Cytologie, test HPV ou vaccination contre le papillomavirus humain… Dans la prise en charge du cancer du col utérin les procédures diffèrent entre les femmes immunodéprimées et la population générale, rappelait le Pr Serge Douvier (CHU de Dijon), à l’occasion du 4e E-congrès de la Société française de colposcopie et de pathologie cervico-vaginale (SFCPCV, 9 janvier 2021).
« En matière de dépistage des lésions de haut grade CIN2 + et des cancers du col utérin, l’immunodépression fait toute la différence car la problématique des femmes immunodéprimées (patientes séropositives HIV, greffées d’organes, de moelle ou de cellules souches, porteuses d’une maladie auto-immune sous immunosuppresseurs ou immunomodulateurs) est la réactivation d’infection HPV latente, la diminution de la clearance virale ainsi que la persistance du virus dans l’organisme de façon prolongée».
Par conséquent, chez elles, la prévalence du portage HPV reste élevée, avec une plus grande fréquence d’infections avec plusieurs types d’HPV différents (2 à 4 fois plus d’infections multiples qu’une population non immunodéprimée) et un risque plus important de lésions bénignes HPV induites, de dysplasies et de cancers du col utérin. Par exemple, en cas de maladie inflammatoire chronique intestinale, la prévalence des lésions CIN2 + et des cancers du col est multipliée par 1,34 ; en cas de greffe d’organe, le risque de cancer du col est doublé et celui de la vulve et du vagin multiplié par 22. En cas d’infection par le VIH, le risque de cancer du col est augmenté de 2 à 22 fois, avec une augmentation des CIN2 +, des VINs (néoplasies intraépithéliales vulvaires) et des cancers qui dépendent du taux de CD4 +. De plus, ces femmes présentent un risque plus important de récidive après traitement qu’une population témoin (environ 3 fois plus). Et de manière générale, toutes les autres pathologies anogénitales HPV sont augmentées (environ 3 à 5 fois plus fréquentes) du fait de l’immunodépression.
Puisque le portage HPV est banal chez les immunodéprimées, « la recherche virale n’est donc pas pertinente dans le cadre du dépistage, au même titre que chez les patientes de moins de 30 ans en population générale, souligne le Pr Douvier. Il est impératif de rechercher les CIN2 + et les cancers car ils sont plus nombreux afin de les traiter, tout en limitant le traitement des lésions malpighiennes intraépithéliales de bas grade qui récidivent fréquemment chez ces femmes. Ainsi, la cytologie reste l’examen de choix, plutôt que le test HPV en dépistage primaire, et une surveillance annuelle doit être instaurée. » Pour rappel, en population générale chez les femmes de plus de 30 ans, le test HPV est préconisé en première ligne et la cytologie n’est pratiquée qu’en cas de test HPV +. Chez les immunodéprimées, quel que soit l’âge (25-65 ans), la recherche virale en premier triage n’a pas d’intérêt. Le dépistage peut débuter dès l’âge de 20 ans chez les HIV + ou les immunodéprimés ayant des condylomes acuminés externes. En cas d’anomalie cytologique, une colposcopie diagnostique doit ensuite être proposée.
La vaccination sans risque pour les immunodéprimés
Quant à la vaccination contre le HPV, les recommandations françaises (rapport Morlat/juillet 2018, HCSP/décembre 2014, calendrier vaccinal mars 2019) rejoignent les guidelines internationales. L’intérêt de la vaccination est certain dans la population des immunodéprimés. Les âges de vaccination varient selon la nature de l'immunodépression : entre 11 et 19 ans pour les personnes HIV +, 9-19 ans en cas de greffe et, en cas de pathologies auto-immunes et de déficit immunitaire, 11-14 ans (rattrapage jusqu’à 19 ans) sauf pour les hommes homosexuels (11-26 ans).
La vaccination est sans risque pour les immunodéprimés, précise Serge Douvier, « avec un bénéfice en particulier si elle est réalisée à l’âge recommandé et surtout avant le statut d’immunosuppression. »
Plusieurs pistes sont à l’étude afin d’améliorer l’immunogénicité, comme une 4e dose ou l’utilisation d’un nouvel adjuvant. « Le suivi du taux d’anticorps est recommandé par plusieurs sociétés savantes à l’étranger afin de permettre une adaptation des doses de rappel vaccinal. Il n’est actuellement pas réalisable en pratique courante en France », regrette Serge Douvier.
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