Pour le Dr Yannick Guillodo, médecin au pôle locomoteur du CHU de Brest, l’aventure a commencé début 2023 par un appel de Philippe Le Van. Le directeur médical de Paris 2024 était à la recherche d’un médecin avec un « peu de bouteille » et « une connaissance en événementiel sportif ». Habitué aux compétitions de football et gymnastique, le Dr Yannick Guillodo a accepté fin août 2023 de prendre en charge les escrimeurs, soit, au total, 220 athlètes, coachs, maîtres d’armes et professionnels de santé.
L’effectif géré par le medical manager sport se compose de deux équipes médicales pour assurer un suivi tout du long de la journée, avec, au minimum, « trois médecins, un urgentiste, un généraliste, un médecin du sport, assistés d’un kiné, de deux infirmières et six à huit secouristes », tous titulaires. Deux surveillaient le warm-up 1 (endroit où les athlètes font de la cardio), deux le warm-up 2 (pistes d’entraînement) et deux autres les pistes de compétition, sans oublier « un poste de soins à faire pâlir tous les praticiens », avec du matériel de qualité composé d’un échographe, de six boxes, six tables d’examens, et « tout cela au Grand Palais ».
« Deux journées en une »
À cela s’ajoutait une charge élevée de travail, équivalente à « deux journées en une », se remémore le Dr Guillodo. Le staff entamait sa journée dès 6 heures du matin, les volontaires à 8 heures, tandis que les compétitions commençaient à 9 heures. La session du matin fermait à 16 heures. Puis s’intercalait une heure de battement, avant que de nouveaux volontaires arrivent à 17 heures. « Les compétitions recommençaient à 18 heures pour s’achever vers 23 heures ou minuit, mais je ne pouvais pas quitter le Grand Palais tant qu’il y restait encore un athlète. Avec, parfois, le contrôle anti-dopage et les quelques difficultés à uriner des athlètes, j’étais obligé de rester tant que ce n’était pas fini. »
À la différence de sports comme le football, l’escrime obéit à des règles médicales spécifiques. Lors d’un incident, ce n’est pas le médecin d’équipe qui se charge de l’athlète mais le médecin international et le médecin de Paris 2024. « Une fois sur le plateau, Paris 2024 n’est plus rien, tout dépend de la fédération internationale qui est là. Les soigneurs et médecins d’équipe n’ont pas le droit d’être sur le FOP [field of play ou terrain de jeu, NDLR]. » Le matin, sur les quatre pistes d’escrime, étaient présents un médecin du sport, un médecin de la fédération internationale et deux secouristes de chaque côté.
Un « coup de chaud » lors d’un quart de finale
Yannick Guillodo, malgré une veille de JO très anxiogène en raison d’un relatif manque de communication, salue l’engagement des bénévoles. « La veille des compétitions, j’étais très, très anxieux. Je me disais “Merde, est-ce que les bénévoles vont vraiment arriver ?” Mais j’ai eu beaucoup de chance et tout s’est très bien passé. Aucun problème avec la commission du Comité international olympique et l’équipe volontaire a assuré. »
Seul et unique « coup de chaud » : l’arbitrage d’un match en quart de finale Chine-France du tournoi par équipes de fleuret, où la déclaration d’un joueur, inapte, a failli déclencher un incident diplomatique. L'escrimeur chinois s’était blessé et le Dr Yannick Guillodo a alors décelé une commotion cérébrale et décidé d'arrêter le combat. « Comme j'étais un médecin français, on a supputé un conflit d'intérêts. Je me suis mis en retrait. La Fédération internationale d’escrime a pris le relais et le combat a pu reprendre. »
Et, in fine, les fleurettistes français ont gagné le match (45-35), avant de remporter la médaille de bronze en battant les États-Unis (45-32).
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