La maladie de Lapeyronie donne en général une courbure acquise de la verge, qui touche les hommes à un âge moyen de 55 ans. Elle se traduit classiquement par une déformation progressive de la verge au niveau dorsal (vers le haut) ou dorsolatéral, associée à des douleurs en érection dans deux tiers des cas et fréquemment à une moindre rigidité. Sa prévalence est de 3 à 9 % après l'âge de 50 ans, dont 5 à 10 % de formes gênantes et sévères.
Les rapports sexuels sont difficiles voire impossibles, notamment en raison des douleurs ou du manque de rigidité, mais aussi de son impact psychologique qui peut être très marqué. Un syndrome dépressif est rapporté chez de nombreux patients.
Une fibrose d'origine incertaine
Anatomiquement, il s'agit d'une fibrose des corps caverneux, dont la physiopathologie est incomplètement élucidée. Des microtraumatismes de l'albuginée pourraient être en cause et certains facteurs de risque sont reconnus : la maladie de Dupuytren et la maladie de Ledderhose, le diabète de type 2, les maladies auto-immunes. « Mais souvent aucun de ces facteurs favorisants n'est retrouvé », note le Dr Antoine Faix.
La maladie évolue en deux phases : une phase d'installation, de 6 mois environ, avec une déformation progressive de la verge, et le plus souvent des douleurs et des troubles de l'érection, suivie d'une deuxième phase dite de stabilisation. Elle est caractérisée par la disparition des douleurs, mais si la déformation se stabilise dans deux tiers des cas, elle peut aussi s'améliorer dans 10 à 15 % des cas ou s'aggraver chez 15 à 20 % des patients.
La confirmation du diagnostic se fonde sur la palpation de la verge, car l'échographie comme l'IRM peuvent être normales, surtout au début. « Le patient doit alors être adressé à un urologue », souligne le Dr Faix.
Des thérapies limitées
Les possibilités thérapeutiques étaient jusqu'alors très limitées.
Lors de la phase d'installation, inflammatoire, l'objectif du traitement est de calmer les symptômes en faisant appel aux antalgiques, avec parfois des injections directes dans la zone de fibrose de corticoïdes ou de vérapamil, associées à des tractions de la verge, quotidiennes, ou aux ultrasons. « Tous ces traitements ont une efficacité limitée, et la vitamine E parfois préconisée n'a jamais fait la preuve d’un bénéfice », souligne le Dr Antoine Faix avant de préciser que la prescription d'inhibiteurs de la PDE5 permet d'améliorer la rigidité.
Après 12 à 18 mois d'évolution, lorsque la maladie est stabilisée et que le handicap persiste, la seule possibilité thérapeutique était jusqu'alors chirurgicale. Plusieurs techniques sont possibles : plicature, incision de la plaque avec greffe, parfois pose d'un implant pénien.
Un premier traitement adapté
L'arrivée en décembre 2016 de Xiapex, premier traitement médical ayant une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans la maladie de Lapeyronie, change la donne. Il s'agit d'une collagénase à base de Clostridium histolyticum déjà utilisée dans la maladie de Dupuytren, qui, injectée directement dans la zone de fibrose, est capable de dissoudre les fibres de collagène.
Cet effet se traduit par une amélioration de la déformation de la verge d’en moyenne 20° chez les deux tiers des patients, ce qui peut leur permettre de retrouver une vie sexuelle satisfaisante. Plusieurs injections, répétées à un mois d'intervalle, sont nécessaires, en moyenne 3 ou 4, mais pouvant aller jusqu'à 8. Elles doivent être suivies d'un stretching quotidien de la verge pour favoriser l'efficacité du produit. « De façon générale, plus la plaque est importante, plus elle est calcifiée, moins bonne est l'efficacité du produit. Les meilleurs résultats sont observés en cas de courbure dorsale de 30 à 45°, indique le Dr Faix. Les effets secondaires sont en général minimes, mais très rarement des hématomes ou des ruptures de plaque nécessitant une intervention en urgence ont été décrits. Pour maximiser les chances d’efficacité et minimiser les risques, le geste ne peut être réalisé que dans un environnement médical, par un urologue ayant suivi une formation spécifique validée par l'Association française d'urologie. Une trentaine d'urologues ont suivi cette formation en début d'année ».
Le Xiapex représente donc une nouvelle option dans la maladie de Lapeyronie stabilisée, en alternative à la chirurgie. En cas d'amélioration incomplète, un geste chirurgical reste possible, qui pourrait être facilité. « Les limites de ce nouveau traitement sont les rares cas de complication sévère (0,5 %) et son coût élevé, de plusieurs centaines d'euros par injection, en l’absence de remboursement en France à l’heure actuelle », conclut le Dr Faix.
D'après un entretien avec le Dr Antoine Faix, Montpellier, responsable du comité d'andrologie et de médecine sexuelle de l'Association française d'urologie (AFU)
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