« Notre objectif était de sauver 20 000 femmes en cinq ans. Nous en avons déjà dépisté 15 000 en un peu plus de trois ans », s'enthousiasme la Pr Claire Mounier-Vehier, cardiologue, chef du Service de médecine vasculaire et hypertension artérielle à l’Institut Cœur Poumon du CHU de Lille, et cofondatrice d’Agir pour le cœur des femmes. 200 femmes meurent chaque jour en France d’une maladie cardiovasculaire. Et pourtant, dans huit cas sur 10, l’entrée dans la maladie peut être évitée grâce à une bonne hygiène de vie et un suivi médical régulier. C’est pourquoi cette médecin, engagée depuis trente ans, a fondé une association et développé un programme pour prévenir les pathologies cardiovasculaires chez la femme. Le bus du cœur a repris sa tournée de 16 étapes entre le 6 mars au le 21 novembre.
L’engagement de la Pr Mounier est ancien : elle se destinait à la gynécologie mais, en raison d’une maladie, l’amblyopie, elle décide de se tourner vers la cardiologie, et plus précisément l'hypertension artérielle. Au détour d’un stage, une rencontre lui permet d’œuvrer dans la cardio-gynécologie. « Très rapidement, reconnaît-elle, la cardio-gynécologie a eu du sens pour moi. D’abord au travers des hypertensions des jeunes femmes, puis de la grossesse et la ménopause, cette rencontre m’a vite fait prendre le chemin des maternités pour m’occuper des pré-éclampsies au moment où l’on commençait tout juste à comprendre ce que c’était ».
Inspirée par le programme de Go Red For Women de la Pr Lori Mosca, directrice de la cardiologie préventive au New York Presbyterian Hospital, la Pr Mounier-Vehier crée en 2012 le premier parcours de soins français en cardio-gynécologie : Cœur Artères Femmes. En 2020, elle fonde Agir pour le Cœur des Femmes (ACF) avec Thierry Drilhon, dirigeant et administrateur d’entreprises. Ensemble ils se donnent trois missions : alerter, anticiper et agir.
À chaque étape, 120 professionnels de santé mobilisés
Chaque étape du bus du cœur mobilise 120 professionnels de santé pendant trois jours dans une ville. À chaque fois, 120 femmes sont dépistées quotidiennement. « C’est un gros travail en amont avec les sociétés savantes de cardiologie, de médecine vasculaire, de gynécologie-psychiatrique, et le groupe de ménopause GEMVI. Nous travaillons également avec les conseils de l'Ordre des sages-femmes, les conseils des Ordres médicaux locaux. Nous construisons des plannings de professionnels de santé comme des plannings de gardes où les médecins, infirmiers et paramédicaux viennent par demi-journée. Et, pour cela, nous nous appuyons sur le centre hospitalier de la ville ou le centre hospitalier universitaire », développe la Pr Mounier-Vehier. Le bus a pour vocation de mettre un coup de projecteur sur la santé cardio-gynécologique dans un territoire.
90 % des femmes dépistées présentent au moins deux facteurs de risque cardiovasculaires traditionnels, hypertension essentiellement, obésité, stress, tabac, cholestérol par exemple. 49 % possèdent deux facteurs de risque obstétricaux et gynécologiques, un antécédent de pré-éclampsie, être ménopausée, avoir eu un cancer du sein avec chimiothérapie et un diabète gestationnel par exemple. La moitié présente deux facteurs de risques cardiovasculaires et deux facteurs de risque obstétricaux et gynécologiques. De plus, 40 % des femmes ne sont pas à jour dans leur mammographie et dans leur suivi gynécologique. Seul 20 %, à haut risque cardiovasculaire, ont déjà consulté un cardiologue. « Notre intervention n’est pas du luxe », observe la professeure.
Chaque femme est formée aux gestes de l'auto-mesure afin qu’elle reparte avec un tensiomètre. L’Assurance-maladie prend part à l’aventure et met à jour les droits des patientes. « Par exemple, une femme qui n'a jamais fait sa mammographie est remise dans le circuit de dépistage. En l’absence de médecin traitant, nous lui en trouvons un », explique la Pr Mounier. Cette année l’aventure a commencé cette semaine à Cannes.
Une maison médicale mobile
Le Bus du cœur des femmes propose un dépistage gratuit en 10 étapes pendant trois jours. La consultation est entièrement gratuite, sur inscription auprès des services de la mairie de la ville d’accueil, avec le soutien de l’Assurance-maladie. Le bus se compose d’une maison médicale mobile climatisée pourvue de sept médecins, d’une maison d’explorations mobiles dans laquelle sont réalisés les électrocardiogrammes et les dopplers. « Nous effectuons les prélèvements biologiques au bout du doigt, le bilan sanguin, lipidique, glucidique, le rein, la créatine, vérifions le poids, la taille et menons les entretiens gynécologiques », détaille la Pr Claire Mounier-Vehier.
Un Village bien-être et santé est en accès libre pour tous, constitué de nombreux stands conseils avec des professionnels de santé : hygiène de vie (alimentation, activité physique, tabac), bien-être (sophrologie, esthétique, parole), médical, planning familial, gestes qui sauvent et associations partenaires.
Un suivi est organisé par les partenaires locaux, en recontactant les femmes qui l’ont souhaité, après leur dépistage dans le bus.
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