Pour mémoire, dans les années quatre-vingt-dix, les dizaines de victimes d’infection rachidienne nosocomiale à Mycobacterium xenopi, contractée à la Clinique du Sport à Paris, soulèvent la question du retard au diagnostic, parfois considérable, et des séquelles liées. S’en suit alors une réflexion, et la labellisation, en 2008 à Lille, du premier Centre de référence des infections ostéo-articulaires complexes (CRIOAC).
Une première en Europe
« Aujourd’hui, neuf centres référents nationaux – deux en Ile-de-France et sept en Région – couplés chacun à deux centres associés ont été labellisés. Soit au total vingt-sept centres disposant d’équipes pluridisciplinaires expérimentées dans le diagnostic et la prise en charge de ces infections assez rares (autour d’un millier par an) mais difficiles. C’est une première en Europe », résume le Pr Éric Senneville (CRIOAC, CHU de Lille-CH de Tourcoing).
Une somme de cas particuliers
Les infections ostéo-articulaires dites complexes (IOAC) constituent chacune un cas particulier, fonction du patient, du germe, de la localisation... Elles sont néanmoins essentiellement liées à trois situations pathogéniques. « Ce sont tout d’abord les patients en échec après une première prise en charge médico-chirurgicale pour une infection sur prothèse. Il y a ensuite les infections ostéo-articulaires survenant chez des patients sévèrement immunodéprimés[greffés, sujets d’hémato-oncologie, etc.]. Enfin, les infections ostéo-articulaires liées à des bactéries multirésistantes ou des germes difficiles à traiter », résume le Pr Senneville. Trois profils relevant typiquement d’une prise en charge spécialisée, par le centre de référence ou un centre associé.
Priorité à l’expertise
« La pathologie n’étant pas très fréquente, la priorité a été donnée à l’expertise. D’où le nombre restreint de centres de référence. Cela a néanmoins permis de structurer la filière de soins et faciliter le parcours des patients » explique le Pr Senneville. Avec, à la clé, l’optimisation et l’harmonisation des pratiques, en particulier des protocoles de soin, allant du diagnostic – prélèvement, analyse microbiologique – au traitement médico-chirurgical.
« Il y a une intrication étroite au niveau interrégional entre centre de référence et centres associés, ces derniers transmettant au centre de référence, pour validation, les conclusions de la réunion de concertation multidisciplinaire [RCP] et le plan de traitement médico-chirurgical envisagé, explique le Pr Senneville. Et un recensement national centralisé des cas [fiches de recueil standardisées] au sein d’un registre national a été mis en place depuis 1 à 2 ans ».
Registre, études cliniques...
Au-delà de promouvoir une prise en charge de qualité conforme aux recommandations (Société de pathologie infectieuse de langue française, 2009), les CRIOAC peuvent améliorer les connaissances. D’autant qu’avec le vieillissement de la population et le taux incompressible d’infections sur prothèses (1 %), le nombre des IOAC devrait augmenter.
« Aujourd’hui, sur l’interrégion Nord-Ouest, très vaste, il y a environ 750 patients par an dont 90 % d’IOAC. En revanche, il est trop tôt pour évaluer le taux de guérison. Au minimum 2 ans de recul après traitement étant nécessaires pour parler de guérison, ou plutôt de rémission de l’infection », note le Pr Senneville.
« Enfin, dans une pathologie plutôt rare, ces centres ouvrent de nouvelles perspectives en termes d’essais multicentriques ». Une étude randomisée coordonnée par le Pr Bernard (Tours) va ainsi s’atteler à comparer 6 semaines versus 12 semaines de traitement antibiotique après irrigation lavage et changement de prothèse en un, ou deux temps (étude DATIPO). « Si les recommandations actuelles prônent plutôt 12 semaines d’antibiotique, on manque de preuves. Il n’est pas exclu que 6 semaines fassent tout aussi bien », note-t-il.
D’après un entretien avec le Pr Éric Senneville (CRIOAC, CHU de Lille-CH de Tourcoing).
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