« Je ne savais pas que le renoncement aux soins était aussi fort », reconnaît Christian Fatoux, directeur de la caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) du Gard. Son regard a changé en travaillant sur une expérimentation locale. Tout commence fin 2012, lorsqu’une micro-enquête s’intéresse à 24 assurés ayant sollicité l’assurance-maladie pour des aides financières en vue de soins dentaires, avant de renoncer finalement à ces soins. « Ce sont des gens ordinaires, socialement insérés, qui pour la plupart ont une complémentaire santé. Mais ils sont face à un reste à charge trop important et leur reste à vivre est très bas », explique Christian Fatoux.
Guider, expliquer
En octobre 2013, un diagnostic est lancé à l’échelle départementale puis régionale. Le taux de renoncement aux soins avoisine les 35 % dans les départements étudiés. Les raisons invoquées du non-recours aux soins sont d’abord financières.
Mais il ressort également un déficit majeur d’orientation, d’explication et d’accompagnement de la part des professionnels de santé et des institutions (dont l’assurance-maladie). Un problème de « guidance » pour détecter le renoncement aux soins et le traiter au cas par cas, résume le directeur.
Face à ce constat, la CPAM du Gard élabore en novembre 2014 une plateforme d’intervention pour l’accès aux soins et à la santé (PFIDASS), gérée par 6 personnes. Il s’agit notamment de guider les professionnels dans le processus de repérage des situations de renoncement aux soins. Les agents expliquent et ouvrent les droits nécessaires, aident au choix d’une complémentaire. Plus de 750 saisines ont été recensées, toutes ont eu une réponse d’ordre financière (55 %) ou de suivi personnalisé pendant 3 mois. « Les assurés disent avoir retrouvé leur fierté » se réjouit le directeur de la CPAM.
Cousu main
Le patron de la CNAM Nicolas Revel a salué cette expérimentation locale, lors des dernières journées scientifiques de l’assurance-maladie en décembre 2015. Il a affiché sa volonté de déployer cette plate-forme dans 10 à 20 CPAM. « D’une logique de guichet et de vérification des droits, on passe à de l’accompagnement et du cousu main pour chaque assuré », souligne-t-il. « Il ne suffit pas de créer des dispositifs nationaux pour qu’ils soient utilisés. On a besoin d’actions locales », insiste Nicolas Revel.
La lutte contre le renoncement aux soins s’inscrit dans une stratégie gouvernementale. Le directeur de la CNAM mise sur la nouvelle protection universelle maladie (qui vise à éviter les ruptures de droit), le développement de la CMU-C et de l’ACS, ou encore sur la généralisation par étapes du tiers payant. Et Marisol Touraine a déjà souhaité que les prochaines négociations conventionnelles amplifient les résultats en matière de maîtrise des dépassements d’honoraires (lire page 4).
Nicolas Revel entend enfin renforcer la prévention en améliorant l’efficacité des programmes comme Sophia ou « MT dents ». « Nous devons assumer de cibler nos interventions vers les personnes les plus à l’écart des soins », précise le directeur, prônant un modèle « d’universalisme proportionné ».
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