Le prolapsus génital est une situation fréquente, qui concerne de 2,9 à 11,4 % des femmes selon les études et les questionnaires utilisés. Sa prévalence augmente avec l’âge et l’incidence cumulée de la chirurgie atteint 11 % après l’âge de 70 ans. Mais si l’incidence du prolapsus est importante, toutes les femmes ne sont pas symptomatiques.
« De nombreuses femmes viennent consulter en urologie pour une demande de chirurgie du prolapsus alors qu’elles n’ont aucun symptôme Or, il ne faut pas opérer un prolapsus en l’absence de gêne », rappelle le Dr Loïc Lenormand, qui a participé à la rédaction des recommandations sur le prolapsus non récidivé de la femme, réalisée conjointement par plusieurs sociétés savantes d’urologie, gynécologie et proctologie (AFU, CNGOF, SIFFUD-PP, SNFCP et SCGP) et publiées en 2016 (1).
Bien évaluer les symptômes et le retentissement
Comme le rappellent ces recommandations, c’est la gêne exprimée par la patiente qui peut faire indiquer le traitement chirurgical, en sachant qu’il est souvent difficile de faire le lien entre un ou des symptômes et le prolapsus. La seule manifestation spécifique du prolapsus est la présence d’une « boule » extériorisée au niveau du vagin. Les autres signes, dysurie, pesanteur pelvienne, douleurs pelviennes et périnéales ne sont pas spécifiques.
Ainsi, la présence d’une hyperactivité vésicale ne constitue pas une indication chirurgicale, car une fois sur deux le trouble mictionnel persistera malgré la chirurgie du prolapsus.
Autre problème fréquemment rencontré en pratique : les douleurs pelviennes, « qui ne sont en général pas expliquées par le prolapsus, sauf en cas d’élytrocèle, où les douleurs surviennent surtout en fin de journée. Il faut être très prudent, car toute chirurgie sur un terrain d’hypersensibilité pelvienne expose au risque de douleurs persistantes », souligne le Dr Lenormand.
L’incontinence urinaire d’effort (IUE) est, elle, plutôt améliorée par le prolapsus, par une action mécanique de soutènement. « Si le prolapsus n’est pas gênant, il ne faut pas opérer, indique le Dr Lenormand. Et s’il est gênant, il faut discuter l’indication chirurgicale. Il n’est pas toujours nécessaire d’opérer le prolapsus et l’incontinence urinaire dans le même temps. » En effet, un tiers des IUE disparaissent avec la cure isolée du prolapsus. En général, il est préférable de traiter le prolapsus dans un premier temps, puis de réévaluer la symptomatologie après au moins trois mois afin d’éviter de surtraiter. La stratégie est à discuter avec la femme en fonction des symptômes prédominants. La même approche s’applique en cas d’incontinence masquée.
« Tous les signes de dysurie méritent une attention particulière ; le prolapsus peut en être responsable par un effet pelote, mais la dysurie peut aggraver le prolapsus par poussée chronique, précise le Dr Lenormand. Il ne faut donc pas hésiter à réaliser une débitmétrie, voire un bilan urodynamique. »
Privilégier la concertation pluridisciplinaire
En cas de troubles anorectaux, tels qu’une dyschésie anorectale, il n’est pas toujours facile de faire la part entre cause et conséquence du prolapsus. Un avis pluridisciplinaire, impliquant à côté de l’urologue le gastroentérologue ou le coloproctologue, est utile pour évaluer au mieux le trouble fonctionnel. C’est également le cas en présence d’une incontinence anale, qui doit être explorée avant tout geste sur le prolapsus.
Il s’agit des premières recommandations de la prise en charge du prolapsus génital non récidivé de la femme, domaine où il y a peu d’evidence-based medecine. « Nous sommes sur une pathologie à la frontière de plusieurs spécialités, dont la prise en charge relève donc souvent d’une concertation pluridisciplinaire », conclut le Dr Lenormand.
D’après un entretien avec le Dr Loïc Lenormand, CHU, Nantes
(1) J Gynecol Obstet Biol Reprod (Paris). 2016 Dec;45(10):1606-1613
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