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Anne Wernet (SNPHARE) : « J'étais loin de m'imaginer qu'on manquerait à ce point de médicaments »

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Publié le 14/04/2020
Covid-19

Covid-19

Quelles leçons peut-on tirer d'une telle crise si une deuxième vague, voire une nouvelle pandémie devait de nouveau se produire ?

L'anticipation du matériel sera un vrai problème à solutionner pour les prochaines crises. D'abord, nous allons sans doute rester ainsi très actifs pendant plusieurs mois tant que nous n'aurons pas l'immunité collective qui monte très lentement (effet collatéral du confinement) ou un vaccin qui va prendre du temps à arriver. En attendant, dans notre service de réanimation, nous aurons un secteur Covid+ et un autre Covid- et cela va s'avérer très lourd à gérer. Sans oublier la survenue possible d'autres pandémies. Notre gros problème que nous ne devons pas reproduire est le manque de matériel. Concernant les ressources en personnels, la réorganisation s'est faite très rapidement en une semaine entre les équipes. L'important est de protéger le personnel, d'avoir du stock de masques, ne pas changer de recommandation en fonction de la pénurie. Côté médicaments, c'est la même chose. J'avais bien pensé au manque de respirateurs, mais j'étais loin d'imaginer qu'on manquerait à ce point de médicaments. Quand on nous a prévenus qu'il ne nous restait que 5 jours de stocks de curare, je suis tombée de ma chaise. Pour éviter de nouvelles pénuries en cas de crise, il faudra sans doute relocaliser la production des médicaments essentiels.

N'y a-t-il pas eu également un manque de personnels ?

Non, cela n'a pas été le cas. Car tout le monde s'est porté volontaire pour faire des heures supplémentaires. Par contre, au début de la crise, nous aurions dû annoncer que tout le monde serait payé en heures supplémentaires, surtout les paramédicaux qui ont une charge de travail très lourde du fait des équipements et de la lourdeur des patients. Rien n'est clair sur ce sujet : les heures supplémentaires iraient peut-être dans leur compte épargne temps. Bref, s'il se produit une nouvelle crise, il faudra d'emblée dédommager ces personnels, sans laisser un flou, comme cela vient de se passer. Ce comportement des administratifs à notre égard montre qu'ils sont complètement déconnectés du soin. En témoigne leur absence sur le terrain des soins depuis le début de la pandémie. Par le passé, au moment de la loi HPST, la tentative de remédicalisation des cadres administratifs en les insérant dans les pôles de soins a été un échec.


Source : lequotidiendumedecin.fr