Par le Dr JACQUES GAILLAT*
1) Pourquoi les recommandations de 2002 évoluent vers des recommandations générales ?
EN 2002, les recommandations de prévention vaccinale des infections invasives à méningocoque (IIM) avec le vaccin conjugué méningite C monovalent se limitaient aux populations particulièrement à risque dans la mesure où l’incidence annuelle était faible : 0,49/100 000. Bien que l’incidence des IIM à méningocoque C ait baissé (0,26/100 00 en 2008), le HCSP a reconsidéré sa position (sessions d’avril et juin 2009) sachant que le méningocoque C ne concerne qu’environ un tiers des cas d’IMM, loin derrière le méningocoque B.
L’expérience de la vaccination dans neuf autres pays européens :
- réduction de l’incidence de façon considérable. En Grande-Bretagne les autorités de santé ont introduit la vaccination de routine à raison de 3 doses à 2,3 et 4 mois par le vaccin conjugué avec rattrapage jusqu’à l’âge de 25 ans de telle sorte qu’en 2002 le taux de couverture était de 85 % dans toute la population concernée permettant ensuite de se limiter à la vaccination des petits nourrissons. Le nombre de cas annuels passait de 2 500 en 1998 à 27 en 2007 (1) ;
- pas d’émergence patente de clones sous la pression de sélection induite par la vaccination de masse.
Trois arguments principaux sont avancés pour recommander largement la vaccination (2) :
- la France est passée au premier rang en Europe ;
- des épisodes de haute incidence dans différentes régions françaises ont nécessité la mise en uvre de vaccination générale de la population ;
- l’émergence d’un clone particulièrement agressif (complexe clonal ST-11) caractérisés par une mortalité plus importante, un décalage de l’âge de survenue vers les tranches plus âgées même si les moins de 1 an sont les plus exposés mais de façon moins évidente que pour les autres sérogroupes de méningocoque, et, enfin, une plus forte propension à provoquer des cas groupés avec ce sérogroupe en particulier.
2) Pourquoi cibler la vaccination aux grands nourrissons alors que c’est chez les moins de 1 an que l’incidence annuelle est la plus forte ?
Des pays tels que le Québec, l’Espagne ou le Royaume Uni ont opté pour la vaccination avant 1 an, les Pays-Bas pour les 1-2 ans avec une seule dose au lieu de trois doses et, malgré tout, avec des résultats similaires. L’étendue des résultats s’expliquerait essentiellement par le taux de couverture élevé et par l’immunité de groupe obtenue en vaccinant en rattrapage jusqu’à 24 ans, en particulier les adolescents.
Les simulations sur des modèles médico-économiques ont montré que ce schéma était efficace d’autant qu’une injection de rappel est effectuée à 12 ans. En France, l’incidence annuelle se stabiliserait à 40 cas, soit environ 10 fois moins que le nombre actuel.
3) Pourquoi un rattrapage jusqu’à l’âge de 24 ans ?
La vaccination dite de rattrapage permet de réduire le nombre de cas et de limiter la circulation du méningocoque C. Elle a un double effet : protéger cette tranche de population et protéger les plus petits qui ne sont pas vaccinés car moins exposée. L’extension à 24 ans au lieu de 19 est justifiée par un gain supplémentaire de la réduction d’incidence par rapport à un rattrapage à 19 ans pendant les 10 et 20 premières années mais pas au-delà.
Les coûts sont singulièrement réduits avec une seule dose de primovaccination.
4) Quelles sont les garanties du succès d’une telle politique ?
L’obtention rapide d’une couverture vaccinale élevée est nécessaire pour avoir un impact conséquent en termes d’immunité de groupe indispensable pour la bonne efficacité du programme. Ce programme permet d’avoir à la fois un bénéfice individuel mais aussi une protection de la population dans son ensemble.
Il doit faire l’objet d’une surveillance pour être adapté en particulier sur l’indication d’une injection de rappel comme cela a été proposé par les autorités britanniques en raison d’un déclin rapide des anticorps dès l’âge de 1 an. Un rappel à 12 ans sera peut-être nécessaire.
En conclusion, les programmes de vaccinations comme celui du méningocoque C montre bien la convergence entre des données épidémiologiques, des études médico-économiques et l’évolution du concept vaccinal en incluant la notion de défense du groupe comme élément clef de sa réussite. Ces schémas ne sont pas immuables et doivent s’adapter au fur et à mesure de l’évolution de l’épidémiologie. Néanmoins, différentes questions seront à aborder. Peut-on faire une vaccination par le vaccin conjugué C chez des personnes dans la population de rattrapage (› 2 ans et < 24 ans) ayant reçu antérieurement un vaccin polysaccharidique et dans quels délais en raison de l’hyporéponse induite par le vaccin polysaccharidique ? Quel est l’avenir du vaccin conjugué tétravalent A,C,W135,Y recommandé depuis 2004 aux États-Unis en fonction de l’évolution des sérogroupes ?
Récemment, une étude réalisée aux États-Unis avec un vaccin conjugué trivalent Hib/méningocoque C&Y administré en même temps que le vaccin conjugué pneumocoque et le pentavalent diphtérie, coqueluche acellulaire, tétanos, hépatite B et polio inactivé entraînait une bonne séroprotection (1).
*Service des maladies infectieuses, centre hospitalier d’Annecy.
(1) Groupe avancées vaccinales. Quoi de neuf en matière de vaccination ? Med mal Inf 2009 ; 39 : 212-24.
(2) HCSP session avril et juin 2009.
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