Article réservé aux abonnés
Dossier

Troubles mictionnels

Enfin des solutions pour l’incontinence

Publié le 13/12/2013
Enfin des solutions pour l’incontinence


Bandelettes urinaires, neuromodulation, sphincters artificiels, nouveaux traitements médicamenteux… Désormais, les praticiens disposent de nombreux moyens pour lutter contre l’incontinence urinaire. Un arsenal détaillé lors du dernier congrès de l’AFU.

« Il existe aujourd’hui des solutions satisfaisantes à quasiment tous les problèmes d’incontinence ». Alors que pendant longtemps, l’incontinence urinaire (IU) a fait figure de parent pauvre, les choses sont en train de bouger, comme l’a souligné le Dr Adrien Vidart, chirurgien urologue (hôpital Foch, Suresnes) lors du congrès de l’Association Française d’Urologie (Paris, 20-23 novembre).

Courant 2014, l’arsenal pharmacologique devrait notamment s’étoffer dans le syndrome clinique d’hyperactivité vésicale (SCHV) idiopathique indique le Pr Gilles Karsenty (hôpital de la Conception, Marseille), co-auteur du chapitre « Les médicaments de la vessie » dans le rapport 2013 de l’AFU. « Pendant 20 ans, les médecins n’ont disposé que des anticholinergiques antimuscariniques (ACH), dont on connait l’efficacité modeste mais aussi les limites (bouche sèche, constipation, trouble cognitifs...). Très rapidement, ils vont pouvoir prescrire 3 nouvelles classes thérapeutiques. à savoir : les bêta3 mimétiques (B3A), la toxine

botulique A (BTA) et, chez l’homme, les inhibiteurs de phosphodiestérase 5 (IPDE5). »

Un premier bêta-3 mimétique autorisé

Les bêta-3 mimétiques agissent en activant les adrénorécepteurs bêta3 présents dans la paroi vésicale (sous-urothélium, détrusor). Leur efficacité est comparable à celle des ACH (- 0,55/24h pour les fuites urinaires ; - 0,4/24h pour le nombre de mictions), avec un profil de tolérance favorable en dépit de tachycardie et d’HTA dans 10% des cas, d’infections urinaires (3%) et de constipation (3%). Première molécule de cette classe, le mirabegron (Betmiga®, Astellas Pharma) est autorisé depuis décembre 2012 par l’European Medecine Agency dans « le traitement symptomatique des urgenturies, de la pollakiurie et/ou de l’IU par urgenturie chez l’adulte présentant une hyperactivité vésicale » et devrait obtenir une AMM française de façon imminente.

Toujours pour l’IU par hyperactivité vésicale, arrive aussi, chez l’homme uniquement, des IPDE-5 dont on découvre, outre leur action classique dans la dysfonction érectile, des effets sur la vessie et la prostate. Sur 5 études pivotales, l’efficacité a été constatée sur l’amélioration de la satisfaction des patients et des symptômes. Pour l’instant, seul le tadalafil dispose d’une AMM dans l’indication « Traitement des signes et symptômes de l’hypertrophie bénigne de prostate (HBP) chez l’homme adulte ».

Le grand espoir de la toxine botulique A

La toxine botulique est aussi dans les startings blocks. En septembre 2012, le Botox a reçu l’AMM en France pour le traitement des patients atteints d'hyperactivité du détrusor conduisant à une IU non contrôlée par anticholinergique. Cette AMM est restreinte à ce jour aux blessés médullaires et patients atteints de SEP. Mais son extension aux vessies non neurologiques ne semble plus qu’une question de mois. « La toxine botulique sera considérée comme un traitement de seconde ligne, après échec des ACH, des b3A et des IPDE-5, prévoit Gilles Karsenty. L’efficacité est prouvée : les symptômes d’IU par urgenturie disparaissent chez une majorité de patients réfractaires aux anticholinergiques (60 % environ), et sont améliorés de façon très sensible chez d’autres. » Sa durée d’efficacité oscille entre 6 et 7 mois. Elle est bien tolérée, en dehors d’un effet secondaire principal, le risque de rétention d’urine, retrouvée chez 5 à 7% des patients selon les études.

« Avec l’arrivée de cet arsenal thérapeutique, on entre dans l’ère de la modulation pharmacologique du besoin urinaire », résume Gilles Karsenty. Un réel espoir car aujourd’hui, sur 100 patients sous anticholinergique, 60 ont arrêté le traitement six mois après pour efficacité insuffisante voire, dans une moindre mesure pour ses effets indésirables.

La chirurgie n’est pas en reste

Dans l’incontinence urinaire d’effort (IUE), associée ou non à une insuffisance sphinctérienne, les bandelettes sous-urétrales se sont imposées en presque 20 ans chez la femme en 1re intention après la kinésithérapie périnéale (satisfaisante dans 50% des cas).

25 000 bandelettes/an en France sont implantées aujourd’hui, chez des patientes aux alentours de la cinquantaine, voire plus jeunes. « Nous constatons une diminution de la moyenne d’âge des patientes, remarque le Dr Adrien Vidart, grâce à une meilleure information des patientes et des professionnels de santé sur leur efficacité – 90% de guérison à 5 ans – mais aussi leur faible morbidité et la facilité d’accès à cette thérapeutique. »

Chez une patiente en échec des bandelettes et qui se plaint de fuites dues à une insuffisance sphinctérienne, l’implantation d’un sphincter artificiel - spécificité française chez la femme - se discute (cf encadré).

Autre méthode montante, la neuro-modulation des racines sacrées est un traitement de seconde ligne de l’hyperactivité vésicale résistante à la kinésithérapie et/ou aux ACH. Cette stimulation électrique périphérique de la vessie par implantation d’une électrode à proximité de la racine sacrée S3 vise à rééquilibrer les besoins mictionnels aussi bien pour les vessies rétentionnistes qu’hyperactives. Les patients, généralement autour de la soixantaine et à 86 % des femmes, sont améliorés dans 80% des cas, avec cependant la possibilité d’une épuisabilité relative de la méthode après 3-4 ans.