Avec 224 essais de thérapie génique initiés au cours des six dernières années, la France se situe au deuxième rang européen en termes de recherche dans le domaine des maladies rares, selon les chiffres issus du panorama 2023 d'OrphanDev, dévoilés à l'occasion de la journée mondiale des maladies rares. Selon cette initiative collaborative issue du réseau F-Crin (réseau français des infrastructures de recherche clinique), la France se situe ainsi entre le Royaume-Uni et l'Italie. Toutefois, « les centres d'études français pourraient perdre leur attractivité », prophétisent les auteurs.
Dans le détail, l'oncologie rare concentre le plus d'essais cliniques (67), en particulier dans les leucémies, les myélomes et les lymphomes. Viennent ensuite les pathologies sanguines et lymphatiques (44), puis les maladies nutritionnelles et métaboliques (40), les troubles du système nerveux (35), les maladies ophtalmiques (22), les troubles du système immunitaire (7), les troubles musculosquelettiques (6) et les maladies du tissu conjonctif (3).
Les pathologies dans lesquelles les essais sont les plus avancés sont les maladies hémorragiques, en particulier l'hémophilie, les maladies métaboliques, les maladies neuromusculaires et les neuropathies (notamment l'amyotrophie spinale).
Un financement privé… et américain
Le réseau F-Crin dresse également deux constats. Le premier : seulement 20 essais sur 224 sont financés par des fonds français. Les États-Unis représentent le premier pays financeur des essais de thérapie génique qui se déroulent en France, avec 119 essais financés. En outre, la grande majorité des essais est financée par des entreprises. La France a un financement public relativement important : si on se base sur la base de données EudraCT de l'Union européenne, les essais de promotion académique, initiés par des hôpitaux et financés par des subventions publiques, ne représentent que 5 % des essais en Europe contre 10 % en France. En Asie, les essais de thérapie génique dans les maladies rares seraient majoritairement financés par des fonds publics.
« Les phases 3, beaucoup plus coûteuses, mais partiellement dé-risquées sont conduites majoritairement par des entreprises. Ainsi, la part de l'impact de la recherche académique dans l'origine des thérapies géniques pourrait être plus importante que le nombre d'essais promus par les promoteurs académiques », est-il nuancé dans le panorama.
Les auteurs craignent qu'à l'avenir, les centres investigateurs français ne soient handicapés par leur faible capacité à recruter rapidement des patients et par les délais d'obtention des autorisations délivrées par l'Agence du médicament (ANSM) après avis d'un comité de protection des personnes.
S'inspirer de l'expérience en cancérologie
Concernant les demandes d’autorisation d’essais cliniques, un portail unique européen vient d'être mis en place, et, depuis 2020, les délais d'instruction des dossiers par l'ANSM sont au maximum de 40 ou 25 jours pour les traitements innovants selon le type d'étude. Des efforts salués par F-Crin, qui rappelle toutefois que les délais restent, en France, supérieurs à ceux qui ont cours en Espagne, en Belgique et aux Pays Bas.
Pour éviter à la France d'être rétrogradée, le réseau F-Crin propose d'améliorer la structuration de la recherche avec la labellisation de centres d'excellence spécialisés dans les traitements de thérapie innovante. De tels centres bénéficieraient d'un appui logistique et financier, et s’inspireraient de l'expérience des centres labellisés de phase précoce (CLIP²) mis en place en 2010 par l'Institut national du cancer. Les auteurs attribuent en partie à cette nouvelle structuration l'augmentation de 42 % du nombre d'essais cliniques initiés en France dans le domaine de l'oncologie, et le triplement du nombre de patients inclus entre 2010 et 2020.
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