C'est la première fois qu'en Belgique, l'ouverture aux mineurs de l'euthanasie, votée en 2014, se traduit dans les faits : un mineur de 17 ans atteint d'une maladie incurable a été euthanasié à sa demande, a révélé à la presse ce samedi 17 septembre le Pr Wim Distelmans, président de la commission euthanasie.
Le jeune homme « s'approchait de la majorité ». Un rapport sera fait « d'ici peu », conformément à la loi, a déclaré à l'AFP Jacqueline Herremans, membre de la commission fédérale de contrôle et de l'évaluation de l'euthanasie. Cette commission doit vérifier que l'acte a été exécuté dans les règles redéfinies en février 2014 (sans faire consensus chez les pédiatres et la hiérarchie catholique) : le mineur doit « se trouver dans une situation médicale sans issue entraînant le décès à brève échéance, être confronté à une souffrance physique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable ». Contrairement aux adultes, sous le coup de la loi de 2002 en Belgique, les mineurs ne peuvent faire valoir des « souffrances psychiques ».
Pas de limite d'âge
Le législateur belge n'a pas fixé de limite d'âge, contrairement aux Pays-Bas (12 ans), et a opté pour la formule : « En capacité de discernement ». Le mineur doit prendre l'initiative de la demande, qui est étudiée par une équipe médicale et un psychiatre ou psychologue indépendant. Les parents doivent donner leur consentement.
« Il n'y a heureusement que très peu d'enfants qui rentrent dans ces critères, mais cela ne signifie pas que nous devrions leur refuser le droit à une mort digne », a déclaré le Pr Distelmans, commentant le cas présent. Selon Jacqueline Herremans, depuis le vote de la loi en 2014, il y avait eu des demandes d'euthanasie de la part de mineurs, mais aucune n'avait abouti. La présidente de l'association belge pour le droit de mourir dans la dignité évoque un processus « très contrôlé, souvent très long, et particulièrement douloureux » quand il s'agit de mineurs.
Chez les adultes, une augmentation des euthanasies depuis 2002
Le nombre de cas d'euthanasie a augmenté chaque année, de 235 en 2003 (soit 0,2 % des décès), jusqu'à 1 807 (1,7 % des décès) en 2013, rapporte une étude publiée dans le Canadian medical association journal (CMAJ), à partir des chiffres de la commission fédérale. Le registre recense au total 8 752 euthanasies.
Sont surtout concernés les personnes âgées de moins de 80 ans et les cancéreux, à domicile, plutôt qu'à l'hôpital. Néanmoins, d'autres catégories de populations sont de plus en plus concernées : les plus de 80 ans (35 % des euthanasies en 2013 les impliquaient, contre 17 % en 2003), les résidents de maisons de retraite (de 5 % à 12 %), des personnes malades d'une autre pathologie que le cancer (de 16 % à 31 %), et ceux – notamment dans les Flandres – qui ne sont pas en phase terminale. Près de 4 % des cas d'euthanasie en 2013 concernaient des individus souffrant d'un trouble psychiatrique, contre 0,8 % en 2005.
La proportion d'euthanasie diminue chez les 18-59 ans (34 % des cas les concernaient en 2003, contre 16 % en 2013), les patients hospitalisés (de 52 % à 43 %), les cancéreux (84 % à 69 %), ou les personnes dont le pronostic vital est engagé à très court terme (92 % à 85 %).
L'étude montre qu'en guise de second avis, c'est un généraliste, plus qu'un spécialiste qui est appelé. Le recours (facultatif) à un troisième avis tend à diminuer, tandis que la présence d'une équipe de soins palliatifs se fait plus fréquente.
Meilleure acceptation sociale en Belgique… flamande
La plupart des euthanasies concernent la population néerlandaise de Belgique, dans les Flandres (entre 80 et 87 % des cas annuels). La population francophone (majoritairement en Wallonie) se caractérise par un pronostic vital engagé. « Ces différences suggèrent que la législation sur l'euthanasie n'a pas de conséquences automatiques sur les pratiques des médecins quant à la fin de vie, qui relèvent davantage du contexte social et culturel », écrivent Sigrid Dierickx et coll.
Selon les auteurs, ces chiffres suggèrent une meilleure connaissance des possibilités ouvertes par la loi, et une moindre réticence à l'égard de l'euthanasie, au fur et à mesure que les médecins deviennent plus expérimentés et la société plus familière, notamment dans les Flandres où les rôles du Life End Information Forum, des soins palliatifs, et des médias semblent significatifs. Ils réfutent l'hypothèse selon laquelle des groupes vulnérables seraient soumis à un choix contraint.
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