Enfin ! Selon l’éditorial cosigné par François Bourdillon, directeur général de Santé Publique France, et Norbert Ifrah, président de l’Inca, dans le dernier numéro du BEH*, le dépistage organisé du cancer du col de l’utérus devrait être généralisé à la France entière en 2018. Recommandée dès 2010 par la HAS et inscrite dans le dernier plan cancer, cette généralisation se sera fait attendre. Mais désormais tous les feux semblent au vert.
L’expérimentation menée dans 13 départements pendant 3 ans confirme l’intérêt d’un tel programme organisé pour atteindre les nombreuses femmes échappant au dépistage individuel recommandé depuis plus de 20 ans (un frottis tous les 3 ans entre 25 et 65 ans, après 2 frottis négatifs à un an d'intervalle). Grâce à l’envoi systématique d’invitations, suivi éventuellement d’une relance, aux femmes n’ayant pas eu de frottis depuis 3 ans, le taux de couverture est augmenté de 12 points, pour atteindre 62 %. L’envoi d’un kit d’autoprélèvement pour un test HPV, en cas de non-réponse à la première invitation, permet de faire accéder au dépistage 10 à 15 % de femmes supplémentaires (22,5 contre 11,7 % pour un simple courrier de relance), selon un essai réalisé en Indre et Loire, publié dans le même numéro du BEH.
L’enjeu est très important puisqu’une analyse transversale des données de l’Assurance Maladie indique que 40 % des femmes qui devraient bénéficier d’un dépistage n’ont pas eu de frottis au cours des quatre années écoulées. Il s’agit avant tout des femmes de plus de 50 ans, de milieux socio-économiques défavorisés, résidant dans des zones de faible densité médicale, consultant peu ou en ALD.
L’association du dépistage organisé au dépistage spontané pourrait réduire de 13 % (dépistage spontané plus programme d’invitation-relance des non participantes) à 26 % (idem plus test HPV tous les 5 ans) l’incidence du cancer du col et serait coût efficace, selon une analyse médicoéconomique. Le gain d’espérance de vie que l’on peut en attendre est d’autant plus appréciable que le cancer du col est un cancer de la femme jeune, avec un âge moyen au diagnostic de 51 ans.
Le cancer du col de l’utérus touche encore 3 000 femmes et est responsable de 1 100 décès chaque année en France. C’est l’un des rares cancers dont le pronostic s’est assombri, probablement parce que ce sont les cancers les plus invasifs qui passent entre les mailles du dépistage. Le taux de survie à 5 ans est passé de 68 % en 1989-1991 à 64 % en 2001-2004.
Dans leur éditorial, François Bourdillon et Norbert Ifrah rappellent aussi que le Haut conseil de santé publique recommande de manière conjointe le dépistage et la vaccination des jeunes filles contre le HPV, actuellement marginale. « Des études ont montré que les jeunes filles non vaccinées avaient un profil socio-économique similaire à celui des femmes qui échappent au dépistage », écrivent-ils, avant d’observer que la vaccination HPV en milieu scolaire permettrait « de faire en sorte que les jeunes filles qui demain ne se feront pas dépister puissent bénéficier plus largement de la protection vaccinale ».
*BEH 2-3, 24 janvier 2017
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