Une direction d'hôpital qui se met en travers du chemin d'un chirurgien et de son patient, pour l'empêcher d'opérer… La scène est surréaliste. Elle s'est pourtant jouée début juin dans l'antichambre d'un bloc opératoire du centre hospitalier de Bagnols-sur-Cèze, dans le Gard. Jeune urologue, le Dr David Girier est habillé en vert et s'apprête à opérer un patient paraplégique quand il s'aperçoit que du matériel médical lui a été subtilisé. Le fait d'un voleur ? Non, celui de la direction même de l'hôpital à en croire le témoignage du chirurgien dans les colonnes de « Midi Libre ».
« L'anesthésiste tirait le lit pour m'emmener au bloc et un cadre de direction tentait de l'en empêcher en mettant son pied devant la roulette », a pour sa part témoigné le patient que le Dr Girier a depuis adressé à un confrère nîmois… du secteur privé.
Pris en étau
Il semble que l'urologue se trouve pris en étau entre le centre hospitalier et la clinique ambulatoire de la Cèze, du groupe Clinipôle, en conflit. « Dans le cadre du partenariat public-privé [un GCS, NDLR], la clinique ambulatoire de la Cèze n'honore plus, et ce depuis plusieurs mois, ses obligations financières (rémunération des professionnels et coûts de fonctionnement) au regard de l'exercice de son activité de chirurgie ambulatoire dans les locaux du centre hospitalier, alors qu'elle poursuit l'encaissement des recettes de son activité », avance l'hôpital dans un communiqué.
« Ce motif nous paraît tellement fallacieux que nous avons décidé, malgré ce différend qui nous oppose sur la répartition de ces charges, de régler la somme réclamée par le centre hospitalier tout en sollicitant l'agence régionale de santé pour une médiation, car nous contestons toujours le montant que nous avons pourtant réglé », explique pour sa part Serge Constantin, le président-fondateur de Clinipôle (six cliniques). Il complète : « Nous avions, à l'origine, constitué ce GCS pour permettre l'installation de jeunes médecins. Le Dr Girier est le premier urologue à s'installer en libéral à Bagnols-sur-Cèze. Le début d'un pari est gagné. Nous avons du mal à penser que le différend qui nous oppose sur ces répartitions de charges soit le véritable problème », poursuit-il.
L'Ordre s'en mèle
Pour un observateur du dossier, qui souhaite rester anonyme, la raison invoquée par l'hôpital « ne paraît pas crédible. Il y a faute de tous les côtés. L'ARS n'aurait pas dû laisser la situation pourrir. La clinique n'aurait pas dû envoyer le médecin opérer alors que pesait sur lieu une menace d'interdiction d'accès au bloc, et l'hôpital n'aurait pas dû agir ainsi. On ne fait pas remonter en chambre un patient pour une question administrative… Où est l'éthique ? Sans doute le centre hospitalier ne voit pas d'un bon œil qu'une activité privée puisse réaliser certains actes que le public était jusqu'ici seul à assurer », suppose-t-il. À noter également qu'avant d'exercer en clinique, le Dr Girier était salarié… de l'hôpital de Bagnols-sur-Cèze.
L'ARS Occitanie confirme au « Quotidien » qu'une « médiation privilégiant les échanges directs dans la perspective de rapprocher les deux parties sera organisée dans les semaines à venir. » Reste qu'au milieu de ces bisbilles administratives et financières, un patient a été refusé au bloc.
Contacté, le chirurgien stoppé en plein bloc n'a pas souhaité s'exprimer car la publication de l'article du « Midi Libre » a entraîné sa citation devant le conseil départemental de l'Ordre.
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