Alors que les thérapies par CAR-T cells ciblant GD2 suscitent un intérêt croissant dans le traitement du neuroblastome chez l’enfant, l’Académie nationale de médecine (ANM) a émis des recommandations pour soutenir leur développement.
Le neuroblastome est la tumeur maligne solide extra-crânienne la plus fréquente du jeune enfant et représente environ 15 % des décès liés au cancer en pédiatrie. Si les avancées thérapeutiques de ces dernières années, notamment en immunothérapie, ont profité aux patients atteints de neuroblastome, les formes à haut risque et réfractaires nécessitent de nouvelles stratégies thérapeutiques.
Ainsi, les CAR-T cells ciblant l’antigène GD2 – un glycolipide abondamment exprimé à la surface des cellules tumorales du neuroblastome et faiblement par les tissus normaux – retiennent l’attention. L’immunothérapie par anticorps anti-GD2 a en effet déjà fait ses preuves en association avec la chimiothérapie en première et seconde lignes de traitement des neuroblastomes réfractaires ou en récidive.
De plus, des résultats d’un essai de phase 2 sur des CAR-T GD2, par une équipe de l’hôpital Bambino Gesù à Rome (Italie), ont montré une survie globale à 3 ans de 60 % et une survie sans progression de 36 % dans le neuroblastome réfractaire ou en récidive. Cette même équipe coordonnera un nouvel essai clinique international évaluant les CAR-T GD2 dans le neuroblastome qui sera lancé début 2026 et auquel participera la France avec l’institut Gustave Roussy, comme promoteur.
Retard de la France dans la production institutionnelle de CAR-T
Cependant, « de nombreux obstacles limitent encore le développement des thérapies cellulaires ciblant GD2 », écrit l’ANM dans son communiqué. Si certains sont liés directement à la tumeur comme l’influence du micro-environnement tissulaire immunosuppressif du neuroblastome ou encore l’expression hétérogène de GD2 par les cellules tumorales, influant ainsi sur l’efficacité du traitement, d’autres sont de nature industrielle comme les contraintes liées à la production (extemporanée, spécifique à chaque patient, coût élevé) et la faible incidence des cancers pédiatriques limitant le retour sur investissement et l’attractivité pour les fabricants.
L’Académie recommande ainsi de poursuivre et d’accentuer l’aide à l’innovation et à la recherche dans le domaine de la thérapie cellulaire, en préservant la spécificité des approches en pédiatrie. L’institution appelle à développer une capacité de production de thérapie cellulaire et, compte tenu des enjeux financiers des thérapies par CAR-T, selon « un modèle de partenariat des recherches publiques et industrielles ». L’Académie appelle à modifier le cadre législatif européen pour faciliter la mise à disposition progressive de médicaments de thérapie innovante (MTI).
Ces recommandations font écho aux conclusions d’un rapport publié en 2023 par l’ANM exposant l’intérêt pour la France d’investir dans les thérapies par CAR-T cells. Si la France imprime un retard dans la production institutionnelle, elle compte déjà tout de même quelques centres, comme celui de Lille (Carla-M19), Lyon (Artemis) ou encore Paris (Meary), qui développent des projets de production de CAR-T cells académiques.
Miser plus vastement dans les thérapies cellulaires pour les cancers solides
Les recommandations de la rue Bonaparte ne s’arrêtent pas aux CAR-T GD2. En effet, l’ANM invite plus largement à investir dans les thérapies cellulaires dans le traitement des tumeurs solides de l’enfant et de l’adulte. Dans un communiqué, l’institution rappelle que l’arrivée des immunothérapies par thérapies cellulaires – comme les lymphocytes T infiltrant les tumeurs (TILs), les lymphocytes T transferts par des récepteurs des cellules T (TCR) ou encore les CAR-T cells – a permis d’obtenir des résultats significatifs dans les tumeurs solides, par exemple dans le mélanome métastatique avec les TILs, ou bien dans les sarcomes, les cancers de l’ovaire, de la tête et du cou avec les TCR. Cependant, ces traitements étant eux aussi caractérisés « par la complexité de leur fabrication impliquant des procédés de nature industrielle et une adaptation individuelle de chaque préparation », « il en résulte des coûts de fabrication très importants à l'origine de dépenses difficilement soutenables pour les organismes de protection sociale ».
Face à cette situation, la société savante recommande que ces traitements soient rendus disponibles à un prix accessible aux patients ayant un cancer solide, et que soit élaboré un modèle de partenariat universitaire et industriel pour la production de ces médicaments. À ces fins, elle suggère de développer, en France, les structures de production de médicaments de thérapies innovantes (MTI), s’appuyant sur des expériences à l'étranger ayant montré une limitation des coûts grâce à la concurrence vis-à-vis des industriels. Pour l’Académie, « un développement de cette production publique s’avère dès maintenant nécessaire ».
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