La création d'un numéro unique d'appel d'urgence relève d'« une vision passéiste, archaïque et dangereuse ». Ce mercredi, le Dr François Braun, président de SAMU-Urgences de France (SUDF) n'a pas mâché ses mots au moment d'évoquer la proposition de loi du député Fabien Matras (LREM) qui sera débattue dans la soirée à l'Assemblée nationale.
Le texte, adopté le 12 mai en commission, prévoit d'expérimenter un « numéro unique d'appel » d'urgence regroupant la police (17), les pompiers (18) et le SAMU (15). Opposés de longue date à cette solution, les urgentistes ne masquent pas leur colère. « L'ensemble du monde hospitalier est furieux », pose clairement le Dr François Braun.
Solution simpliste
Avec 31 millions d'appels par an, soit 70 % du total des appels d'urgence, le patron de SUDF insiste sur la perte de chance pour les patients et la « dégradation des soins » que représenterait une fusion des opérateurs entre sécurité civile et médicale. « Cela reviendrait en quelque sorte à prendre en otage la santé de nos concitoyens pour des luttes dogmatiques », va jusqu'à lâcher le chef des urgences du CHR de Metz-Thionville.
« Ça paraît plus simple mais c'est simpliste ! », résume de son côté le Pr Pierre Carli, président du Conseil national de l'urgence hospitalière (CNUH). Pour lui aussi, le mélange des genres est synonyme de « perte de temps » et donc de « danger » pour les patients. « On va tout mélanger dans un grand panier : un trouble à l'ordre public, l'attaque d'une banque, une panne sur l'autoroute ou un incendie mais aussi la douleur thoracique d'un infarctus du myocarde ou d'autres problèmes de santé moins urgents », illustre par l'absurde le chef du SAMU de Paris.
Un numéro commun santé
Selon le PU-PH, une solution sur le modèle du « 112 » multiplierait par trois le temps d'accès à un médecin. Or, « on sait très bien aujourd'hui que l'appel qui touche à la santé, plus vite il est pris en charge par un professionnel de santé puis un médecin mieux c'est pour le patient ».
À un numéro unique, les professionnels hospitaliers préfèrent l'idée d'un « numéro commun » santé. Avec le déploiement en cours du Service d'accès aux soins (SAS), expérimenté depuis janvier dans 22 territoires pilotes, ils plaident pour l'instauration du « 113 ». Ce dernier permettrait non seulement une prise en charge plus rapide des urgences médicales mais aussi une meilleure orientation des patients au sein du système de santé. « Le numéro commun permettra de proposer des parcours de soins », veut croire le Pr Pierre Carli.
Problème de méthode
En dehors du fond, la manière dont est proposée cette mesure déplaît aux différents responsables. « Cette clarification n'est pas appropriée et trop hâtive », estime Frédéric Valletoux le président de la Fédération hospitalière de France (FHF) qui tance un « problème de méthode ».
Le maire de Fontainebleau s'étonne que les débats aient été centrés autour du ministère de l'Intérieur, alors même que « la problématique des numéros de secours est d'abord une problématique de santé ». « Que le ministre de la Santé, les professionnels et les organisations des urgences n'aient pas été consultés, nous interroge sur le plan démocratique voire politique », souligne Frédéric Valletoux. « On prend le sujet de la plus mauvaise des manières, on risque de défaire ce qui existe et qui fonctionne et on prend le risque de nous empêcher collectivement de progresser main dans la main », met en garde l'élu.
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