à une visite de contrôle effectuée en juin. Le document pointe « la dignité des patients pas toujours respectée, les équipements des chambres et des espaces communs détériorés […] avec des tapisseries inexistantes ou détériorée, des fauteuils éventrés, un salon des familles minimaliste […]. Dans les chambres d’isolement, il a été constaté un défaut d’hygiène avec des odeurs, le plafond taché, des sanitaires dégradés. » Le rapport pointe aussi « le port du pyjama systématiquement prescrit pour tous les patients dans les unités d’admission dans les zones fermées. Une prescription ni motivée, ni réévaluée ».
« Nous avions pourtant engagé des travaux dans les unités de crise et d’hospitalisation pour adolescents dès l’été dernier, avance le directeur. Et nous avons aussi fléché sans attendre 450 000 euros dans le budget 2025 de l’établissement pour renouveler les équipements hôteliers des unités d’admission. »
Manque de sécurité en cas d’agression ou d’intrusion
Des initiatives insuffisantes aux yeux de la HAS qui note aussi des manquements concernant les soins. « À propos des médicaments à risque, identifiés sur la prescription, et notés en rouge pour renforcer la sécurisation de l’administration et la surveillance. Les professionnels rencontrés par les experts de la HAS ne sont pas tous formés et sensibilisés à leur utilisation […]. Les prérequis à l’hygiène des mains ne sont pas toujours respectés. Enfin concernant le protocole de pose de dispositifs invasifs, il n’a pas été réalisé d’évaluation des pratiques », souligne la Haute autorité.
De plus, la sécurisation des sites extérieurs « n’est pas complètement finalisée ». « Il n’y a pas de système d’appel à disposition des professionnels en cas d’agression ou d’intrusion », détaille le rapport.
Dans ses conclusions, l’instance encourage l’établissement à corriger ces points, mais aussi à systématiser la réalisation de plans de prévention partagés pour les patients qui connaissent des épisodes de violence et à sécuriser la prise en charge de l’urgence vitale, avant une nouvelle visite programmée au plus tard dans deux ans.
20 millions d’euros pour soigner la psychiatrie
Pour améliorer la situation de Gérard Marchant, l’espoir vient désormais du pacte de refondation de la psychiatrie, cosigné le 7 janvier à Toulouse par l’ARS, l’Unafam (usagers), l’hôpital, le CHU de Toulouse et huit cliniques privées du département. D’un montant de 20 millions d’euros jusqu’en 2028, ce grand plan avait été annoncé dès février 2024. Il ambitionne d’améliorer le fonctionnement de la filière psychiatrie dans le département. « Plus qu’un coup de pouce, c’est un vrai coup de main et c’est à nous, soignants, de nous saisir maintenant de cette opportunité », estime le Pr Christophe Arbus, chef du service psychiatrie du CHU de Toulouse. À Gérard Marchant, cela se traduira par une enveloppe de 5 à 6 millions d’euros. Une annonce que les syndicats accueillent « avec soulagement mais une grande prudence, notamment parce que le PLFSS [budget de la Sécu, qui délimite les dépenses de santé pour 2025, NDLR] n’a pas été signé », rappelle Loïc Brelier.
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