LA PUBLICATION PAR LA CNAM des statistiques sur les dépassements tarifaires pour les praticiens exerçant en secteur II, assorties d’un appel pressant de Frédéric van Roekeghem, patron de l’assurance-maladie, pour la mise en place du secteur optionnel, a provoqué des réactions contrastées dans le monde médical.
• Les médecins piqués au vif
La sortie de cette étude, en pleine négociation conventionnelle, n’est pas anodine, juge le Dr Jean-Paul Hamon, patron de la FMF, pour qui « avant chaque négociation, la CNAM ressort ses vieilles recettes sur les dépassements d’honoraires ou les refus d’accès aux soins. La FMF souligne que le taux de remboursement d’une appendicite (197 euros) ou de la pose d’une prothèse de hanche (400 euros), n’a pas évolué depuis 1990. « Mais ce sont les chirurgiens que la CNAM livre à la meute comme des irresponsables assoiffés d’argent », conclut le communiqué.
À l’UMESPE - la branche spécialiste de la CSMF - le Dr Jean-Fançois Rey renvoie la balle à la CNAM, affirmant que « l’assurance-maladie est responsable de l’augmentation des compléments d’honoraires des médecins de secteur II du fait des insuffisances tarifaires ». L’UMESPE appelle à l’ouverture d’un secteur optionnel « pour tous les médecins spécialistes libéraux », et non pas réservé aux seules spécialités de plateaux techniques. De son côté, le Dr Michel Chassang, président de la CSMF, se dit d’accord pour négocier un accord sur la « base perfectible » du secteur optionnel mais rappelle que « les vrais dépassements d’honoraires sont à l’hôpital public ».
Au SYNGOF (Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France), le Dr Jean Marty revient sur pourcentages de dépassement concernant les chirurgiens et les obstétriciens. « Ils peuvent paraître médiatiquement sensibles », indique-t-il. Mais « il conviendrait de leur rapprocher les BNC (bénéfices non commerciaux) moyens annuels des secteurs I », soit 86 925 euros pour un chirurgien et 72 296 euros pour un obstétricien. « Ces chiffres sont tous deux inférieurs aux BNC des biologistes (157 744 euros), des radiologues (123 227 euros), et des cardiologues (104 447 euros) », avance le SYNGOF pour qui les compléments d’honoraires « restent donc le seul moyen » pour les chirurgiens et les obstétriciens de maintenir leur revenu à un niveau correct.
• Les cliniques se défendent
La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) rappelle que « sur la totalité des 2,5 milliards d’euros d’honoraires de dépassements, moins de 20 % sont réalisés lors d’actes et de soins pratiqués dans les cliniques et hôpitaux privés », le reste relevant « de la médecine de ville et des hôpitaux publics ». Jean-Loup Durousset, président de la FHP, relève que « les pouvoirs publics et les parlementaires oublient souvent que les dépassements ont évité à la Sécurité sociale d’aborder de front le problème de la rémunération des médecins ».
• Les mutuelles contre la « banalisation »
Pour Étienne Caniard, président de la Mutualité Française, les chiffres avancés par l’assurance-maladie « confirment l’inquiétude manifestée par la Mutualité devant l’explosion du nombre et du volume de ces dépassements qui remettent en cause l’accès aux soins ». Rejetant la « banalisation » des dépassements qui « modifie la nature même de notre protection sociale », Étienne Caniard juge « urgent de mettre fin à cette situation et de revenir à une forme d’opposabilité régime obligatoire-régime complémentaire pour réduire le reste à charge du patient ».
• Les usagers réclament de la transparence
Au nom des associations de patients, le CISS (Collectif interassociatif sur la santé) constate que la maîtrise des dépassements « reste toujours à résoudre », et envisage deux scénarios. Première option : la création du secteur optionnel sous réserve que le système n’aboutisse pas à… la généralisation des dépassements. Autre option : « une politique de remboursement des complémentaires plus favorable aux adhérents qui acceptent d’être pris en charge par des professionnels de santé conventionnés avec elles, comme le prévoit la proposition de loi Fourcade ». LE CISS note que les travaux parlementaires offrent au moins « l’avantage d’être publics, transparents et contradictoires », alors qu’il juge les travaux conventionnels « secrets, opaques et seulement bilatéraux ».
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