DAS28, SDAI, CDAI, RAPID-3, RADAI-5, RAID

Quels scores choisir pour suivre une PR ?

Publié le 05/04/2012
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PAR LE Dr JEAN-MARIE BERTHELOT*

LE NOMBRE de scores existant témoigne :

1- De l’impossibilité d’évaluer avec un seul score toutes les conséquences présentes et futures de la polyarthrite rhumatoïde (PR) pour un patient.

2-D’objectifs un peu différents selon le contexte : essais cliniques (sensibilité au changement, reproductibilité) ou vraie vie (simplicité, justesse).

Les préoccupations à court terme des patient(e)s (être vite soulagé(e)s de leurs douleurs et de leur fatigue) ne coïncident par ailleurs pas toujours avec celles du rhumatologue. Ce dernier se focalise plus sur le long terme et la prévention des complications systémiques (cardio-vasculaires) et des lésions structurales, en recherchant tant un syndrome inflammatoire biologique que des gonflements (clinique ou échographique) des synoviales. L’incidence des érosions sur la gêne fonctionnelle a pourtant été revue à la baisse récemment : deux travaux ont en effet conclu qu’elles avaient des conséquences fonctionnelles deux fois moindres que les chondrolyses, lesquelles avaient été jusque-là moins considérées du fait de leur moindre spécificité pour la PR. Il a surtout été montré qu’une progression d’1 point (sur un maximum de 440) du score radiologique de Sharp avait, dans les essais cliniques, un poids de 75 à 100 fois moindre qu’une progression d’1 point (sur un maximum de 8 environ) du score clinicobiologique DAS-28 pour prédire la gêne fonctionnelle. Autrement dit, les plaintes des patients sont bien plus liées à l’activité clinique de leur PR qu’aux séquelles radiologiques, même dans les formes anciennes. Un « contrôle serré » de cette activité clinique permet toutefois de satisfaire et le souhait des patients d’amélioration à court terme, et celui des médecins de freiner au plus la progression de la PR.

Le jugement du patient aussi fiable.

Pour assurer un suivi vraiment « serré », l’avis des patients est de plus en plus pris en compte, et heureusement, car :

1- Les médecins ne voient ces patient(e)s qu’un jour tous les X mois, alors que les PR peuvent connaître des fluctuations marquées (poussées) entre les consultations, avec poussées de destructions ; des scores d’auto-évaluation existent désormais (RAPID-3, RAID, RADAI-5) qui permettraient des auto-évaluations à domicile, à l’aide de programmes restituant en un coup d’œil l’activité de la PR entre deux consultations (figure 1) ; des questionnaires pour dépister rétrospectivement les poussées ont aussi été créés (ex : score FLARE).

2- Le jugement global du patient est en moyenne aussi fiable que celui du médecin, même si la somme des deux fait encore mieux.

3- La prise en compte du jugement du patient ne peux qu’améliorer son adhésion au traitement, laquelle reste souvent assez imparfaite.

Sur le tableau de bord des PR, au moins 12 cadrans seraient désormais à surveiller.

A- Six cadrans patients : jugement global du patient, douleur, raideur matinale, gêne fonctionnelle (ex : score HAQ), survenue de poussées et retentissement de la PR sur la qualité de vie (score RAID qui intègre entre autres la fatigue et les troubles du sommeil) ;

B- Six paramètres médecins : jugement global du médecin, nombre d’articulations gonflées, nombre d’articulations douloureuses, VS et CRP, progression radiologique, risque cardio-vasculaire. Les divers scores utilisés (à l’exception du score RAID qui ne reflète que l’impact de la PR sur la qualité de vie) sont des combinaisons de 3 à 5 de ces items. Une check-list simplifiée, plus appropriée à la médecine générale, est proposée dans le tableau 1.

RADAI-5 : le plus juste et le plus méconnu.

Le score le plus popularisé par les essais cliniques reste le DAS-28 (Disease Activity Score sur 28 articulations). Il utilise un algorithme requérant de connaître le nombre d’articulations douloureuses et gonflées, le jugement global du patient et la valeur de la VS (ou de la CRP). Un DAS-28 ‹ 2,6 équivaut à une rémission, un score ‹ 3,2 à une faible activité et un score› 5,1 à une forte activité. Ce score ne prend toutefois en compte que 4 des 12 paramètres ci-dessus, et ne s’intéresse ni aux pieds/chevilles/hanches, ni au rachis cervical. Il peut être artificiellement majoré par l’élévation de la VS pour un autre motif. Comme la VS manque souvent et que le calcul du DAS-28 requiert une calculette, Smolen et al ont proposé d’utiliser plutôt le score SDAI, lequel correspond à la somme (sans coefficient) du nombre d’articulations douloureuses, du nombre d’articulations gonflées, du jugement du patient, du jugement du médecin, et de la CRP (le tout divisé par 5). Ils ont ensuite été conclu que le score CDAI, qui équivaut au SDAI, mais sans la CRP, (le tout divisé par 4) était presque aussi performant. Ces scores gardent l’inconvénient de requérir l’avis du médecin. Le score RADAI-5 est la somme de l’estimation (par le patient seulement) de l’évolution passée de sa PR, de l’évolution actuelle de sa PR, de son état général, de sa douleur, et de sa raideur matinale. Il s’agit du score le plus juste, mais très méconnu. Le score RAPID-3, qui va aussi de 0 à 10, peut être rempli à domicile car il est la somme des jugements du patient sur l’activité de sa PR, sur sa gêne fonctionnelle et sur sa douleur. Le RAPID-3 peut très bien être utilisé dans d’autres rhumatismes. Il n’est de ce fait pas aussi spécifique des PR, et peut être faussé par la coexistence de douleurs ou de gènes fonctionnelles d’autres origines.

Ces scores sont au final encore affaire de spécialistes. Le SDAI et le RADAI-5 sont sans doute ceux qui reflètent le mieux l’activité réelle des PR. Le RAPID-3 a pour lui sa simplicité et sa transversalité, puisqu’il peut servir aussi dans d’autres rhumatismes. Toutefois, le DAS-28 restera sans doute le plus connu et utilisé malgré ses imperfections, la nécessité d’une VS récente, et les deux minutes pour le calculer. Reste que tout médecin peut utiliser la check-list du tableau 2 pour évaluer rapidement les aspects de l’activité des PR qui importent le plus, en particulier aux patients, et solliciter au besoin l’avis du rhumatologue si plusieurs voyants ne sont pas au vert.

*Service de rhumatologie, hôtel-Dieu, CHU de Nantes.


Source : Bilan spécialistes